Bruxelles enquête sur le rachat d'Alstom par GE

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FUSION - La vente du pôle énergie d'Alstom pourrait conférer à General Electric un poids excessif susceptible de mettre fin à toute concurrence dans ce secteur.

Le démantèlement du Français Alstom, dont la branche énergie a été achetée par l'Américain General Electic (GE), ressemble de plus en plus à une feuilleton. Après les enchères menées par le gouvernement pour faire grimper les prix, le débat sur le maintien de l'emploi et les craintes pour la souveraineté technologique de la France, c'est au tour de la Commission européenne de proposer un nouvel épisode en ouvrant lundi une enquête approfondie sur ce rachat. Bruxelles redoute que cette opération mette à mal la concurrence dans le secteur de l'énergie.

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Alstom General Electric

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GE, nouveau propriétaire de la branche Energie d'Alstom. Alstom n'est pas une entreprise tout à fait comme les autres : ce poids lourd de l’industrie française fabrique à la fois du matériel de transport (métro, trains, tramways), mais aussi tout ce qui a trait à l'énergie : des centrales électriques thermiques, des turbines, des outils de gestion des réseaux électriques, etc. Un profil très diversifié que son Pdg, Patrick Kron, jugeait insatisfaisant.

Ce dernier a donc décidé de mettre en vente la branche énergie du groupe pour se concentrer sur les transports, une décision très contestée : d'abord car cela revient à vendre 70% de l'entreprise, ensuite parce que cette branche d'Alstom fournit en pièces toutes les centrales nucléaires françaises. Au terme de très longue négociations, c'est finalement GE a qui a remporté la mise en novembre 2014 en mettant 12,35 milliards d'euros sur la table.

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Bruxelles redoute la naissance d'un oligopole. Après avoir convaincu les actionnaires et l'Etat français, GE pensait avoir fait le plus gros et ne redoutait qu'une chose : que la Commission européenne ne s'empare du dossier. Une crainte qui s'est concrétisé lundi, avec l'ouverture d'une enquête approfondie. Car Bruxelles redoute que ce rachat ne mette fin à toute concurrence dans le secteur de l'énergie et favorise l'apparition d'un oligopole : en clair, il ne resterait pas assez d'entreprises pour pouvoir entretenir la concurrence, ce qui se traduirait par de possibles ententes, une hausse des prix et un ralentissement de l'innovation.

Le marché des turbines à gaz de haute puissance, qui équipent les centrales électriques, inquiète particulièrement la Commission européenne : il n'existe aujourd'hui que quatre concurrents sur ce secteur et, avec le rachat d'Alstom, il ne seront bientôt plus que trois. Résultat, GE occupe théoriquement environ 50% du marché mondial et autant en Europe. Ce qui peut faire craindre le pire : "la technologie est cruciale pour permettre à l'Europe d'honorer ses engagements environnementaux et elle le restera à l'avenir. Il est dès lors essentiel de maintenir la concurrence", a souligné la commissaire européenne en charge de ces dossiers, Margrethe Vestager.

En revanche, la Commission ne voit pas à ce stade de problèmes "pour ce qui est des équipements de production d'énergie destinés aux centrales à charbon et aux centrales nucléaires, éoliennes et hydroélectriques, ni pour les équipements de transport d'électricité". L'ouverture d'une enquête approfondie ne préjuge pas de l'issue de la procédure. La Commission, qui coopère sur ce dossier avec le ministère de la justice américain, a désormais jusqu'au 8 juillet pour arrêter une décision.

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