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Chaque jour, Marion Lagardère scrute la presse papier et décrypte l'actualité.

Dans la presse ce matin, "la France n’en a pas fini avec Daesh".

C’est le titre en Une de la Dépêche du Midi, et de Libération, deux jours après l’attentat de Paris. Et cette polémique, qui "rebondit", comme le dit Sud-Ouest, celle sur les fiches S.

"Une fois de plus, titre le Parisien, le tueur était fiché".
"Il l’était même doublement", note la Nouvelle République.
"L’attentat de Paris relance le débat", résume le Figaro dans lequel Laurence de Charrette dénonce "les apôtres du renoncement drapés d’une prétendue sagesse démocratique (…). Ces attentats, c’était hier, c’était avant-hier, écrit-elle, mais ce sera encore demain, puisque les fiches S ne servent pas à enfermer ou expulser les terroriste mais à "remonter les filières"". 
Le Figaro qui parle "d’aveuglement, de renoncement et de grande capitulation".
Peu ou prou les mêmes mots que ceux utilisés par Laurent Wauquiez et rapportés en page 5.
Mais dans l’exercice du réquisitoire, le journal est bien seul ce matin.

Les autres éditorialistes passent un tout autre message.

À l’image de la Voix du Nord où Hervé Favre fustige "les idées simples sur les fichés S".
"Le fantasme des fiches de renseignement tenant lieu de jugement n’est pas tenable, écrit également Didier Rose dans les Dernières Nouvelles d’Alsace, dénonçant la « démagogie et les raccourcis".
Dans La Charente Libre, Jean-Louis Hervois parle de "surenchère sécuritaire" et Yann Marec dans Midi Libre réclame "un minimum de décence à tous ces donneurs de leçons qui vocifèrent sur l’État français : ce n’est certainement pas comme ça qu’on se sortira du piège terroriste, dit-il, le meilleur antidote reste la concorde nationale".

Et puis il y a aussi Rémi Godeau qui, dans l’édito du quotidien l’Opinion, dénonce "l’hystérisation de la classe politique, la surenchère sécuritaire et autre bal des postures (…) pour autant, écrit-il, on aurait tort de refuser le débat sur l’objet de la polémique, ce fichier S qui interpelle sur la méthode et sur les moyens de la lutte antiterrorisme".

Sur la méthode, les Échos rappelle que les fiches S "sont un outil de surveillance et non une présomption de culpabilité".
Et sur les moyens, la Croix précise que pour "surveiller à temps plein une personne fichée, il faut mobiliser 15 à 30 fonctionnaires".
On a fait le calcul. Sachant que 10.000 personnes sont fichées pour radicalisation, il faudrait entre 150 et 300.000 policiers pour tous les surveiller 24h/24. Autant dire qu’on est largement au-dessus des effectifs actuels de la Police Nationale.

Et puis, en parallèle, il y a bien un endroit où la fiche S a changé de statut : c’est le dictionnaire, puisque l’expression a été retenue pour entrer dans l’édition 2019 du Robert.

C’est le Parisien qui nous l’apprend ce matin en publiant la liste des "élus du dico".
On compte donc "fiché S", mais aussi, dans le même registre "revenant" et "cyberdéfense".
En politique, on retient "dégagisme", mais aussi marcheurs ou insoumis.

Et puis, puisqu’un dictionnaire reflète la société, les lexicographes du Robert ont également intégré le mot "frotteur", "personne recherchant les contacts érotiques en profitant de la promiscuité dans les transports en commun". Bon, on ne voit pas trop ce que ça a d’érotique, il manque surtout le mot "agression" dans la définition, mais enfin on ne fait pas les dictionnaires.
  Raphaëlnon plus visiblement puisque l’expression "écriture inclusive" a été validée.
Et puis, quelques anglicismes qu’on connait bien : fashionnista, running, replay ou SUV… et quelques mots qui parlent de notre époque : par exemple "animalisme", pour ce mouvement de défense des animaux comme êtres sensibles, grossophobie, pour la stigmatisation des personnes en surpoids ou encore "rageux", qui décrit très bien effectivement l’attitude de ceux, généralement sur les réseaux qui sont agressif et haineux.
Liste complète à retrouver dans le Parisien.

De la "rage" à la colère : l’autre titre ce matin met en garde contre la montée des tensions en Israël.

