iQos, ou comment Philip Morris veut réinventer le tabac

L'iQos se présente en deux morceaux : d'un côté la partie électronique, qui ressemble à une sorte de gros stylo ; de l'autre, des recharges, qui sont en fait des mini-cigarettes.
L'iQos se présente en deux morceaux : d'un côté la partie électronique, qui ressemble à une sorte de gros stylo ; de l'autre, des recharges, qui sont en fait des mini-cigarettes. © PMI/Philip Morris S.A.
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L'iQos débarquera en France au mois de mai. Avec cette cigarette nouvelle génération, Philip Morris entend révolutionner le marché du tabac.

"Le moment viendra où nous pourrons commencer à envisager l'élimination des cigarettes". Vous ne rêvez pas, la phrase est bel et bien signée du patron de Philip Morris International (PMI) en personne, André Calantzopoulos, fin 2016 à Londres, lors du lancement du système à chauffer le tabac, baptisé iQos. Ce dispositif, évitant la combustion, est censé être moins nocif qu'une cigarette classique. Déjà commercialisé dans vingt pays, il sera lancé en mai à Paris et Nice, révélait vendredi Le Figaro.

À quoi cela ressemble-t-il ?

L'iQos se présente en deux morceaux : d'un côté la partie électronique, qui ressemble à une sorte de gros stylo ; de l'autre, des recharges, qui sont en fait des mini-cigarettes. Il est cependant difficile de connaitre la composition de ces fameux “sticks", baptisés “Heets” ou “Teeps” selon le pays de vente, et qui ont même parfois porté le nom de la marque Marlboro en début de commercialisation. La recette est bien évidemment gardée en vertu du secret industriel.

Ce qui est sûr, c'est qu'ils contiennent du vrai tabac. Pas de fumée ni de cendre, par contre. Le principe est en effet de glisser les recharges dans le tube électronique. Celui-ci va alors chauffer le tabac à 350 degrés contre 800 à 900 degrés ordinairement. Cela évite donc la combustion et réduit considérablement les risques pour la santé, selon Philip Morris. Le tout, enfin, est accompagné d’un chargeur dont le look rappelle celui de nos smartphones.

Le produit sera vendu exclusivement chez les buralistes, à 7 euros pour les sticks de tabac et près de 70 euros pour le dispositif électronique.

En quoi est-ce différent d'une cigarette électronique ?

"Les cigarettes électroniques ne remplaceront jamais la cigarette classique. Là, on entre dans une nouvelle ère", explique une source du côté de Philip Morris, contactée par Europe1.fr.

Contrairement à la cigarette électronique, l'iQos ne fonctionne pas avec du e-liquide et ne se décline pas en milliers de versions différentes. "Ça a le gout du tabac chaud. L'odeur est la même que celle d'une usine de tabac. Quant au design, rien à voir non plus avec la cigarette électronique. Là, on n'a pas une gameboy dans les mains. C'est fin, épuré et plus stylé", continue-t-on du côté de la marque.

Si Philip Morris promet "une nouvelle expérience", "insérer le 'Heet' et tirer dessus donne l'impression de tirer sur un vrai filtre", assure-t-on. Enfin, l'iQos a une fin, contrairement à la cigarette électronique. Si les recharges sont deux fois plus petites qu'une cigarette classique, le temps de consommation est quasiment le même : cinq minutes en moyenne. Mais surtout, l'iQos n'est pas absolument pas vendu comme un outil d'aide au sevrage. La signification du mot iQos, pour "I Quit Ordinary Smoking" ("J’ai arrêté le tabagisme ordinaire"), illustre parfaitement cet enjeu qui se profile derrière la commercialisation de ce nouveau produit du tabac.

Quels sont les enjeux pour Philip Morris ?

Un cigarettier qui entend, à terme, supprimer la cigarette, cela peut sembler bizarre, et pourtant. Philip Morris a beaucoup à gagner dans cette affaire. 

Car au-delà d'offrir une meilleure santé au consommateur, le but premier reste à l'évidence le profit. Pour le groupe, qui détient plus de 40 % du marché des cigarettes en France, il s'agit de se poser en pionnier sur ce nouveau marché et de se réinventer. La consommation de cigarettes est en effet en déclin ces dernières années. En 2015, selon l'OMS, un peu plus de 20 % de la population mondiale fumait contre 25 % en 2005 (l'évolution est d'ailleurs la même en France avec une baisse de 9% des cigarettes consommées par an entre 2010 et 2015). Les lois, elles, sont de plus en plus contraignantes, et les taxes de plus en plus nombreuses.

De plus, le business d’un cigarettier repose sur le caractère hautement addictif de ses produits. D'un point de vue marketing, l'iQos permet donc à PMI de garder sa clientèle sur la durée, d'autant que les consommateurs tendent à prendre conscience des risques pour leur santé. Et l’explosion du marché bio montre par exemple à quel point un changement dans la demande peut impliquer des transformations rapides et profondes dans un secteur économique pourtant bien établi. Le tabac pourrait ne pas déroger pas à la règle.

Est-ce que ça va marcher ?

Testé en 2004 à Nagoya, au Japon, et à Milan, iQos est désormais commercialisé dans vingt pays, et le sera dans 35 fin 2017. Dans le pays du Soleil-Levant, où la pub est autorisée, tout comme la vente en boutique, le dispositif a déjà conquis un million d'utilisateurs (sur 1,4 million dans le monde), soit 7 % de part de marché.

Dans d'autres pays, tels que l'Italie ou la Suisse, les résultats sont bien plus mitigés. Reste à savoir si la culture française est prête pour cette nouveauté, qui n'apporte pas encore tous les gages de confiance. De son côté, Philip Morris travaille plus que jamais à développer ce genre de produits. Une usine 100% dédiée aux RRP (Reduced-Risk Products) vient d'ailleurs d'ouvrir en Grèce. Selon les informations d'Europe1.fr, le groupe travaille sur une nouvelle cigarette contenant du tabac, au bout de laquelle se trouve un bout de charbon. Celui-ci, allumé avec un briquet, est sensé chauffer la cigarette. Et encore une fois, assure-t-on, diminuer les risques pour la santé du consommateur.