Fiac : l’art ne connaît pas la crise

L'oeuvre "Whispers" (2004) de l'artiste israélien Nelly Agassy est exposée à la Fiac 2011
L'oeuvre "Whispers" (2004) de l'artiste israélien Nelly Agassy est exposée à la Fiac 2011 © FIAC HO/EPA/MAXPPP
  • Copié
Jean-Louis Dell'oro , modifié à
La Fiac ouvre ses portes jeudi à Paris et le marché de l’art contemporain reste serein malgré la crise.

La 38ème édition de la Foire internationale d’art contemporain (Fiac) de Paris, qui a ouvert ses portes ce jeudi jusqu’au 23 octobre au Grand Palais, ne sera vraisemblablement pas atteinte de sinistrose cette année. Malgré la crise financière, le marché de l’art contemporain ne s’est quasiment jamais aussi bien porté.

Au premier semestre 2011, il a retrouvé son niveau de début 2008 avec 497 millions d’euros de ventes en salles. Le niveau des invendus a même baissé à 37% entre juillet 2010 et juin 2011 et les professionnels ne prévoient pas de nuages à l’horizon. D’après l’indice de confiance dans le marché de l’art (AMCI) développé par ArtPrice, 66% des votants ont l’intention d’acheter des œuvres d’art.

Un marché plus massif et diversifié géographiquement

Comment expliquer un tel engouement ? La première raison est structurelle et sociologique. En quelques décennies, le milieu s’est professionnalisé et la demande massifiée. Nous sommes passés de 500.000 collectionneurs d’art après 1945 à près de 300 millions de consommateurs d’art aujourd’hui. Si l’attention du public est attirée par les grandes ventes à plusieurs millions d’euros, 79% des œuvres d’art sont vendues à moins de 10.000 euros.

Preuve de cette massification de l’offre et de la demande, il y a actuellement près d’un million d’artistes qui vivent de leur art. La clientèle a également changé et les galeristes ont vu débarquer une nouvelle génération de clients : des trentenaires et des quarantenaires.

Le dynamisme des acheteurs de la région Asie Sud-Pacifique qui, à eux seuls, absorbent la moitié du marché mondial, compense également aujourd’hui la fébrilité des acheteurs américains et surtout européens. La Chine est ainsi devenue la première place au monde.

Yann Bombart est le gérant des quatre galeries "Envie d’art" : trois à Paris et une à Londres. Ses galeries, qui s’adressent surtout aux amateurs d’œuvres d’art à moins de 10.000 euros, ont effectivement connu un coup d’arrêt en 2008-2009 au plus fort de la crise. Mais depuis, son activité a décollé de 10% en 2010 et 15% en 2011. "On s’est diversifié géographiquement pour être présent dans d’autres pays, notamment via les foires. Cela lisse les effets de conjoncture", explique-t-il.

Un placement plaisir

La deuxième raison du succès de l’art contemporain, c’est qu’il est devenu un placement comme un autre, le côté sentimental en plus. "En entrant à un certain prix sur une œuvre, vous avez la quasi assurance de la revendre au moins au même prix, même en temps de crise", souligne Thierry Ehrmann, fondateur d’ArtPrice, le numéro un mondial de l’information sur le marché de l’art. "La prime de risque semble moindre que sur les actions", renchérit celui qui est aussi un artiste plasticien.

Après une chute de 38% pendant la première partie de la crise, le marché de l’art a fortement rebondi affichant une performance de +27% entre juillet 2010 et juin 2011. De leur côté, les actions sont en chute libre et, dans de nombreux pays, l’immobilier n’est plus une valeur refuge. Face à la complexité des instruments financiers, c’est aussi un retour au concret. "Une œuvre, une sculpture, on l’a dans les mains", confirme Thierry Ehrmann.

Le ralentissement économique depuis 2008 a en revanche poussé les vendeurs à rationaliser leur activité. "Depuis la crise, je n’ai pas baissé les prix mais c’est vrai que le volume a un peu diminué. Je vais un peu plus me concentrer sur certains artistes", confie ainsi Bénédicte Chauliac, responsable de la galerie Brissot à Paris. Dans l’art contemporain aussi, certaines valeurs sont plus sûres que d’autres. Reste à savoir si cela ne bloquera pas l’émergence de nouveaux talents.