DGF : quel est donc ce cadeau d'un milliard d’euros que Hollande fait aux communes ?

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DECRYPTAGE - François Hollande a divisé par deux les économies que les maires devaient faire en 2017.

Finalement, la bronca tant redoutée fût moins bruyante. Redoutant un accueil glacial lors de son passage au congrès de l'Association des maires de France (AMF), François Hollande est arrivé jeudi avec un cadeau pour apaiser des élus locaux très remontés contre les économies qui leur sont demandées. Ces derniers espéraient la suspension du plan d'économies qui les vise, le président de la République a en partie répondu à leurs attentes : il a annoncé une diminution "de moitié de l'effort demandé aux communes" en 2017 et la reconduction du fonds d'investissement d'urgence dégagé pour 2016, qui sera "porté à 1,2 milliard d'euros". De quoi parle-t-on ? Quelles sont les économies finalement demandées aux communes ? Europe 1 traduit la comptabilité publique en langage courant.

Qu’est-ce que la dotation globale de fonctionnement (DGF) ? Ce terme administratif désigne l’argent que l’Etat verse aux différentes collectivités territoriales : les communes, les départements, les régions, ainsi que les établissements publics de coopération intercommunale.

Pourquoi l’Etat verse-t-il cet argent ? Décentralisation oblige, l’Etat délègue un certain nombre de missions aux collectivités, il est donc normal qu’il contribue à leur financement. En outre, la DGF sert également à réduire les inégalités entre communes, départements et régions : les zones les plus riches reçoivent moins d’argent que les zones qui concentrent les difficultés ou sont situées dans des zones atypiques, telles que les communes de haute montagne. Mais cet objectif est de moins en moins atteint, si bien que François Hollande a annoncé jeudi une réforme du dispositif.

Quelle part revient aux communes ? Depuis 2005, la répartition de cette manne est stable : le bloc communal (communes et établissements publics de coopération intercommunale) reçoit 57%, les départements 30% et les régions 13%.

Pourquoi l’Etat réduit-il cette enveloppe ? Parce qu’il dépense plus d’argent qu’il n’en gagne depuis des décennies, un déficit chronique qui n’a cessé de creuser la dette. Pour éviter que la France ne franchisse un point de non-retour, les gouvernements successifs tentent donc, depuis peu, de limiter la hausse des dépenses. Les collectivités territoriales doivent, elles aussi, contribuer à l’effort mais ces dernières ont au contraire eu tendance à multiplier les dépenses : leurs effectifs ne cessent d’augmenter, malgré les réformes censées inverser la tendance, telle que la création d’intercommunalité. L’Etat a donc décidé de les y contraindre par la manière forte, en réduisant l’enveloppe qu’il leur verse chaque année.

Quel était l’effort prévu pour les communes ? Le gouvernement a décidé de réaliser 50 milliards d’euros d’économies sur la période 2015-2017, un effort auquel les collectivités territoriales doivent contribuer à hauteur de 11 milliards. Soit une baisse de la DGF de 3,67 milliards d’euros par an. Premier bénéficiaire de la DGF, le bloc communal est donc aussi celui qui doit faire le plus d’économies : 2,071 milliard d’euros par an.

Pourquoi François Hollande a-t-il relâché les cordons de la bourse ? Population en difficulté, finances mal tenues ou refus d’anticiper ce coup de rabot : de nombreuses communes sont aujourd’hui en difficultés financières. Le chef de l'État a reconnu que la situation des communes était "tendue et même insupportable pour certaines" d'entre elles. Le contexte économique favorable et le retour timide de la croissance permettent aussi de faire un geste. "J'ai considéré, dans l'état actuel de nos finances publiques, que ce que je pouvais faire était ce que je pouvais honorer", a-t-il ajouté. En outre, l’approche d’échéances électorales peut aussi expliquer ce geste présidentiel.

Combien devront finalement économiser les communes ? François Hollande a annoncé "une diminution de moitié de l'effort financier demandé aux communes et aux intercommunalités en 2017". En clair, elles devaient économiser 2,071 milliards, ce ne sera finalement qu’un milliard. Dit autrement, la DGF que leur verse l’Etat ne baissera que de 5% entre 2017 et 2017, alors qu’elle devait initialement reculer de 10% environ.

Si on y ajoute le bonus de 1,2 milliard, il n’y a plus aucun effort ? En plus de revoir à la baisse l’effort demandé aux communes, François Hollande a promis aux maires un fonds d'investissement d'urgence doté de 1,2 milliards d’euros. Les communes ne devant économiser plus qu’un milliard par ailleurs, cela ressemble donc à une annulation totale des économies prévues. Ce qui n’est qu’en partie vrai : à la différence de la DGF, les communes ne pourront pas faire ce qu’elles veulent avec ce fonds d'investissement d'urgence. Cet argent ne pourra servir qu’à des projets qui peuvent relancer l’activité et non à embaucher des fonctionnaires territoriaux. C’est donc une manière d'envoyer un message aux maires et présidents d'intercommunalités sur la maîtrise de la masse salariale, tout en contribuant à la relance de l'investissement local, qui a chuté de 25% en deux ans selon l'AMF.