Stages : ces secteurs les plus gourmands

© MaxPPP
  • Copié
Sophie Amsili , modifié à
LE POINT DE VUE DE - Génération Précaire fait le point sur les secteurs "noirs" et ceux qui ont initié de bonnes pratiques.

La ministre de l'Enseignement supérieur et de la recherche Geneviève Fioraso a affirmé, jeudi dans les colonnes de Libération, sa volonté de développer les stages et surtout de mieux les encadrer. "Certains secteurs, comme la publicité, ont entre 10% et 15% de stagiaires, précise-t-elle. Ce n'est pas normal, et nous étudions, avec le ministre du Travail, Michel Sapin, la possibilité de fixer les plafonds." Qui sont aujourd'hui les mauvais élèves, grands "consommateurs" de stagiaires ? Aucun chiffre n'existe aujourd'hui sur le nombre de conventions de stage signées chaque année, mais des tendances se dégagent, selon Ophélie Latil, porte-parole du collectif Génération Précaire de défense des stagiaires.

Quels sont les secteurs qui recrutent le plus de stagiaires actuellement ?

De manière générale, il y a des secteurs plus "noirs" que d'autres : l'édition, la communication, le luxe et le milieu associatif. Mais, parallèlement, avec le début de la crise, il y a eu les premières coupes dans le budget de secteurs comme le recrutement et le droit, qui ont à leur tout recruté plus de stagiaires. Et peu après, on a constaté que tout l'emploi peu ou pas qualifié était concerné. Il n'y a jamais eu autant d'offres pour des stages d'une durée minimum de six mois et en même temps, il y a une telle frilosité à l'embauche de la part des entreprises, qu'il y a beaucoup d'offres de CDD de maximum 6 mois. Par exemple, lors des fêtes, l'an dernier, les enseignes de vente de biens culturels n'ont pas recruté d'emplois temporaires. A la place, ils ont pris des stagiaires.

Y'a-t-il, au contraire, de bons élèves ?

Je ne parlerais pas de "bons élèves" mais certains vont vers des bonnes pratiques. Le secteur de l'assurance, par exemple, propose des gratifications attractives aux stagiaires et, surtout, il tend à privilégier l'apprentissage, qui est la solution que nous défendons. On estime en effet que plus 80% des apprentis obtiennent un poste dans leur entreprise alors que moins de 10% des stages sont transformés en emploi.

Le secteur des télécoms peut également être cité en exemple. L'accord de branche signé en 2008 correspond à nos demandes, avec par exemple une gratification qui évolue selon le niveau d'études (majorée d'au moins 10% pour un bac+3, 20% pour un bac+4 et 30% pour un bac+5 ou plus, ndlr). L'accord prévoit aussi que le comité d'entreprise soit informé du nombre de stagiaires et que le délai de carence entre deux stages soit respecté.

Les propos de la ministre de l'Enseignement supérieur vont-ils, selon vous, dans le bon sens ?

Oui, on a peur qu'il n'y ait pas une vraie grande réforme mais on y croit. Elle a parlé d'introduire un minimum d'heures de cours dans les conventions de stage : c'est ce que nous demandons depuis des années. Quant au plafond des six mois de stage consécutifs, il est déjà inscrit dans la loi Cherpion de 2011 qui a été adoptée grâce à l'intervention de Génération Précaire. Mais il n'y aucun contrôle des stagiaires. C'est là le vrai problème : il faut qu'il y ait plus d'inspecteurs du travail et les former pour ça.