L’inventeur de la "fast fashion" raccroche

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Hélène Favier avec AFP , modifié à
PORTRAIT - Amancio Ortega, fondateur de Zara, roi du prêt-à-porter, prend sa retraite mardi.

Son visage est quasi-inconnu du grand public. Pourtant, il a peu de femmes en Europe qu’Amancio Ortega n’a pas habillées au moins une fois. Mardi, le richissime patron de Zara, père de la "fast fashion", raccroche. A 75 ans, il a décidé de passer la main à son numéro deux, Pablo Isla, en attendant que sa fille Marta Ortega, 27 ans, puisse reprendre le flambeau.

L’homme le plus riche d’Espagne

Depuis 40 ans à la tête de son empire, Inditex (Industria de diseño textil), Amancio Ortega a conquis le monde grâce à sa marque étendard Zara. Fils de cheminot, il est l’homme le plus riche d'Espagne, selon le classement Forbes, avec une fortune estimée à 31 milliards de dollars, soit 22 milliards d'euros.

Belle réussite donc pour cet homme qui a quitté l’école à 13 ans, pour travailler comme vendeur dans un magasin de chemises de La Corogne. Quatre ans après cette première expérience, Amancio Ortega s’est lancé et a créé sa première entreprise, d'abord comme grossiste.

En 1975, il a ouvert sa première boutique Zara, toujours à La Corogne. Il en ouvrira une deuxième, une troisième, jusqu'à passer les frontières : le Portugal en 1988, les Etats-Unis en 1989, la France en 1990.

Aucune interview, très peu de photos

De quoi intriguer les médias, qui cherchent à le rencontrer: en vain. L'homme, marié deux fois et père de trois enfants, n'accorde aucune interview. Pendant des années, personne n'a d'ailleurs vraiment su à quoi il ressemblait. Amancio Ortega n'a accepté de poser pour une photo officielle qu'à l'occasion de l'entrée en Bourse du groupe en 2001.

"Je veux que dans la rue, seuls puissent me reconnaître ma famille, mes amis et les gens avec qui je travaille", confiait-il à Covadonga O'Shea, seule journaliste qui a réussi à l'approcher et a écrit sa biographie.

Aujourd’hui, son groupe Inditex compte plus de 5.000 boutiques dans 78 pays. Il a traversé la crise sans encombres et ne fait jamais de publicité. Inditex a même récemment vu son bénéfice grimper de 30% en 2010, à 1,7 milliard d'euros.

"La fash fashion"

Les raisons du succès ? Une rapidité époustouflante qui a pris de court ses concurrents : 40% des stocks sont renouvelés toutes les semaines, les arrivages débarquent en boutique tous les trois jours. C’est ce qui s’appelle la "fast fashion".

Le concept est simple comme le prouve la collection 2010 qui comptait plus de 30.000 modèles, chacun en faible quantité pour créer le manque.

Une mode éphémère qui a aussi ses détracteurs, la firme ayant été souvent accusée de copier les grands créateurs: "au début, il y avait des choses très ressemblantes, par exemple à des modèles de Chanel", rappelle la biographe, mais "aujourd'hui (Inditex) a 600 stylistes".

Il reste le premier actionnaire d'Inditex

Autre point de friction : les conditions de travail des employés. Début juillet une partie des salariés espagnols ont manifesté pour dénoncer leur précarité, affirmant que 80% des effectifs travaillent à temps partiel avec de bas salaires.

Mardi, pour l'assemblée d'actionnaires qui validera son départ, Amancio Ortega, fidèle à son habitude, ne sera pas là. L'homme, qui mange régulièrement à la cantine de l'entreprise, ne part pas à la retraite pour autant : il reste premier actionnaire d'Inditex, avec une part de 59,3%.