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Chaque samedi et dimanche, Nicolas Beytout, directeur du journal "L'Opinion", donne son avis sur l'actualité de la semaine.

Bonjour Nicolas, vous n’avez pas aimé ce qui s’est passé jeudi, le 15 novembre.

En effet, le 15 novembre, c’est le jour où il n’y avait plus d’argent dans les caisses de l’Etat. Fini, plus un sou, tout a été dépensé. Tout, c’est-à-dire les quelques 350 milliards d’impôts qui ont été prélevés sur les Français. Plus d’argent pour payer les fonctionnaires, pour investir, pour couvrir les dépenses indispensables de l’Etat vis-à-vis de ses concitoyens.

Bon, c’est quand même un peu théorique, non ? Les fonctionnaires seront bien payés à la fin du mois ?

Bien sûr, mais je trouve que cette façon de présenter les choses est beaucoup plus parlante que les présentations habituelles. En général, on parle d’un pourcentage de déficit, et on le compare à la totalité de ce que produit, de ce que fabrique un pays, le PIB. On dit : le déficit public de la France c’est 2,6% du PIB. Ça vous parle concrètement ?
Non…

Non, évidemment. Ça parle éventuellement à ceux qui comparent cette évolution de nos finances publiques d’une année sur l’autre, ou à ceux qui comparent nos performances (médiocres) à celles de nos voisins européens. Alors que là, avec cette date du 15 novembre, on visualise parfaitement le sujet. C’est un think tank, l’Institut Molinari, qui a inventé cet indicateur. C’est lui qui a calculé qu’il restait 47 jours de fonctionnement de l’Etat pendant lesquels la France doit emprunter pour assumer ses dépenses. Alors, encore une fois, l’Etat n’est pas pris au dépourvu, et le Trésor public n’a pas attendu cette date pour emprunter, pour gérer la dette. Mais ce que démontre cette date du 15 novembre, c’est que sur 365 jours de l’année, les caisses de l’Etat ne peuvent en financer que 318.

Et combien est-ce qu’on doit emprunter pour couvrir le reste ?

80 milliards d’euros, qui représentent le déficit du budget. Il faut remonter à plus d’un demi-siècle, en 1974, pour trouver une année où l’Etat n’a pas eu besoin d’emprunter pour couvrir ses fins de mois. Il n’y a autour de nous que la Pologne et la Roumanie qui font moins bien, à 3 ou 5 jours près. L’Italie, qui n’est pas très vaillante sur ce plan, tiendra jusqu’au 28 novembre. En moyenne, les pays européens tiendront jusqu’au 13 Décembre (ça veut dire qu’il y a une impasse de 15 jours, ce qui n’est rien).

Et il y a des pays qui dépassent la fin de l’année ?

Et dont les dépenses sont plus faibles que ce qu’ils lèvent comme impôts ? Oui, je suis sûr que vous pensez à l’Allemagne, et vous avez raison : ses excédents la mènent au 6 janvier. Mais, on l’ignore souvent en France, il y a en Europe 9 pays dont les budgets sont excédentaires, et qui se désendettent donc, année après année. Le Danemark tient jusqu’au 9 janvier (mieux que l’Allemagne), les Pays-Bas jusqu’au 14, la Suède tient jusqu’au 23 janvier avec ses excédents. Comme quoi on peut être un grand pays social-démocrate, avoir un Etat et une protection sociale généreux, et bien gérer ses finances publiques.