Nucléaire : "Atomic Anne" a-t-elle mal dirigé Areva ?

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avec AFP , modifié à
RAPPORT - La Cour des comptes critique Anne Lauvergeon pour sa gestion du champion du nucléaire français entre 2001 et 2011.

La critique. Chargée de contrôler le bon usage de l’argent public, et donc des sociétés détenues majoritairement par l’Etat, la Cour des comptes s’est penchée sur le champion français du nucléaire, Areva. Et ses mots sont durs : dans un pré-rapport que s’est procuré le quotidien Les Echos, les Sages étrillent les dérives de l’entreprise quand elle était aux mains d'Anne Lauvergeon entre 2001 et 2011. Management, EPR, rachat d'Uramin, rémunération : les reproches sont nombreux.

CES DOSSIERS QUI FONT POLÉMIQUE

Le style Lauvergeon lui-même. En guise d’introduction, la Cour des comptes estime qu’un "certain nombre de difficultés du groupe" s’explique par "la forte personnalité de la présidente du directoire", une autorité d’autant plus verticale qu’Anne Lauvergeon a piloté la mutation de l’ex-Cogema en 2001 vers la structure actuelle, baptisée Areva. 

La réponse de l’intéressée. L'ex-dirigeante du groupe a contesté ce point mardi, estimant notamment qu'"une personnalité forte et dynamique était nécessaire pour réussir la création d'un tel groupe, développer le leader mondial du nucléaire, motiver les équipes". Et son avocat de poursuivre : sa présidence "a permis de constituer un groupe totalement intégré dans un secteur stratégique pour la France. (...) Areva est devenu le premier groupe nucléaire mondial".

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Et sa rémunération. Mais les Sages de la rue Cambon critiquent aussi la hausse de la rémunération d’"Atomic Anne" durant son deuxième mandat, estimant que "la découverte tardive de dossiers dont la mauvaise gestion coûte aujourd'hui très cher au groupe amène à critiquer une telle progression, fondée pour une large part sur des taux de réussite faussement précis".

Uramin, un rachat qui vire au naufrage. La Cour pointe également une "fuite en avant" et des "zones obscures" dans le dossier de l'acquisition du groupe minier canadien Uramin en 2007, qui a tourné depuis à la débâcle financière. L’entreprise a été payée trop chère, à quoi s’est ajoutée une chute des cours de l’uranium.

Une enquête préliminaire a donc été ouverte début avril sur les conditions de ce  rachat, suite à un signalement auprès du parquet national financier par la Cour des comptes. De manière générale, la Cour des comptes  se montre critique sur la stratégie d'expansion du groupe nucléaire et son modèle "intégré", qui consiste à matriser tout le secteur, de l'extraction d'uranium jusqu’à la construction des centrales.

La réponse d’Anne Lauvergeon. Elle se concentre sur le seul volet judiciaire du dossier Uramin : "les conclusions du rapport préliminaire de la Cour des comptes sont contestables et seront contestées. Je n'ai pas trouvé pour ma part les motifs qui ont pu justifier le signalement fait au procureur de la République", a répliqué au journal l'avocat d'Anne Lauvergeon, Jean-Pierre Versini-Campinchi.

Areva

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L’EPR, un projet qui coûte cher. La dernière charge de la Cour des comptes concerne, sans surprise, une "faible anticipation du risque" lors de la construction en Finlande d’un réacteur de nouvelle génération, baptisé EPR. Outre un retard qui dépasse déjà les cinq ans, Areva s’est montré bien trop optimiste dans ses coûts de construction. Résultat, ce projet-phare qui doit servir de vitrine pourrait faire perdre 3 milliards d’euros à Areva.

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