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Chaque samedi et dimanche, Nicolas Beytout, directeur du journal "L'Opinion", donne son avis sur l'actualité de la semaine.

Bonjour Nicolas, cette semaine vous avez aimé un chiffre : 1.000, comme 1.000 milliards d’euros d’impôts et de taxes.

Exactement, 1.000 milliards, c’est en effet le montant de tout ce qui a été prélevé, c’est-à-dire pris dans la poche des Français, les ménages et les entreprises, au cours de l’année 2017. C’est un record absolu, jamais les impôts n’avaient été aussi lourds, et, autre record, nulle part ailleurs, dans aucun autre pays développé, ce niveau n’est atteint. 1.000 milliards par an, (1.038 exactement) c’est près de trois milliards par jour, 120 millions de l’heure. C’est un siphon d’une puissance inouïe, qui pompe une partie des forces vives du pays. Ce n’est d’ailleurs pas une surprise : j’ai retrouvé dans mes notes, il y a deux ans, le même chiffre. On savait à l’époque que l’année 2017 allait pulvériser ce seuil des 1.000 milliards.

Mais ça n’a pas particulièrement provoqué de débat.

C’est vrai. Ça alimente un ras-le-bol fiscal rampant, mais pas de rejet à proprement parler. C’est d’ailleurs un phénomène très intéressant. On débat tous sur le taux de prélèvements obligatoires, c’est-à-dire la part de richesse nationale qui est prélevée en impôts et taxes. On dit : la France, c’est 45,3% de prélèvements obligatoires par rapport au PIB. Bon, je dois reconnaître que ce n’est pas très parlant.

Même si c’est la bonne mesure.

Absolument : pour mesurer la pression réelle du fisc sur une économie, il faut la comparer à la taille réelle de cette économie, sur ce qu’elle produit, sur le PIB. Donc il faut dire : sur un peu plus de 2.200 milliards de produits et de biens créés par la France l’an dernier, l’Etat, la Sécu, les collectivités locales en ont prélevé 1.000. C’est parlant, et c’est pour ça que j’aime ce chiffre. Tenez, je vous en donne un autre, une autre façon de faire prendre conscience aux Français de cette réalité, de cette pression fiscale record.

Et c’est ?

Son incroyable progression. En quinze ans, ces impôts et ces taxes ont augmenté de 370 milliards d’euros. C’est incroyable : 54% de progression en 15 ans. Et vous pensez bien que l’économie française ne s’est pas développée d’autant. Autres chiffres spectaculaires : 1.000 milliards d’impôts et de taxes en 2017, c’est 43 milliards de plus en un an, 70 milliards en deux ans. Et ça va continuer cette année, et l’an prochain. Car lorsque le gouvernement explique qu’il va diminuer les impôts, il en réduit certains, mais il ne les baisse pas tous, non : il ralentit leur progression.

Et puis, il y a toujours cette manie française d’imaginer de nouvelles taxes.

Oui, la taxe mégot, la taxe écrans pour remplacer la redevance, la taxe soda, la liste est longue. Et là encore, c’est une évolution notable de notre fiscalité. Parce que ces taxes sont considérées comme plus indolores pour les Français, parce qu’on les paye sans s’en rendre compte, elles sont le moyen idéal d’augmenter la pression fiscale sans déclencher trop rapidement la colère des Français. C’est tellement vrai que sur les 1.000 milliards de prélèvements fiscaux, 700 milliards proviennent des taxes. Parfois, ça rate (rappelez-vous l’écotaxe et les portiques). Mais la plupart du temps, ça réussit.