ArcelorMittal : à quoi joue Montebourg ?

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Avec sa sortie au vitriol, le ministre se révèle plus politique qu’économiste mais il n’improvise pas.

Devant le refus du groupe ArcelorMittal de négocier la revente du site de sidérurgie de Florange, Arnaud Montebourg a décidé de hausser le ton, allant jusqu’à affirmer, lundi matin dans Les Echos, que "le problème des hauts fourneaux de Florange, ce n'est pas les hauts fourneaux de Florange, c'est Mittal".

Et le ministre d’envisager un "projet de nationalisation transitoire" pour reprendre la main et trouver lui-même un repreneur. Sauf que les faits sont têtus : malgré la "mauvaise volonté" d’ArcelorMittal, l’avenir du site de Florange s’écrit vraiment en pointillés. Arnaud Montebourg exagère-t-il ?

Un calcul plus politique qu’économique

Depuis 2008, la demande mondiale d’acier a chuté de 25%, rappelle Axel de Tarlé dans son Zoom Eco. Hormis les activités de traitement en aval de l’acier produit, les hauts fourneaux de Florange n’intéressent donc personne. Avec cette violente diatribe, Arnaud Montebourg fait donc avant tout de la politique :

Même si l’Etat en avait les moyens, une nationalisation est donc difficilement envisageable. "Dans une économie mondialisée et en voie de numérisation, une telle décision ne changerait rien au fait que le marché de l’acier se rétracte du fait d’une croissance chinoise plus faible et d’un marché automobile européen en berne", renchérit lundi le spécialiste de l’industrie, Usine Nouvelle.

Montebourg ou la fausse impression d’improviser

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 En déclarant que "nous ne voulons plus de Lakshmi Mittal en France parce qu'ils n'ont pas respecté la France", Arnaud Montebourg a-t-il donc dérapé ? Pas vraiment car cette sortie est tout sauf improvisée : le choix des mots a son importance, surtout en politique, et le ministre le sait.

Ses piques verbales suivent en effet une feuille de route prévue à l’avance. Lorsque, le 26 septembre, le ministre du Redressement productif tacle sévèrement le constructeur automobile coréen Hyundai, accusé d’exploiter ses ouvriers, c’est pour lancer sa séquence politique vantant le "fabriqué en France". On le retrouvera ainsi la semaine suivante au volant d’une Renault électrique, la Zoé, puis 10 jours plus tard en Une de magazine du Parisien, vêtu d’une marinière.
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"Ma méthode, c'est la négociation franche"

Rebelote le 6 octobre lorsqu’il annonce à Peugeot-Citroën qu’il va rediscuter le plan de restructuration du groupe automobile. L’objectif est là encore de montrer que le politique est à la manœuvre et que les entreprises ne peuvent l’ignorer. Et la méthode est souvent la même : aller volontairement au clash pour créer un rapport de force et le rendre public.
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"Ma méthode, c'est la négociation franche", reconnaissait-il fin juillet dans les colonnes du Journal du Dimanche. S’il l’emporte, Arnaud Montebourg peut ainsi revendiquer un certain panache, s’il échoue, on ne peut l’accuser de n’avoir rien fait. Dans tous les cas, il gagne du temps pour mieux négocier, voire arracher quelques concessions. "Nous n'avons pas été mis au pouvoir par les Français pour faire des cocottes en papier", rappelait-t-il d’ailleurs début octobre sur Europe 1. La méthode Montebourg est donc rôdée, reste à en étudier les effets concrets.