Normandie : la fronde des éleveurs s'étend

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Des centaines d'éleveurs en colère contre l'effondrement des prix de vente de leurs productions bloquaient lundi les entrées de Caen. © AFP
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A.W. avec AFP , modifié à
Les éleveurs normands dénoncent la faiblesse des prix de leurs productions. Stéphane Le Foll a accepté de les recevoir jeudi à Paris mais les éleveurs souhaitent que le ministre de l'Agriculture se déplace.

"Les gens sont très remontés, il n'est pas question que nous on bouge". Des centaines d'éleveurs en colère contre l'effondrement des prix de vente de leurs productions bloquaient lundi les entrées de Caen avec leurs tracteurs pour réclamer la venue du ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll. Ce dernier a proposé aux éleveurs normands de les recevoir jeudi à Paris mais les éleveurs refusent de lever leurs barrages.

25 tracteurs mobilisés. Les éleveurs exigent une visite du ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, avant de lever les blocages, selon le président de la FDSEA du Calvados, Jean-Yves Heurtin. "Nous avons environ 25 tracteurs à chacun des points de blocage", a déclaré Jean-Yves Heurtin. "Il faut que Stéphane Le Foll vienne traîner ses bottes dans les exploitations agricoles (...) et fasse respecter les accords du 17 juin" avec la grande distribution, a-t-il lancé. Les quatre principaux accès au périphérique de Caen sont bloqués, en direction de Rennes, Paris, Cherbourg et Falaise.

"On veut un ministre sur le terrain". Pour calmer le jeu, Stéphane Le Foll a proposé aux éleveurs normands de les recevoir jeudi à Paris. D'ici là, le ministre aura prix connaissance du rapport du médiateur sur les prix des productions agricoles, qu'il avait lui-même désigné. Ce rapport doit lui être remis mercredi. Mais les éleveurs continuent de demander la venue sur place du ministre. "On reste sur notre position, on veut un ministre de terrain" qui réunisse tous les acteurs de la filière, producteurs, industriels des abattoirs et des laiteries et centrales d'achat des distributeurs, a déclaré Samuel Bidert, responsable des Jeunes Agriculteurs (JA).

L'A13 fermée aux poids lourds en direction de Caen. En raison du blocage du périphérique de Caen, les pouvoirs publics ont ordonné lundi en début d'après-midi la fermeture aux poids lourds de l'autoroute A13 Paris-Caen. Dans un arrêté, le préfet de la zone de défense et de sécurité Ouest précise que l'artère est fermée en direction de Caen aux poids lourds de plus de 7,5 tonnes venant de Paris et Rouen dès l'échangeur de Bourg-Achard, à plus de 100 km à l'est de Caen. Les routiers sont détournés sur l'autoroute A28, en direction du Mans. Les camions en provenance du Havre par les ponts de Normandie et de Tancarville doivent également prendre la direction de Paris puis du Mans afin de contourner Caen. La circulation est interdite aussi aux poids lourds sur l'A88 et la N158 en provenance d'Argentan. En provenance d'Evreux, la D613 est quant à elle fermée depuis Bernay jusqu'à Caen.

Les routes d'accès au Mont Saint-Michel bloquées. Les deux routes principales d'accès au Mont Saint-Michel, l'un des sites touristiques les plus visités de France, ont été bloquées lundi après-midi par des éleveurs en colère, a-t-on appris auprès du syndicat mixte du Mont. Les voies principales menant au parking du Mont Saint-Michel, venant d'Avranches et de Pontorson (Manche), sont bloquées par les agriculteurs qui laissent ressortir les visiteurs du parking, selon la même source.

"On est plus que déterminés". "Aujourd’hui on est vraiment à bout. Il y en a plus que marre de se faire balader comme c’est le cas depuis des années", déplore Charles-Henri Lebrun, secrétaire général des jeunes agriculteurs du Calvados, sur Europe 1. "Les politiques couvrent les pratiques de certains transformateurs et de certains distributeurs. Aujourd’hui, les gars (agriculteurs, ndlr) sont au bord du gouffre, ils n’ont plus rien à perdre. Pour certains, ils ne vont pas réussir à passer l’été. S’il faut que l’on reste plusieurs jours pour que le ministre vienne et prenne des engagements devant nous, on restera plusieurs jours. On est plus que déterminés, on en a marre d’être autour de tables rondes et de discuter, c’est de la parlotte. Aujourd’hui, on veut des actes. Maintenant". 

Des actions depuis dimanche. Les actions des agriculteurs du Calvados ont commencé dimanche après-midi avec des déversements de gravats et de déchets devant plusieurs cibles symboliques de la filière, comme des abattoirs et des grandes surfaces, ainsi qu'avec des opérations escargot sur les routes. Une agence du Crédit Agricole à Bretteville-sur-Odon, dans la banlieue de Caen, a encore été prise pour cible pendant la nuit. 

Selon Jean-Yves Heurtin, entre 20 et 30 points ont été pris pour cible, les tracteurs déchargeant leur benne devant les accès. "La grande distribution a eu sa part, ainsi que les intermédiaires et les fournisseurs de la restauration, qui s'approvisionnent encore en matière étrangère", a-t-il dit.

"Personne ne tient sa parole". Invité dimanche matin d’Europe 1, Jean-Pierre Fleury, président de la Fédération nationale bovine, s'est dit peu surpris par cette mobilisation des éleveurs : "comme personne ne tient sa parole, il ne faudra pas s’étonner des drames qui pourraient arriver. On en est les premiers désolés. Mais il faut craindre le pire."