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Dimanche, les Turcs vont voter pour donner, ou non, les pouvoirs absolus au président Recep Tayyip Erdogan.

L'édito éco de Nicolas Barré, directeur de la rédaction des Echos. Bonjour Nicolas. Les Turcs voteront dimanche pour ou contre une réforme qui donnerait les pouvoirs absolus au président Erdogan. Les électeurs sont d’autant plus divisés que le mécontentement économique grandit

Oui, Erdogan, qui règne sur la Turquie depuis 14 ans, pensait avoir trouvé la formule magique, le mariage entre islamisme et économie de marché. Or ce mariage tourne mal. L’islamisation progresse à grand pas, elle s’infiltre au cœur de l’Etat, elle gangrène l’ensemble de la société et parallèlement l’économie se dégrade, les investisseurs étrangers regardent avec inquiétude s’installer un pouvoir de plus en plus autoritaire.

La Turquie basculera même dans la dictature si Erdogan remporte le référendum de dimanche. Il essaie de rassurer en prétendant qu’il veut diriger le pays comme une entreprise, sauf qu’il imagine une entreprise sans aucun contre-pouvoir, sans actionnaires, sans syndicats et sans personne pour contrôler les comptes.

 

Et les comptes de la Turquie ne sont pas bons.

Non, on est passé du miracle au marasme. Au début de son règne, Erdogan a trouvé une économie en déconfiture mais il a accepté l’aide du FMI et entrepris des réformes avec le soutien de l’Union européenne. Ça a produit de très bons résultats puis les choses se sont gâtées au fur et à mesure que le régime se durcissait. La croissance a été divisée par deux, elle était de seulement 2,9% l’an dernier ce qui est faible pour un pays en plein développement. L’inflation atteint 11% par an, le pouvoir d’achat en souffre. Le chômage est officiellement de 13%, sans doute plus. Mais surtout, le pays n’inspire plus confiance.

 

Alors que la Turquie était considérée comme l’atelier de l’Europe il n’y a pas longtemps.

Oui, beaucoup d’entreprises européennes s’y sont installées. Mais la dérive islamiste et autoritaire du régime porte atteinte à l’état de droit, ce qui est dévastateur pour une économie libre. Les investisseurs s’inquiètent. D’autant que cela s’accompagne d’une étatisation de l’économie, autre moyen pour Erdogan de renforcer son pouvoir. Si le oui l’emporte dimanche, on ira droit au divorce entre islamisme et économie de marché en Turquie. On y est presque.