Entreprises cherchent repreneurs désespérément

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G.V. avec Anne-Laure Jumet , modifié à
EXCLU E1 - Faute d’anticipation, une grosse PME sur cinq ne trouve pas de repreneur quand son dirigeant passe la main.
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Une entreprise qui réussit est censée survivre à ses fondateurs. Sauf lorsqu’une telle transmission n’a pas été anticipée, ce qui arrive plus souvent qu’on ne le pense : une grosse PME sur cinq ne trouve pas de repreneur quand son dirigeant cherche à passer la main, selon une enquête menée par la banque publique d'investissement (BPI) qu'Europe 1 révèle en exclusivité mercredi.

Des entreprises aux patrons vieillissants. L’enquête de la BPI porte plus particulièrement sur les entreprises de taille intermédiaire (ETI), c’est-à-dire les grosses PME. Des entreprises dont les dirigeants sont souvent âgés : plus d’un dirigeant sur trois à plus de 60 ans et près d’un sur cinq a plus de 65 ans. Mais tous n’anticipent pas assez leur départ à la retraite et prennent le risque de ne pas trouver de repreneur.

"Un vrai tabou psychologique par rapport à la cession". "Un entrepreneur, notamment qui a pu être autodidacte et qui a créé son entreprise, a parfois des difficultés à trouver un  repreneur et, n’a pas forcément des enfants qui sont capables de reprendre cette entreprise. Deuxième difficulté, il a un affectif très particulier par rapport à son entreprise : en général, son entreprise, c’est sa vie et le simple fait de réfléchir à la céder ou à la transmettre est synonyme pour lui de retraite", détaille Bertrand Finet, directeur exécutif en charge des ETI à la BPI, avant d’ajouter : "il y a un vrai tabou psychologique par rapport à la cession".

"Une transmission, cela se prépare". Un blocage mental qui empêche de nombreux chefs d’entreprises à préparer la transmission de l’entreprise, alors que ce type d’opération ne s’improvise pas à la dernière minute : il faut en général une dizaine d’années pour réussir une transition en douceur.

"Une transmission, cela se prépare", confirme Bertrand Finet, "il faudrait que tout chef d’entreprise ait le réflexe du check up de transmission, comme il existe un check up médical, à partir du moment où il dépasse la cinquantaine et qu’il réfléchisse qui est susceptible au sein de son comité de direction, de reprendre un jour les rennes de l’entreprise. Ce n’est pas parce que vous faites le check up que vous êtes malade le lendemain, il faut briser ce tabou et en parler plutôt tôt que tard, c’est notre recommandation".

"C’est déjà dans mon esprit alors que je viens à peine d’être nommé". Chez NGE, société spécialiste des travaux publics, la transmission est érigée en culture d’entreprise. "Dès la reprise du groupe en 2001, elle était déjà dans la tête de celui qui aujourd’hui est en train de me transmettre l’entreprise", témoigne Antoine Metzger, qui a repris il y a un an et demi l'entreprise dans laquelle il était salarié. Et ce dernier a décidé de faire de même : "c’est déjà dans mon esprit alors que je viens à peine d’être nommé président il y a un an et demi. Il y a une volonté de tout un chacun de pérenniser l’entreprise, donc forcément on se projette dans un temps long".

"Ma première décision en tant que président était de lancer une vaste opération d’ouverture du capital aux salariés, opération que nous avons lancée en juillet 2014 et que nous avons bouclée en juin 2015. On a réussi à réunir 3.800 salariés qui ont investi leurs économies, 56% de nos salariés nous ont fait confiance et ont décidé d’investir dans le groupe", détaille-t-il. Une mesure qui présente un avantage : "l’idée sur le long terme, c’est d’avoir les salariés à nos côtés pour garder le contrôle, l’état d’esprit, les valeurs humaines de l’entreprise. Avec eux, on est sûr que les décisions qu’ils vont prendre privilégient le bien-être des salariés et la pérennité de l’entreprise avant tout autre considération". Des salariés actionnaires qui seront d’autant plus attentifs au profil du futur repreneur et parmi lesquels se trouve, pourquoi pas, le futur dirigeant de l'entreprise.