Chaque semaine, des libraires extraient des pépites de leurs rayonnages. Ce samedi, Anne-Sophie Rouveloux, de la librairie "Chronique", à Cachan, et Stanislas Rigot, de la librairie "Lamartine", à Paris, nous dévoilent leurs choix dans La voix est livre, sur Europe 1.
Peur de Dirk Kurbjuweit, chez Delcourt Littérature
"C'est une nouvelle maison d'édition qui propose des choses un peu différentes, comme cet ouvrage qui nous présente un crime comme point de départ mais qui est tout sauf un roman policier. Lorsque le roman s'ouvre, on découvre Randolph, un père de famille berlinois, architecte. Il rend visite à son père. Ce dernier a 78 ans et est en prison pour avoir a abattu un certain Monsieur Tiberius, le voisin de son fils. C'est le fils qui raconte l'histoire. Il explique les choses qui ont amené au meurtre mais annonce, dès le départ, qu'il n'est pas "complètement innocent", qu'il aurait pu l'éviter, "mais qu'il ne le voulait pas". Ce n'est pas une confession classique parce qu'il va aussi s'attarder sur son enfance, ce père qu'il a toujours connu comme un passionné d'armes. Il parle aussi de son mariage qui prend l'eau, notamment à cause de ce fameux voisin qui a été assassiné. On découvre que ce voisin a été très étrange : il préparait des pâtisseries aux enfants, puis il déposait des mots doux sur le paillasson pour la femme du héros, et même un exemplaire de Gatsby le magnifique. Puis il va commencer à les espionner, à roder et carrément les accuser d'abuser de leurs enfants. Une procédure judiciaire s'engage. la tension monte petit à petit. Et ce qui est génial, c'est que la vérité de tout ça tient dans un seul chapitre, en quelques pages." (Anne-Sophie Rouveloux).
Le Lambeau de Philippe Lançon, chez Gallimard
"On en parle beaucoup mais c'est un des livres qui m'a le plus bouleversé ces dernières années. Philippe Lançon est un des journalistes rescapés de l'attentat de Charlie Hebdo, donc le bouleversement, on s'y attendait. Là où le livre prend une ampleur totalement inédite, c'est par l'analyse qu'il fait de ce qui s'est passé, qui est d'une justesse, d'une intelligence et d'une beauté foudroyante. Et en même temps, il y ajoute un style éblouissant. Il ne s’épargne pas, n’épargne personne. Mais c'est un livre qui, jusqu'à la dernière phrase, questionne, rappelle ce que c'est que vivre. Ce n'est pas du tout pédagogique mais c'est une histoire éminent personnelle qui devient universelle. C'est à mon avis parti pour devenir un grand classique." (Stanislas Rigot)