Le Carré et Smiley : le plus célèbre couple du roman d'espionnage à nouveau réuni

Le Carré et son héros, Smiley, ont beaucoup en commun, l'espionnage tout d'abord.
Le Carré et son héros, Smiley, ont beaucoup en commun, l'espionnage tout d'abord. © AFP
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avec AFP , modifié à
Le nouveau roman de John Le Carré, A Legacy of Spies, revient sur l'opération menée dans L'Espion qui venait du froid par le "Cirque" britannique contre les services est-allemands de la Stasi au début des années 1960.

John Le Carré et George Smiley : le couple le plus célèbre de la littérature d'espionnage est réuni dans un nouveau roman, A Legacy of Spies, où le maître britannique reconvoque après 27 ans son héros gris de la Guerre froide. L'ouvrage parait jeudi. Il revient sur l'opération menée dans L'Espion qui venait du froid par le "Cirque" britannique contre les services est-allemands de la Stasi au début des années 1960, qui s'était soldée par la mort d'un agent et d'une femme qu'il tentait de faire passer à l'Ouest. 

Peter Guillam est sorti de sa retraite pour donner des explications sur l'opération, les enfants des victimes ayant lancé une action en justice contre les services secrets pour obtenir réparations et excuses. Derrière Guillam, c'est Smiley qui est visé, dont les actes sont réexaminés par une nouvelle génération. Et qui va, peut-être, donner une morale à l'Histoire.

Smiley, le double de Le Carré. Le Carré et son héros, Smiley, ont beaucoup en commun, l'espionnage tout d'abord. Le Carré, de son vrai nom David Cornwell, a travaillé pour les services de renseignement britanniques de 1950 à 1964, puis il s'est consacré à l'écriture à plein temps, après le succès de L'Espion qui venait du froid, le premier grand rôle de Smiley, en 1963. L'âge aussi : John aura 86 ans en octobre, George au moins autant. Tous deux ont été actifs pendant la Guerre froide qui opposait le bloc communiste aux pays occidentaux, formidable mine d'inspiration pour les romans d'espionnage. 

L'anti-James Bond. John et George partagent aussi certains traits de caractère. "Nous avons tous les deux du mal à nous souvenir des moments heureux. Ce n'est pas quelque chose qui me vient naturellement, je dois y travailler", expliquait ce week-end l'auteur au Times. La discrétion aussi : inutile de chercher John Le Carré dans la rubrique mondaine. Et rien de flamboyant non plus chez Smiley, l'anti-James Bond. Passe-muraille, de plus en plus taciturne avec l'âge, il reflète certainement de plus près la vie de l'espion moyen que son virevoltant collègue à gadgets 007, pourtant lui aussi britannique. 

Et anti-Brexit. Leurs idées politiques aussi sont proches. "Je l'ai écrit dans une espèce de frénésie liée à Trump et au Brexit. Je déteste toute cette opération du Brexit, comme Smiley", a expliqué Le Carré au Times, évoquant la décision des Britanniques de quitter l'Union européenne. "Les gouvernements blâment tous l'Europe pour leurs propres échecs parce qu'ils n'ont jamais investi dans l'idée d'une Europe unie".

Car c'est un Smiley profondément europhile qui sort du bois. "Toute la genèse de sa vie - son rêve privé, comme il le formule - c'est de sauver l'Europe. C'était ça pour lui, la ligne de front de la Guerre froide - c'est là où se déroulait la bataille pour l'âme de l'Europe. Alors quand il jette un regard en arrière - ou quand je le fais, si vous préférez -, il voit la futilité", a souligné Le Carré dans le Times.