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François Clemenceau revient chaque matin sur un événement international au micro d'Europe 1 Bonjour.

Le président russe a inauguré hier un nouveau pont reliant la Russie à la Crimée. Un geste qui a été aussitôt condamné par l’Union européenne.

Ce n’est pas la première fois que Vladimir Poutine se rend en Crimée depuis qu’il a ordonné son annexion et que ses habitants l’ont validée par un référendum controversé. Déjà, dès 2014, il avait tenu à présider une parade militaire navale dans les eaux de Sébastopol, signant là en quelque sorte sa prise de guerre sur l’Ukraine. Sauf qu’avec ce pont qu’il vient d’inaugurer en jean et blouson, au volant d’un camion, comme s’il était l’un de ces chauffeurs russes qui pourra désormais rejoindre la Crimée en une vingtaine de minutes par la route, il accentue davantage le rapport de force. Il montre que cette annexion est désormais une continuité territoriale et que ce qu’il n’a pas réussi à obtenir avec les séparatistes du Donbass à la frontière russe, il l’obtient par ce pont de 19 kilomètres, un pont autoroutier doublé d’une voie ferré, le plus long jamais construit en Europe continentale, une performance de constructeur aussi puisqu’il a été bâti en à peine deux ans par une société contrôlée par le milliardaire russe Arkadi Rotenberg, l’un des partenaires de judo de Poutine.

Est-ce que cela signifie qu’il renonce également à favoriser une solution pacifique dans le conflit ukrainien ?

C’est un peu tôt pour le dire mais force est de reconnaître que ce dossier, et les discussions qui sont censées progresser dans le cadre des fameux accords de Minsk, est  au point mort. Pas de recul, mais pas d’avancées non plus. Le statu quo en somme, avec quelques tirs d’obus et de roquettes au quotidien qui font peu de victimes mais qui entretiennent un climat de confrontation inconciliable avec la recherche d’une solution. Cela ne veut pas dire non plus que les Ukrainiens sont exempts de toute responsabilité dans ce contexte. D’ailleurs le ton entre les deux pays est monté d’un cran hier avec une perquisition et des arrestations hier à Kiev au siège de l’agence Ria Novosti et de la télévision Russia Today. L’un des journalistes interpellé est accusé de haute trahison.

Et qu’en disent les interlocuteurs de Poutine, la France et l’Allemagne ?

Paris et Berlin sont engagés depuis 2014 dans ce fameux format Normandie avec la Russie et l’Ukraine mais tout le monde reconnait qu’il n’y a pas d’avancées. Chaque camp attend de l’autre qu’il fasse pression sur son adversaire pour faciliter des compromis et surtout des actes qui témoignent au moins de bonne volonté. Clairement ce pont représente tout le contraire, c’est comme un clou qu’on enfonce pour pérenniser ou geler le conflit. Il se trouve qu’Angela Merkel est attendue à Sotchi en fin de semaine à l’invitation de Vladimir Poutine et qu’Emmanuel Macron le sera à son tour mais en milieu de semaine prochaine à St Petersbourg, la ville natale du président russe. A l’évidence ce pont trop loin devenu si près, sera au cœur de la discussion