Peut-on bloquer le prix des carburants ?

Les prix du carburant ont encore flambé ces derniers jours. Un décret gouvernemental ne pourrait toutefois pas les freiner.
Les prix du carburant ont encore flambé ces derniers jours. Un décret gouvernemental ne pourrait toutefois pas les freiner. © REUTERS
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avec Olivier Samain , modifié à
Le PS veut que le gouvernement bloque la montée des prix à la pompe. Mais ce n’est pas si simple.

Alors que le prix de l’essence vient de nouveau de battre un record historique, le Parti socialiste demande au gouvernement de bloquer par décret le prix des carburants. Avec une telle requête, le PS se fonde sur un précédent bien connu. En 1990, le Premier ministre Pierre Bérégovoy avait effectivement pris cette décision, en s’appuyant sur un article du Code du commerce. Mais la mesure n’est pas si facile à instaurer.

Une décision "exceptionnelle"

Le texte, qui encadre le blocage du prix des carburants, prévoit que la décision doit être motivée par "des circonstances exceptionnelles" ou une situation "manifestement anormale".

Ainsi, en pleine guerre du Golfe, l’ancien chef du gouvernement Pierre Bérégovoy avait dû prendre une mesure d’urgence, du fait de la flambée exponentielle des prix à la pompe. A cette époque, l’Irak venait d’envahir le Koweït, les flux pétroliers transitant par le Golfe persique s’étaient retrouvés bloqués, ce qui entraînait des hausses de plus de 10% par jour.

Or, clament les experts de Bercy, aujourd’hui, le cas de figure n’est pas le même. Les pays européens n’ont aucune difficulté d’approvisionnement.

De son côté, le PS se veut insistant. Au micro d'Europe 1, Aurélie Filipetti, la secrétaire nationale du PS en charge de l’énergie, a déclaré mardi qu'il y avait une "urgence sociale" à prendre un tel décret, dont l'application, a-t-elle nuancé, ne serait que "transitoire et temporaire".

"Personne" ne peut contrôler le prix du brut

En outre, ce texte de loi, malgré ses apparences salvatrices, ne laisse qu’une très étroite marge de manœuvre au gouvernement. Ainsi, le décret pris par Pierre Bérégovoy n’avait pas bloqué les prix de l’essence, mais seulement les marges de distribution. Ce "blocage" avait duré cinq semaines, mais n’avait pas empêché le prix à la pompe de continuer à grimper.

Ainsi, avance Jean-Louis Schilansky, le président de l’Union des industries pétrolières, penser qu’il est possible de canaliser le prix du carburant à la pompe résulte d’une utopie. "Contenir le prix, ça voudrait dire contrôler le prix du pétrole brut. Or, le prix de pétrole brut, c’est un prix mondial que personne ne peut contrôler", assure-t-il au micro d’Europe 1.

Eric Besson dénonce "de la pure démagogie"

"C'est de la pure démagogie", a renchéri le ministre de l'Industrie Eric Besson, mardi matin sur Europe 1. Quand à la barre symbolique des 2 euros évoquée par le patron de Total, Eric Besson y a vu "une anticipation éventuelle", avant d'ajouter : "le pouvoir d'achat (des Français) a été mieux préservé que dans la moyenne des pays européens".