Dette grecque : le compte à rebours a commencé

09.05.Grece Tsipras parlement Athenes.LOUISA GOULIAMAKI  AFP.1280.640
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COMPTE A REBOURS - Athènes a réalisé une bonne partie des réformes demandées et attend un nouveau versement des Européens, mais aussi et surtout un débat sur sa dette. 

Le calendrier d'Alexis Tsipras est pour le moins chargé. Sa réforme des retraites et du système fiscal à peine adoptée dans la nuit de dimanche à lundi, le Premier ministre est passé à un dossier tout aussi périlleux : les négociations avec les créanciers de la Grèce. Les ministres des Finances de la zone euro se sont réunis lundi à Bruxelles pour se pencher sur le cas grec et tenter de répondre à la question suivante : Athènes a-t-elle respecté ses obligations ? En fonction de la réponse, la Grèce recevrait une nouvelle tranche du plan d'aide dont elle a rapidement besoin.

Où en est la Grèce aujourd’hui ? Six ans après avoir frôlé la banqueroute, la Grèce n’est toujours pas sortie de la crise. Elle détient toujours le record européen en termes de chômage, 25% de la population active selon Eurostat, mais aussi en termes d’endettement public : sa dette représente près de 180% de son PIB, alors que la moyenne européenne est de 85% du PIB. Bref, la Grèce reste convalescente et la situation ne devrait pas s’arranger à court terme : après une croissance estimée à -0,2% en 2015, la Commission européenne table sur  -0,3% en 2016.

La Grèce est donc toujours en plein marasme, alors qu’elle enchaîne pourtant les réformes de normalisation vis-à-vis des standards européens. Mais le pays part de tellement loin que ces changements n’ont pour l’instant pas permis de relancer l’économie, quand ils n’ont pas tendance à la ralentir davantage. Et pendant ce temps-là, elle doit continuer à rembourser ses dettes. A court d’argent à l’été 2015, Athènes a donc dû demander l’aide des Européens pour bénéficier d’un troisième plan d’aide : 85 milliards d’euros contre une nouvelle série de réformes.

Pourquoi attend-elle une réponse rapide des Européens ? Athènes estime avoir fait ce qui lui était demandé et demande donc les contreparties prévues : le versement d’une partie des 85 milliards d’euros prévus. Cet argent, la Grèce en a besoin rapidement puisqu’elle doit rembourser environ 2,2 milliards d’euros à la Banque centrale européenne (BCE) le 20 juillet. Sans oublier les 14,5 milliards d'euros dus au Fonds monétaire international (FMI).

Sauf que ses interlocuteurs ne sont, eux, pas unanimes sur les avancées de la Grèce et notamment par rapport à un objectif chiffré : atteindre un excédent primaire, c’est-à-dire avant paiement des intérêts de la dette, de 3,5% en 2018. Certains créanciers doutent que la Grèce y arrive et attendent de nouvelles réformes pour débloquer l’argent promis. En revanche, d’autres estiment que le plus gros a été fait, à l’image de la France : "les Grecs ont fait tous les efforts que nous leur avons demandés de faire et nul ne peut mettre en doute à la fois la sincérité et la capacité de ce gouvernement à mettre en oeuvre des réformes", a souligné lundi le ministre français des Finances, Michel Sapin.

Pourquoi le dossier grec prend-il autant de temps ? Si les Européens ont le plus grand mal à valider les dernières réformes menées en Grèce, ce n’est pas seulement à cause d’une difficulté d’évaluation : c’est aussi une manière de repousser l’étape d’après.

Car le prochain sujet de discussion à propos de la Grèce est bien plus sensible : l’effacement ou le rééchelonnement de la dette. Depuis son arrivée au pouvoir, Alexis Tsipras répète que son pays ne pourra jamais se redresser sans qu’une partie de sa dette soit effacée, un point de vue que partage désormais le FMI. En face, ses créanciers lui rétorquent que sa dette a déjà été à moitié effacée en 2012, que ses taux d’intérêt ont déjà été revus à la baisse, et que ce n’est pas à eux de payer pour les erreurs passées des Grecs. L’Allemagne, qui a le plus prêté à la Grèce depuis 2010, est notamment sur cette ligne.

Les débats entre Européens s’annoncent donc aussi vifs que longs, bien que certaines lignes commencent à bouger. En Allemagne, où le vice-chancelier allemand est favorable à un allègement de dette, mais aussi en Europe, où le président de la zone euro veut un accord sur la dette dans les deux semaines. En attendant, la Grèce a déjà marqué un point en mettant le sujet sur la table.