Entre l’anniversaire des 70 ans de la création de l’État d’Israël et le déménagement de l’ambassade américaine à Jérusalem, tout ça sur fond de rupture du traité sur le nucléaire Iranien. Ça fait beaucoup, "mais n’allons pas trop vite : le pire n’est peut-être pas si sûr", c’est L’Opinion qui dédramatise en Une, "si les menaces s’accumulent, écrit Jean-Dominique Merchet, un conflit généralisé reste peu probable".
L’Opinion qui est le seul journal, il faut bien le dire, à temporiser.

Pour le Télégramme en Une c’est "l’alerte maximale". 
Aujourd’hui en France parle de "colère et de tension",
et pour La Croix, "le fossé se creuse" entre Israélien et Palestinien.
Reportage à Jérusalem, "ville miroir du conflit", et puis dans la Bande de Gaza, où des milliers de Palestiniens veulent "briser leur enfermement", nous dit le journal.

Ce sont d’ailleurs eux qui font la Une des sites de la presse Israélienne ce matin, Haaretz, Jerusalem Post, ou Yediot qui anticipe "une escalade de violence".

Mais ! Mais "Le pire n’est pas sûr", répète l’Opinion : "beaucoup pronostiquent une explosion de violence, explique l’historien Vincent Lemire, une intifada militarisée, des attentats, mais tout ça n’a pas eu lieu parce que la jeunesse palestinienne cherche de nouveaux moyens d’actions, des méthodes non-violentes et autonomes, ces jeunes, dit-il, réfléchissent bien plus que leur ainés à l’impact médiatique de leurs actions. Ce qu’ils veulent c’est l’égalité des droits".

Analyse pragmatique à lire donc dans l’Opinion.

Enfin, on parle aussi beaucoup d’argent dans vos journaux, sous des angles très divers.

Par exemple les dividendes versées par les entreprises française, Axel de Tarlé nous en parlait tout à l’heure, et c’est la Une de l’Humanité.: "les actionnaires du CAC 40 réalisent le casse du siècle", titre le journal, qui donne dans le détail les conclusions du rapport de l’ONG Oxfam : où l’on réalise qu’effectivement, cocorico, nous sommes champion mondial en matière de dividendes ! Devant les États-Unis, le Japon, l’Australie et bien au-dessus de la moyenne européenne.

Une donnée pour l’illustrer : si l’on prend les bénéfices réalisés entre 2009 et 2016, 67% de ces bénéfices ont été versés en dividendes, 27% ont été réinvestis dans l’entreprise et 5% seulement ont été reversés aux salariés.
Oxfam qui démontre également que l’écart de rémunération se creuse toujours plus entre les PDG et leur employé : aujourd’hui, l’écart est de 1 à 120. En 2009, il était de 1 à 96.
On vous laisse lire l’Humanité pour avoir toutes les données.
C’est assez vertigineux, parce que ce sont des sommes évidemment qu’on a du mal à se figurer.

Alors que la Une de Midi Libre, sur les panneaux solaires, là on se figure très bien l’affaire : "gare aux arnaques, titre le journal, enquête sur ces escroqueries qui se multiplient".

Gare aux arnaques aussi pour les mariages, ça c’est dans le supplément Éco du Parisien qui titre "cher mariage", et vous donne deux ou trois "astuces", pour réduire la facture.

Enfin, le site d’information Les Jours vous éclaire sur une autre sorte d’arnaque potentielle, celle de la prolifération des labels alimentaires  "Oui, il y a trop de logos, et oui il y a plein d’arnaque", écrit Thibaut Schepman, qui a décidé de se lancer dans cette enquête en constant son propre désarroi face aux labels.
"Les mots détox, par exemple, ou  "tradition", ou "sélection de nos régions", joue sur la fibre patriotique made-in-France mais ne garantissent absolument rien. Même chose pour les logos "zéro résidus de pesticide". Et puis il y a la liste des logos fiables, les AB, Max Havelaar, Nature et Progrès, c’est qui le patron. Sachant concluent Les jours, qu’il y a aussi des produits sans label mais pas sans qualité ! Encore faut-il pouvoir se déplacer chez le producteur.
Pour cette mode-là, il y a pas encore de nouveau mot dans le dictionnaire mais ça ne saurait tarder.