Renault : les doutes de la police

Après avoir affirmé être victime d'espionnage industriel, le groupe Renault découvre qu'il pourrait avoir été escroqué, peut-être même par le chef de son service sécurité.
Après avoir affirmé être victime d'espionnage industriel, le groupe Renault découvre qu'il pourrait avoir été escroqué, peut-être même par le chef de son service sécurité. © MAXPPP
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avec Alain Acco , modifié à
Dominique Gevrey, "monsieur sécurité" de Renault, a livré sa source sans convaincre les policiers.

Mis en examen pour escroquerie aux dépens du constructeur Renault, Dominique Gevrey a commencé à répondre aux questions des enquêteurs, qui veulent savoir d’où viennent les informations qui ont conduit Renault à licencier trois cadres pour espionnage.

Le responsable de la sécurité au sein de Renault a certes livré un nom au juge d'instruction, qu'il présente comme celui de sa "source", a-t-on appris de source judiciaire. Mais cette révélation est loin de convaincre les enquêteurs, qui sont en train de vérifier cette information.

A la recherche de la fameuse source

Dominique Gevrey affirmait être en contact avec un informateur anonyme censé prouver l'implication des trois cadres soupçonnés d'espionnage, licenciés et finalement innocentés. "Lors de son interrogatoire de première comparution devant le juge d'instruction (dimanche), Dominique Gevrey a donné un nom qu'il présente comme sa source", a-t-on indiqué de source judiciaire.

"Les enquêteurs font les vérifications pour s'assurer de la véracité de cette déclaration", a-t-on précisé de source judiciaire, avant d’ajouter : "rien ne prouve pour l'instant que le nom donné par Monsieur Gevrey est le bon".

Voyage et virements bancaires douteux

Les enquêteurs doutent, d’autant que les derniers agissements de Dominique Gevrey ne plaident pas en sa faveur. Cet ancien du renseignement militaire a été interpellé il y a une semaine alors qu'il s'apprêtait à prendre un avion pour la Guinée. Il a depuis été mis en examen et placé en détention.

Puis les enquêteurs ont mis la main sur un compte bancaire qu’il a ouvert en Suisse en 2010 et sur lequel a atterri la moitié des 245.000 euros versés par Renault pour rétribuer la supposée "source". Dans son édition du 16 mars, Le Canard Enchaîné croit savoir que cette “source“ serait tout simplement fictive et que Dominique Gevrey arnaquait son propre employeur pour conserver les “récompenses“ destinées à sa source.

Espionné ou escroqué, Renault est dans l’embarras

Renault a innocenté et promis "réparation" lundi à ses trois cadres dirigeants licenciés "à tort" en janvier pour espionnage industriel, reconnaissant que l'affaire était probablement montée de toutes pièces. Un audit interne est mené actuellement et devrait livrer ses conclusions le 28 mars.

"Il faut que toute lumière soit faite sur la chaîne des responsabilités, sur la raison pour laquelle une entreprise de cette qualité s'est laissée embringuer dans cette espèce d'histoire absolument rocambolesque et désastreuse", a réagi la ministre de l'Economie Christine Lagarde, vendredi matin sur Europe 1. Une manière à peine déguisée de demander que des têtes tombent, notamment celle de Patrick Pelata, et pourquoi, une fois la page tournée, celle de Carlos Ghosn. Plusieurs ministres défendraient cette solution, reste néanmoins à trouver un candidat ayant l'étoffe pour lui succéder.