Rapport Gallois : tout ça pour ça ?

Louis Gallois doit présenter son rapport sur la compétitivité le 5 novembre, mais le gouvernement n'en veut plus.
Louis Gallois doit présenter son rapport sur la compétitivité le 5 novembre, mais le gouvernement n'en veut plus. © MAXPPP
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Thomas Morel , modifié à
La majorité prend ses distances avec le rapport sur la compétitivité qui n'est même pas officiel.

On l’attendait depuis des mois comme le messie, le voilà déjà enterré. Le rapport Gallois sur la compétitivité, commandé par François Hollande à l’ex-patron d’EADS et dont les premières pistes ont commencé à sortir dans la presse, semble de moins en moins intéresser le gouvernement.

Depuis les premières fuites, la semaine dernière, plusieurs ministres ont ainsi tenu à prendre leurs distances avec le document, qui doit être officiellement présenté le 5 novembre. François Hollande, pourtant à l’origine de ce rapport, l’a écarté vendredi, expliquant que "c'est un rapport qui engage son auteur, qui n'engage pas le gouvernement, pas le président de la République".

Le gouvernement enfonce le clou

Ce week-end, les membres de son gouvernement ont à leur tour enfoncé le clou. Dimanche sur France 3, le ministre du Travail Michel Sapin a par exemple expliqué que le débat sur la compétitivité ne pouvait pas se limiter aux seules conclusions du rapport : "Le rapport Gallois est un élément, (…) mais ce n’est pas le seul point de vue qui compte".

Marisol Touraine, la ministre de la santé, s’est elle opposée à tout transfert de cotisations, pourtant annoncé comme la mesure phare du rapport. "Je ne crois pas, compte tenu de la situation des finances publiques, que l’on puisse (…) faire supporter aux Français un choc supplémentaire de plusieurs milliards d’euros".

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© EUROPE 1

Même Jacques Attali, économiste et auteur lui aussi de "rapports-qu’on-enterre-rapidement" -il en avait écrit deux sur le thème de la « libération de la croissance » pour Nicolas Sarkozy, en 2008 et 2010- fustige le texte, qui mettrait selon lui trop l’accent sur la baisse du coût du travail. Dans un entretien au Journal du Dimanche, il a défendu "l’intelligence" comme solution pour relancer l’activité en France : "La compétitivité ne se réduit pas à la baisse des charges sociales. Sinon la Grèce serait très compétitive. (…)La compétitivité c'est l'innovation, la recherche, le goût du risque."

Des écarts entre la politique de Hollande et les préconisations du rapport

Même si Pierre Moscovici, ministre de l'Economie, a assuré lundi que le rapport Gallois sur la compétitivité n'était "pas enterré", les choses se présentent mal. Il faut dire qu’il semble appuyer systématiquement là où ça fait mal. D’abord en jouant avant tout sur la baisse du coût du travail. Le rapport devrait en effet défendre l’idée d’un allègement des charges patronales et salariales de 30 milliards d’euros sur deux ans. Pour compenser, il prône une baisse de la dépense publique, ainsi qu’une hausse modérée de la TVA et de la CSG. Pour François Hollande, qui a fait supprimer la TVA sociale de Nicolas Sarkozy, il serait impensable de faire machine arrière.

>> A lire : les principales mesures du rapport Gallois

Même combat sur les gaz de schiste, dérivés du pétrole dont le sous-sol français regorge, mais dont l’extraction fait débat. Alors que François Hollande a dit "non"  aux groupes pétroliers qui voulaient lancer des forages, Louis Gallois, lui, choisit d’en défendre l’exploitation sur le sol français.

Le rapport Gallois n’a pourtant pas que des adversaires. Au-delà du patronat, évidemment favorable à une réduction du coût du travail, Arnaud Montebourg plaide lui aussi la cause du texte, notamment sur la question de la baisse des charges. Il n’a d’ailleurs pas hésité à présenter l’auteur comme un "patriote désintéressé". Reste à savoir si ce soutien sera suffisant pour sauver le rapport, qui doit être l’objet d’une réunion de travail lundi après-midi à Matignon.

>> Selon notre éditorialiste Axel de Tarlé, les allégements de charges sociales ne sont pas vues d'un très bon œil par un gouvernement de gauche...