Guerre des prix : "C'est à l'Etat de dire 'stop'", selon Michel-Edouard Leclerc

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G.S. , modifié à
Pour le patron du groupe de distribution, invité d'Europe 1, l'Etat doit "prendre ses responsabilités".
INTERVIEW

"Il y a un seuil en dessous duquel les prix ne peuvent pas baisser sinon on ne peut pas rémunérer les producteurs. Je pense qu'on y est proche". Invité dimanche d'Ecosystème, l'émission d'économie d'Europe 1, Michel-Edouard Leclerc estime que les prix à la consommation arriveront bientôt à un "plus bas" en dessous duquel ils ne pourront pas descendre. "En tout cas je l'espère", poursuit le patron du Groupe Leclerc, qui appelle l'Etat à "prendre ses responsabilités" sur le sujet.

"La déflation est difficile à gérer. Les prix baissent partout en Europe. Plus on est petit, moins on a de marge de manœuvre. Et plus c'est compliqué à gérer", reconnaît "MEL". Interrogé sur la pression que subiraient les producteurs de la part des distributeurs pour faire baisser leurs prix, le dirigeant rejette l'accusation. "Le lobby de l'industrie agroalimentaire a réussi à faire passer ce message. Mais lorsque vous observez les prix moyens français, ils ne sont pas plus bas que les prix moyens européens. S'ils ont baissé dernièrement, c'est qu'ils étaient très élevés par rapport à la moyenne européenne. Il faut arrêter le cinéma", tacle Michel-Edouard Leclerc.

Entendu sur europe1 :
Nous sommes prêts à déroger aux règles du libéralisme

Le patron du Groupe Leclerc appelle l'Etat à prendre ses "responsabilités". Michel-Edouard Leclerc l'assure : "je ne suis pas ultralibéral". Et si les distributeurs se font la guerre pour baisser les prix, selon lui, c'est que la loi les y incite.

"Le concurrent de l'agriculteur breton qui fait du porc, ce n'est pas Leclerc ou Carrefour. C'est l'agriculteur allemand, le Hollandais. Que le distributeur récupère la bataille industrielle pour en faire profiter le consommateur, c'est la loi", analyse-t-il. "Moi je ne suis pas un ultralibéral. La régulation des prix par la concurrence, c'est ce que la loi a voulu. Leclerc, Carrefour, Intermarché, Système U... On doit se castagner. Si on s'entend sur les prix, on est condamnable. Peut-être qu'aujourd'hui il devrait y avoir un peu moins de concurrence sur certains produits agricoles. Qu'il faudrait laisser respirer certains producteurs. Je suis pour qu'il y ait des accords de filière pour protéger certains producteurs. Le problème ? L'Europe nous dit que ce n'est pas bien et moi je n'ai personne au gouvernement pour nous défendre", détaille le dirigeant. Et de conclure :

"Nous sommes prêts à déroger aux règles de la concurrence, du libéralisme. Et sous contrôle de l'Etat, on arrête de négocier les prix pour certains producteurs en difficulté, pendant trois ou quatre ans. Il faut reconduire de nouveaux modes de régulation. Chacun doit prendre ses responsabilités. L'Etat, s'il trouve les prix trop bas, c'est à lui de dire 'stop'".