Pacte de responsabilité : la censure qui "laisse perplexe"

L'allègement des cotisations salariales, promis par le gouvernement pour faire augmenter les salaires modestes, a été retoqué mercredi par le Conseil constitutionnel.
L'allègement des cotisations salariales, promis par le gouvernement pour faire augmenter les salaires modestes, a été retoqué mercredi par le Conseil constitutionnel. © MAXPPP
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REMOUS - Le Conseil constitutionnel a retoqué l'allègement des cotisations salariales… mais pas celui des cotisations patronales. Pourquoi ?

La sanction. Les patrons ont eu gain de cause avec le pacte de responsabilité. Les salariés, pas encore. L'allègement des cotisations salariales, promis par le gouvernement pour faire augmenter les salaires modestes, a été retoqué mercredi par le Conseil constitutionnel. Les Sages ont, en revanche, validé l'allègement des cotisations patronales. Ce qui a provoqué la colère de certains élus, notamment à gauche. Et l'incompréhension du gouvernement. Décryptage.

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La mesure en question. L'allégement des cotisations était censé mécaniquement faire augmenter les salaires modestes. L'article 1er du projet de loi prévoyait une baisse dégressive des cotisations des salariés touchant entre un Smic et 1,3 Smic. Un smicard devait ainsi voir son revenu net augmenter de 520 euros par an. La mesure, qui devait s'appliquer au 1er janvier 2015, aurait concerné 5,2 millions de salariés et 2,2 millions de fonctionnaires, pour un coût de 2,5 milliards d'euros.

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L'incompréhension. Contacté par Europe1, le ministre Christian Eckert dit trouver cette invalidation "un peu surprenante". C'est une décision "qui laisse perplexe", a renchérit le chef de file des députés socialistes, Bruno Le Roux. Et pour cause : les Sages ont, dans le même temps, validé toutes les exonérations patronales.  Le Conseil a ainsi validé les allégements de cotisations patronales sur les salaires inférieurs à 1,6 Smic, les exonérations de charges pour les indépendants ainsi que la suppression de la contribution sociale de solidarité des sociétés et contribution additionnelle (C3S), pour les petites entreprises.

Pour le député PS "frondeur" Christian Paul, "l'allègement des cotisations salariales était la seule partie de ce texte qui avait un effet positif sur le pouvoir d'achat des salariés". Les réactions se sont aussi multipliées sur twitter : "la Constitution de la Vème permettrait donc d'alléger les cotisations patronales et pas les cotisations salariales ??? Vivement la VIème !" a ainsi réagi Denis Baupin, député écologiste.

L'explication.  L'allègement des cotisations salariales a été jugée "contraire à la Constitution" par les Sages, notamment parce qu'il "méconnaît le principe d'égalité". Dans sa décision, le Conseil constitutionnel estime ainsi que la mesure institue "une différence de traitement, qui ne repose pas sur une différence de situation entre les assurés d'un même régime de sécurité sociale". En clair, avec cet allègement, tous les salariés auraient bénéficié des même droits, ceux de l'assurance maladie par exemple, mais n'auraient pas cotisé de la même façon pour y avoir accès. "Près d’un tiers" des salariés n'auraient plus rien cotisé, selon les Sages.

À l'inverse, les cotisations patronales ne bénéficient pas directement aux patrons. La C3S, par exemple, sert à financer le Fonds vieillesse. Ce n'est donc pas contraire au "principes d'égalité" si tous les patrons ne cotisent pas de la même manière.

Quelle solution ? Conclusion de Jean-Claude Mailly, contacté par Europe 1 : "il aurait été beaucoup plus simple d'augmenter le Smic plutôt que ce tour de passe-passe". Le gouvernement ne compte toutefois pas en rester là. Il reste ainsi "déterminé à améliorer le pouvoir d'achat des Français et proposera des mesures alternatives et de même ampleur" à l'automne, a fait savoir Michel Sapin, ministre des Finances, dans un communiqué.