Le taux de chômage au plus bas depuis 2012 : une "surprise", mais...

Le taux de chômage a baissé de 0,6% en un an.
Le taux de chômage a baissé de 0,6% en un an. © PHILIPPE HUGUEN / AFP
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Clément Lesaffre , modifié à
Le taux de chômage a reculé de 0,4 point à 9,6% au premier trimestre. Un niveau jamais vu depuis cinq ans qui doit toutefois être nuancé.

L’histoire retiendra que les derniers chiffres de l’emploi imputables à François Hollande auront été porteurs d’espoir. Au premier trimestre 2017, l’Insee a recensé 2,7 millions de chômeurs en métropole, 2,8 millions avec l’Outre-mer, soit des taux de chômage respectifs de 9,3% et 9,6%. Soit une baisse,  dans les deux cas, de 0,4 point en un trimestre et de 0,6 point en un an, une amplitude observée pour la dernière fois en 2007.

Pas un quinquennat pour rien. Résultat, le taux de chômage (calculé au sens du Bureau international du travail, avec une méthode différente de celle de Pôle emploi) retrouve son niveau de début 2012, quand François Hollande avait pris les commandes de la France. Un quinquennat pour rien ? "Sur le plan des statistiques, ce n’est pas faux", abonde Éric Heyer, économiste à l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE). "Mais ce serait oublier qu’en 2012, le chômage montait irrémédiablement. Aujourd’hui, il descend doucement."

Le fait que le taux de chômage n'augmente plus est déjà une bonne nouvelle. "Ces chiffres sont bons, solides. Surtout, l’ampleur est une surprise", analyse Hélène Baudchon, économiste chez BNP Paribas. "Au regard de la faible croissance  actuelle (0,3% au premier trimestre, ndlr), un recul du chômage de 0,4% est inattendu". La dynamique de baisse enclenchée en 2015 continue et semble même prête à accélérer. "Les mesures conjoncturelles des précédents gouvernements, notamment les allègements de charges, commencent à payer dans la durée", souligne l’économiste.

Baisse difficile à expliquer. "C’est une belle baisse du chômage liée à de mauvaises raisons", nuance Éric Heyer, économiste à l’OFCE. "Un quart seulement de la baisse peut être expliquée par le rebond du taux d’emploi (+0,1% en un an). Le reste provient de la baisse du taux d’activité de 0,3 point", précise-t-il. Autrement dit, certaines personnes auparavant recensées comme des chômeurs sont désormais dans une phase d’inactivité. "Soit elles ont été découragées dans la recherche d’emploi et sont sorties du radar, soit elles ont retrouvé une activité non prise en compte par les statistiques", détaille Éric Heyer. Ces personnes se retrouvent dans ce qu’on appelle le halo du chômage.

Les jeunes en profitent. Dans le détail, ce sont les jeunes qui sont le plus concernés par la forte baisse du chômage au premier trimestre. Près de 22% des actifs âgés de 15 à 24 ans sont toujours au chômage mais c’est un chiffre qui a baissé de 2,6 points en un an. "C’était la priorité de François Hollande et la politique de l’emploi menée pour eux porte ses fruits", estime Éric Heyer. Une bonne nouvelle qui demande encore confirmation.

"Pas à l’abri de contrecoups". Les chiffres du premier trimestre permettent-ils d’envisager l’avenir avec plus de sérénité ? Pas vraiment, répondent à l’unisson les deux économistes. "Tant que la croissance reste faible, on n’est pas à l’abri de contrecoups pour le chômage dans le futur", prévient Hélène Baudchon. Il n’est d’ailleurs pas impossible que l’Insee corrige les chiffres du premier trimestre lors de la prochaine publication. "Il ne faut pas s’attendre à des baisses de 0,4% tous les trimestres. Une baisse n’est jamais linéaire", complète l’économiste de BNP Paribas. Éric Heyer reste également prudent. "L’augmentation du halo du chômage conjuguée à la quasi-stagnation du taux d’emploi indiquent que la route vers une baisse durable du chômage n’est pas encore dégagée", affirme-t-il. "Ce n’est pas un aboutissement, il faut continuer les efforts."

Les réformes prennent du temps. L’arrivée au pouvoir d’Emmanuel Macron ne changera pas la donne dans l’immédiat. "Les réformes structurelles n’ont pas un effet immédiat. De plus, dans le cas de mesures allant vers plus de flexibilité, comme le souhaite Macron, il faut s’attendre à ce que le chômage se détériore dans un premier temps car le premier réflexe des entreprises est de licencier pour liquider leurs sureffectifs", explique Éric Heyer. Ce n’est qu’au bout de deux ans environ que la réforme du travail, que le Président entend promouvoir par ordonnances, finira par avoir des effets positifs.