Pourquoi la France n’arrive pas à sortir de la crise

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Alexis Toulon , modifié à
DIAGNOSTIC - La France a connu trois récessions en 40 ans. Elle s’en était toujours remise, pas cette fois-ci.

L'Insee, dans un ouvrage intitulé "Trente ans de vie économique et sociale" et publié mercredi, revient sur les trois grandes crises économiques qu’a traversées la France dans son histoire récente. La récession qui a débuté en 2008 diffère toutefois de tout ce qu’a connu le pays depuis l’après-guerre. Car malgré des tentatives de régulation de la finance et une cure d’austérité, la France n’arrive toujours pas, cinq ans après, à retrouver le chemin de la croissance.

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1975, six trimestres pour retrouver la santé. La France est frappée de plein fouet par le premier choc pétrolier de 1973 et entre en récession en 1975. Le décrochage du PIB en volume est rapide, mais moins d’un an après le début de la crise, la croissance revient. Six mois plus tard, le PIB en volume est revenu à son niveau d’origine, la crise est terminée.

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1993, huit trimestres pour retrouver la santé. A partir de 1979, les monnaies européennes sont soumises au système monétaire européen. Un outil destiné à stabiliser les monnaies européennes et éviter que les taux d’intérêts ne varient trop. Ainsi, les différences entre le franc, le deutschemark, la lire ou la livre sterling restent minimes. Toutefois, les monnaies restent la cible de spéculation sur les marchés.

En 1992, sous la pression des spéculateurs, la livre sterling et d’autres devises voient leur taux de change s’envoler face au deutschemark. Le SME devient intenable et les pays décident d’en sortir pour protéger leur monnaie ou la dévaluer. Pour éviter que le franc ne sorte du système, la Banque de France a épuisé ses réserves de devises. Les caisses sont vides et la France entre en récession, incapable d’investir et de soutenir la consommation. Le PIB retrouve son niveau d’avant crise deux ans plus tard, en 1995 après un lourd conflit social.

Logo de Goldman Sachs, bandeau 400-REUTERS

2009, la longue convalescence. Subprimes et crise de la dette. La France est rentrée en récession il y a maintenant vingt trimestres et pourtant, le PIB en volume n’a toujours pas retrouvé son niveau du premier trimestre 2008. La grande différence se trouve dans l’origine même du mal. Les premières crises venaient de l’économie réelle, c'est-à-dire hors des marchés financiers et de la Bourse. La crise des subprimes est née sur les marchés. Elle s’est ensuite propagée à l’économie réelle et elle a été doublée de la crise de la dette européenne.

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Pourquoi ça dure ? Lors des crises de 1975 et de 1993, l’activité économique était repartie grâce à la consommation intérieure et aux exportations. En effet, en France, la chute du franc rendait les produits importés plus cher que les produits français. Les consommateurs préféraient donc ces derniers. Dans le même temps, la faiblesse du franc rendait les produits français moins chers à l’étranger que leurs concurrents. La balance commerciale en avait profité, les entreprises également.

Mais, 2009 est une crise financière et bancaire et ce cercle vertueux ne s’est pas engagé. L’euro est resté fort, ce qui a pénalisé les exportations dans les pays hors zone euro. Les pays de la zone euro, nos principaux partenaires économiques, étaient également en crise, ce qui a freiné leur consommation de produits français. Et en France, la consommation intérieure s’est contractée avec le pouvoir d’achat des ménages. L’économie peine donc à repartir.

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La France, un cas à part. La crise est longue, mais l’Insee pointe les réussites de certains pays qui ont réussi à retrouver, et même à dépasser le niveau qu’avait leur PIB en 2008, avant la crise. C’est notamment le cas de l’Allemagne et des Etats-Unis. Le Royaume-Uni a déjà retrouvé le chemin de la croissance et devrait lui aussi dépasser son pic de 2008 d’ici peu. Toutefois, il reste des raisons de s’inquiéter. La Cnuced (Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement) a publié un rapport mardi qui montre que les investissements direct étrangers (IDE) ont chuté de 77% en France en 2013. Une défiance pour les entreprises françaises et de la politique industrielle qui fait figure d’exception dans les grands pays européens. Si Paris veut retrouver le chemin de la croissance, elle devra compter sur ses propres forces et ses propres réformes.

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