Les "Conti", un malaise qui persiste

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Thomas Morel et Julien Pearce
Depuis la fermeture de leur usine, ils accumulent les troubles psychosociaux.

Un pansement sur une plaie ouverte. La décision du conseil des prud'hommes sur la validité du plan social ne compensera pas les difficultés humaines que traversent les ex-ouvriers de Clairoix

Le contexte. C'est aujourd'hui que le conseil des Prud'hommes  de Compiègne doit se prononcer sur le sort de 680 salariés sur les 1.200 employés à l'usine Continental de Clairoix. Mis à la porte de leur fabrique de pneus à sa fermeture, en 2010, ils réclament aujourd'hui devant la justice l'annulation de leur licenciement, pour absence de motif économique.

Une demande à laquelle les conseillers prud'homaux pourraient accéder : le 14 février dernier, les  22 salariés protégés de Clairoix avaient déjà fait reconnaître le défaut de motif économique par le tribunal administratif d'Amiens. Mais pour les salariés de Continental, les indemnités supplémentaires qu'ils pourraient éventuellement gagner feront peu pour compenser les difficultés qu'ils rencontrent.

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Des troubles psychosociaux en hausse. Depuis la fermeture de l'usine, en effet, les troubles psychosociaux se multiplient chez les anciens "Conti". Dépressions, troubles du sommeil, tentatives de suicide : pour beaucoup d'entre eux, les démêlés avec Continental ont pris le pas sur la vie privée. Pierre Sommé, délégué syndical de l'usine et seul interlocuteur aujourd'hui des salariés licenciés, se souvient d'un de ses ex-collègues, venu lui remettre une lettre dans laquelle il annonçait son intention de se suicider devant l'usine. "On l'a poursuivi sur le parking pour lui confisquer sa corde, parce qu'il venait dire au revoir à tout le monde", raconte-t-il.

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256 divorces en trois ans. Si tous ne vont pas aussi loin, les dégâts sur la santé des "Conti" sont tout de même très importants. "Nous avons demandé une étude psychologique sur les anciens salariés de Clairoix. Le cabinet qui a réalisé l'étude nous a dit qu'il n'avait jamais vu ça : alcool, drogue, antidépresseurs, etc. Un cocktail détonnant", explique Pierre Sommé. De cette étude, un chiffre ressort particulièrement : 60 % des personnes interrogées ont avoué rencontrer des problèmes à la maison depuis la perte de leur emploi. 256 d'entre eux ont d'ailleurs divorcé, en trois ans.