Renault-Nissan enterre la hache de guerre avec l'Etat

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BRAS-DE-FER - Irrité de voir l'Etat utiliser son pouvoir d'actionnaire pour peser dans les choix de l'entreprise, le PDG de Renault-Nissan menaçait de revoir l'équilibre subtil entre la marque au losange et son homologue japonais.

La guerre entre Carlos Ghosn et l'Etat français n'aura finalement pas lieu. Le conseil d'administration de la marque au losange, qui menaçait de virer au règlement de comptes, a finalement permis d'aboutir à un compromis baptisé "accord de stabilisation". L'Etat français s'est engagé à ne pas s'immiscer dans les décisions les plus stratégiques, tandis que Nissan a promis de ne pas monter dans le capital de Renault pour contrebalancer les autorités publiques françaises.

Les droits de vote double à l'origine de la crise actuelle. Renault ayant pendant longtemps été une régie nationale, sa direction - et surtout Carlos Ghosn - a toujours entretenu des relations ambivalentes avec l'Etat. La loi Florange, censée réduire le pouvoir des actionnaires spéculateurs en accordant des droits de vote double en assemblée générale aux actionnaires de longue durée, a provoqué un regain de tension. La direction de Renault et son PDG Carlos Ghosn s'y sont opposés, en vain.

L'Etat est en effet monté dans le capital de Renault sans prévenir afin d'obtenir une minorité de blocage et imposer cette loi, provoquant la riposte de Carlos Ghosn. Ce dernier a alors menacé de modifier l'alliance entre Renault et Nissan, estimant que le constructeur japonais était le grand perdant de cette affaire. Or, cette alliance est stratégique pour Renault  : si ce dernier est venu au secours du japonais lors de leur rapprochement, le vent a depuis tourné et c'est Nissan qui est désormais en grande forme. Renault ne peut donc pas se passer d'un tel allié.

Un nouvel équilibre entre Renault et l'Etat français. Après huit mois de crise, l'Etat, Renault et Nissan ont finalement trouvé un modus vivendi. Si l'Etat conserve des droits de vote double, ces derniers seront limités à certaines décisions. Ils seront plafonnés pour l'ensemble des décisions relevant de la compétence de l'assemblée générale ordinaire, à l'exception des décisions relatives à la distribution de dividende, la nomination et la révocation des administrateurs représentant l'Etat, et la cession portant sur plus de 50% des actifs de Renault.

Le "plafonnement des droits de vote cesse de s'appliquer dans des situations à caractère exceptionnel telles que la modification ou la résiliation du RAMA (accord fondamental de l'Alliance), la récupération par Nissan de ses droits de vote dans Renault, l'annonce d'une offre publique sur Renault, le franchissement du seuil de 15% en capital ou en droit de vote par un tiers actionnaire, y compris Nissan", précise le communiqué.

Nissan, qui s'inquiétait de voir l'Etat prendre une influence grandissante au sein de Renault, est également rassuré : en échange de sa promesse de ne pas activer les droits de vote auxquels il pourrait avoir droit au sein de Renault, le Japonais est assuré que Renault n'interférera pas dans sa gouvernance. Et si cette promesse n'était pas respectée, NIssan n'hésitera pas à monter dans le capital de Renault pour mieux se faire entendre. Quand à l'Etat, il a réitéré sa promesse de revendre les actions qu'il avait achetées en début d'année afin de revenir à la situation précédente : il détiendra alors 15,01% du capital de la marque au losange, contre 19,74% actuellement.