Déficits : l’étonnante indulgence de l'UE

Le "programme de stabilité" a beau être largement inférieure aux exigences de l'Union européenne, Bruxelles ne prévoit ni sanction, ni pression.
Le "programme de stabilité" a beau être largement inférieure aux exigences de l'Union européenne, Bruxelles ne prévoit ni sanction, ni pression. © REUTERS
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avec Isabelle Ory , modifié à
Bruxelles et l'Allemagne se montrent plutôt clémentes sur la stratégie française. Pourtant…

Un vent de tolérance envers la France souffle en Europe, au sujet du "programme de stabilité" présenté mercredi. Cette feuille de route gouvernementale, destinée à corriger certaines prévisions sur la croissance, le déficit et la dette, a beau être largement inférieure aux exigences de l'Union européenne, Bruxelles ne prévoit ni sanction, ni pression. Même l'Allemagne s'est montrée clémente dans sa réaction. Comment l'expliquer ? Éléments de réponse.

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Un plan pas la hauteur… Alors que la Commission exige une réduction du déficit à 3,5% du PIB en 2013, Bercy prévoit de ne le ramener qu'à 3,7%. Alors que Bruxelles demande que ce même déficit soit "nettement en dessous" de 3% en 2014, Paris table sur 2,9%. "Ce n'est pas nettement en dessous ça. La Commission a prévenu la France : les marchés risquent de sanctionner", met en garde un spécialiste de l'Union européenne, contacté par Europe1.

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… Mais des réactions indulgentes. Malgré le peu d'ambition de Paris, Bruxelles ne sévira pas. Selon les informations d'Europe1, la Commission européenne va se contenter "d'encourager" les Français à se mettre sur la bonne voie, sans leur taper dessus. Certains se montrent même pleins de louange pour la France et veulent la voir plus présente sur la scène européenne. "Elle est sérieuse […] veut réduire le fardeau pour les PME, c'est un message absolument positif pour nous", a ainsi estimé jeudi sur Europe1 Antonio Tajani, Vice-président de la Commission européenne, chargé de l'industrie et de entrepreneuriat. " J'ai toujours une image positive de la France, même si elle a des problèmes. […] Il faut suivre la France avec amitié, la soutenir. Elle est cruciale pour gagner ce défi contre la crise […] Elle doit marcher : si elle ne bouge pas, l'Europe ne bouge pas", a-t-il poursuivi. S'il estime qu'elle doit encore "changer des choses", ce représentant de l'Union européenne se dit même "personnellement" prêt à accorder un délai supplémentaire à la France dans sa lutte contre les déficits.

>> Pour réécouter l'interview intégrale d'Antonio Tajani, c'est ici :

Merkel "accompagne avec bienveillance". Même l'Allemagne, fer de lance de la lutte contre le déficit des États de l'Union, a épargné le "programme de stabilité de Bercy", par la voix de la chancelière en personne. "Nous souhaitons le succès de la France, car la France est importante pour la zone euro dans son ensemble, et nous accompagnerons avec bienveillance les réformes engagées ou en cours", a réagi Angela Merkel mercredi, depuis Berlin.

Les raisons de la tolérance. Selon un spécialiste interrogé par Europe1, la France dispose d'un "statut un peu à part". Deuxième économie de la zone euro, son entrée éventuelle en récession pourrait se propager à tous ses voisins. Bruxelles va donc seulement insister pour que Paris résolve le problème de son déficit structurel, c'est-à-dire corrigé des effets de la conjoncture, qui pèse directement sur la croissance.  En clair, la récession de la France fait davantage peur à l'Europe qu'une ou deux décimales en plus pour réduire le déficit.

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