Aide alimentaire : d’où vient ce "PEAD" ?

En 2012, 130 millions de repas ne pourraient pas être distribués en France.
En 2012, 130 millions de repas ne pourraient pas être distribués en France. © MAX PPP
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Plana Radenovic , modifié à
Bruxelles envisage de réduire de 75% le budget de ce programme destiné aux plus démunis.

PEAD pour "programme européen d'aide aux plus démunis"... derrière cet acronyme barbare aujourd'hui à la Une de l'actualité, se trouve un programme qui bénéficie à plus de 13 millions de personnes dans 19 des 27 Etats européens. Il est actuellement financé via la redistribution de 1% des fonds de la Politique agricole commune (PAC). Un financement jugé illégal par la Cour de justice européenne a estimé, dans un arrêt en avril dernier. Cette décision de la CJE ferait passer le budget global du PEAD de 500 millions d’euros en moyenne ces dernières années à … 113 millions en 2012. Soit une coupe drastique de 75%. D’où vient le PEAD ? Et comment en est-on arrivé là ? Europe1.fr retrace l’histoire de cette aide.

Une idée de Jacques Delors et Coluche. "En 1987, les excédents agricoles étaient considérables. J’ai donc fait prendre par la commission, qui a le pouvoir de gérer les excédents, la décision de les donner aux Restos et aux autres associations", a expliqué Jacques Delors devant la Commission européenne. Le PEAD est mis en place, donc, sur une idée conjointe de Coluche, l’instigateur des Restos du Cœur et de Jacques Delors, alors président de la Commission européenne.

A l'origine, du troc. Le fonctionnement du PEAD tel qu’il est créé en 1987 repose sur le troc de matières premières issues des stocks de la PAC contre des denrées alimentaires. En clair, ce programme permet de mettre à disposition des États membres qui le souhaitent des matières premières agricoles issues des stocks d’intervention de la PAC (céréales, riz, sucre, poudre de lait, beurre). Les stocks d'intervention sont ensuite troqués par les États membres contre des denrées alimentaires grâce à des appels d'offre. Les denrées alimentaires sont ensuite livrées à des associations caritatives chargées de distribuer les denrées aux personnes démunies. En France, quatre associations caritatives ont été désignées par l’Etat : la Croix-Rouge, la Fédération Française des Banques Alimentaires, les Restos du Cœur et le Secours populaire.

Ensuite, de l’argent. Mais le PEAD, qui devait être à la base une redistribution des excédents des stocks alimentaires européens, est aujourd’hui financé en espèces sonnantes et trébuchantes. Le programme prévoit qu’en cas d’indisponibilité temporaire d’une denrée dans les stocks d’intervention, les États disposent d’une enveloppe permettant l’achat direct de produits alimentaires sur le marché. En l’absence de stocks excédentaires depuis plusieurs années, cette exception est devenue la règle.

Une aide contestée. Face à cette distorsion du système, l'Allemagne, soutenue par la Suède, a déposé en décembre 2008 un recours contre la Commission européenne pour annuler le règlement annuel financier du PEAD pour l'année 2009. Un recours confirmé en avril dernier par la Cour de justice européenne, qui a annulé le règlement financier, au motif que le budget annuel du PEAD doit avant tout être construit en utilisant les stocks d'intervention disponibles, ce qui n'était pas le cas pour le programme 2009 du PEAD.

Quel avenir pour le PEAD ? Une réunion de "la dernière chance" est prévue mardi à Bruxelles entre les ministres européens de l’Agriculture, afin d’empêcher la saignée du PEAD. Selon un diplomate européen, l'Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la République tchèque, le Danemark, et la Suède s’opposent au maintien en l’Etat du budget annuel du PEAD. Les principaux bénéficiaires sont l’Italie, la Pologne et la France.