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Didier François revient chaque matin sur un évènement international au micro d'Europe 1 Bonjour.

Nouveau retour sur la Corée ce lundi car les images de ce week-end de la rencontre entre les deux présidents du Nord et du Sud étaient proprement incroyables.

Avec cette impression étrange qu'après 65 ans de guerre, les deux pays (que tout oppose) viennent de réaliser qu'ils forment néanmoins une seule Nation.

C'était un sommet très attendu, la première rencontre entre le président nord-coréen Kim Jong-un et son homologue du sud, Moon Jae-in. Mais c'était surtout la toute première fois qu'un dirigeant communiste du nord franchissait la ligne de démarcation qui divise la péninsule coréenne depuis 65 ans.

C'était effectivement un de ces moments absolument incroyable qui avait d'ailleurs était très soigneusement mis en scène. Avec cette arrivée de Kim Jong-un dans une immense limousine noire, encadré par une phalange impressionnante de gardes du corps sortis tout droit du film Men in Black. Ils étaient douze et courraient en petites foulées à hauteur des vitres du véhicule. Puis, ils ont formé un véritable écran de leurs corps pendant toute la descente des marches monumentales menant à cette fameuse ligne de démarcation où se tenait le président sud-coréen en costume bleu, les pieds collés à bordure de béton qui matérialise la ligne de front entre les deux Corées. À l'endroit même où avait été signé l'armistice de 1953, c’est toute l'importance qui avait été accordée aux symboles. Et là, grand numéro de réconciliation.  

Embrassades, passage de la frontière dans un sens, passage de la frontière de l'autre et assaut de politesse et d'amabilités. Avec un Kim Jong-un, visiblement au mieux de sa forme, qui a mené une incroyable opération de charme. Alors certes à destination des Sud-Coréens, évidemment, mais également en direction de la communauté internationale. L'idée étant quand même de faire oublier qu'il est un dictateur sans le moindre scrupule alors qu'il doit rencontrer Donald Trump dans les semaines à venir, c qui est pour lui un sommet à l'enjeu capital.

Il a d'ailleurs fait une belle ouverture avec la promesse de démanteler, justement avant la fin du mois prochain, le centre où il a réalisé tous ces derniers essais nucléaires.

C'est effectivement son annonce la plus marquante qui vise à laisser entendre que la Corée du Nord serait prête à se dénucléariser. C'est d'ailleurs ce qui est dit mais de manière très indirecte dans la déclaration commune qui parle de "dénucléarisation complète" de la péninsule coréenne. Mais qui ne la définit en rien puisqu'aucun mécanisme concret de désarmement n'est envisagé, que ce soit pour de la destruction des ogive, la vérification des stocks ou le contrôle des centrifugeuses. De la même manière, il n'y a pas le moindre calendrier qui ait été avancé. Et on ne connait pas les contreparties exigées par la Corée du Nord mais on imagine assez mal qu'il n'y en ait aucune. Donc attention, il ne faut certainement pas bouder une promesse qui parait très séduisante. Mais enfin, il ne faut tout de même pas être naïf au point de croire que Kim Jong-un a subitement rompu avec la politique menée depuis trois générations par sa famille à la tête de la pire dictature stalinienne du monde sans espérer obtenir des Occidentaux de sérieuses garanties sur l'avenir de son régime.

Indépendamment de l'affaire nucléaire, on sentait quand même dans cette rencontre une volonté des deux parties de s'affirmer comme Coréens.

En tous cas, c'est très clair du côté de la Corée du sud où, que ce soit le gouvernement ou la population, le sentiment général est bien celui d'appartenir à une même Nation vivant dans deux pays différents. Au nord, en revanche, c'est plus difficile de savoir ce que pensent vraiment les gens. Mais Kim Jong-un a visiblement décidé de jouer sur cette aspiration à la paix, très forte en Corée du sud, pour tenter d'alléger la pression que les Américains mettent depuis quelques mois et aborder les futures négociations dans une situation un peu moins contrainte.