Limiter les "golden hello", c'est possible ?

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Noémi Marois , modifié à
ÉCONOMIE - La loi française ne limite pas les primes lors de la prise de fonction d'un dirigeant.

Deux millions d'euros maintenant et deux autres millions promis pour janvier 2016, voilà le "golden hello", sorte de prime de bienvenue qu'Olivier Brandicourt va recevoir lors de sa prochaine prise de fonction à la tête de Sanofi. Le groupe pharmaceutique français a beau se justifier, les réactions d'indignation affluent. Sur Europe 1, Laurent Berger, patron de la CFDT, a notamment interpellé le gouvernement à ce sujet et il en parlera mercredi personnellement au Premier ministre, Manuel Valls. Stéphane Le Foll, porte-parole du gouvernement, a tapé du point sur la table : "il faut réaffirmer les règles", évoquant même l'idée que "ça pourrait être dans la loi". 

>> L'Etat peut-il agir contre cette pratique ? Ou bien est-ce aux organisations patronales d'intervenir ? 

Que dit la loi française sur les "golden hello" ? La législation française en l'état ne dit rien sur ces primes que touchent les patrons qui entrent en fonction. La loi ne limite que les rémunérations des dirigeants d'entreprises publiques. Seul le projet de loi Macron, pas encore définitivement adopté, s'immisce dans les entreprises privées en limitant les retraites-chapeaux. 

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Les organisations patronales n'y peuvent rien. Les organisations patronales ne peuvent pas davantage agir contre la pratique des "golden hello".

En effet, si le Code de bonne conduite du Medef et de l'Afep(association française des entreprises françaises), créé en 2003 et revu pour la dernière fois en 2013, parle bien des "indemnités de prise de fonctions" en leur posant des conditions, il ne fixe leur fixe pas de limites. Il précise juste qu'elles ne peuvent être accordées "qu'à un nouveau dirigeant mandataire social venant d'une société extérieure au groupe". Ce qui est bien le cas d'Olivier Brandicourt qui va quitter la direction de la branche pharmaceutique de Bayern. Le Code ajoute aussi que "le montant doit être rendu public". Ce qu'a fait Sanofi jeudi 19 février. 

Le Haut Comité de gouvernement des entreprises, installé en 2013 et qui s'auto-saisit en cas de non respect du Code, ne peut donc rien contre Sanofi. "Ils sont dans la légalité", explique un porte-parole du Medef interrogé par Europe 1. Et même si Sanofi était dans l'illégalité, le Haut Comité n'a pas de pouvoir de sanction. Il a juste un pouvoir dissuasif en interpellant publiquement les entreprises qui ne respectent pas le Code. En retour, l'entreprise se corrige ou bien se justifie. Ce qui en terme de communication auprès du grand public et des actionnaires n'est pas forcément une bonne chose. 

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Modifier le Code de bonne conduite des entreprises ? Cependant, le Code pourrait évoluer sur la question des "golden hello" : "Le Haut comité pourrait envisager de modifier les règles des indemnités de prise de fonction mais ce n'est pas prévu pour l'instant". Le seul scandale du "golden hello" d'Olivier Brandicourt ne peut en tout cas suffire, explique le porte-parole du Medef : "Le Code change s'il y a des abus à répétitions, le Haut comité peut alors repérer les failles du Code et les modifier". 

Le cas d'Olivier Brandicourt semble pour l'instant exceptionnel en France. Si la pratique des "golden hello" est répandue aux Etats-Unis, elle est peu courante dans l'hexagone où les "parachutes dorées" sont privilégiés. Dans son premier rapport d'activité publié en octobre 2014, les "golden hello" ne sont pas vus comme des déviations. Pour cause, depuis 2013, une seule entreprise française a versé "des indemnités de prise de fonction" et elle a respecté les conseils du Code.

Dans le passé, seuls deux autres "golden hello" ont fait parler d'eux en France mais à des niveaux bien plus modestes que celui proposé par Sanofi. En 2009, Jean-Pascal Beaufret avait perçu de Natixis une prime d'arrivée de 500.000 euros. La même année, Philippe Rucheton avait reçu de Dexia une somme similaire.  

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