Laurent Baffie : "Je compte les rires en salle grâce à une petite machine"

© KENZO TRIBOUILLARD / AFP
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A.D
L'humoriste est l'auteur de la pièce Jacques Daniel actuellement au théâtre de la Madeleine. Il se glisse dans la salle pour chaque représentation à l’affût des réactions du public.
INTERVIEW

Il est l'un des premiers snipers de la télé, ce qui ne l'empêche pas d'avoir une réelle sensibilité. Laurent Baffie, qui présente sa nouvelle pièce au théâtre de la Madeleine Jacques Daniel réunissant Claude Brasseur, Nicole Calfant et Daniel Russo dans la peau d'un veuf inconsolable, un cocu sous tranquillisants et une barmaid, était invité dans l'émission Il n'y a pas qu'une vie dans la vie.

L'obsession de trouver des idées. Il ne sait pas s'il est méticuleux, Baffie. Mais il est "obsessionnel". "Obsessionnel" dans l'écriture et surtout pour trouver des idées, le jour, la nuit aussi. "L’inspiration est une petite pute qui ne vient pas à tous les rendez-vous", lâche-t-il comme un uppercut. "Je brasse des idées, je ne fais rien innocemment, si je vais en terrasse d’un bistrot, c’est pour observer et remplir la boîte à idées. Je vais être déclenché tout le temps."

S'il est "déclenché", c'est pour le spectacle, lui qui est passé par pas mal de virages pour en arriver là : les heures de colle pour dévorer Pagnol, les multiples renvois des établissements scolaires, les petits boulots, les figurations, les déguisements de marin derrière Tino Rossi sur les plateaux de télé. Ces mêmes plateaux qui lui permettaient aussi d'approcher Gainsbourg ou Guy Bedos. "C'est un grand privilège de pouvoir aborder ces gens-là de près." Dès 1987, il est le coauteur de Jean-Marie Bigard avec qui il est resté proche. Et puis il y a eu Ardisson. C'est lui qui le lance pour plusieurs séquences dans ses émissions. 

"Le calvaire" du one-man-show. Sa notoriété, pas toujours pratique pour observer sans être vu, a augmenté avec le temps. Passé par le one-man-show, "un calvaire" pour lui le traqueur, il a aussi fait un film Les clés de bagnole, est l'auteur de plusieurs livres, et a surtout écrit et mis en scène plusieurs pièces. Pour la dernière d'entre elles, il est tous les soirs dans la salle. "Je prends des notes et je compte les rires en salle grâce à une petite machine."

Selon lui, une pièce réussie doit provoquer au moins 300 rires. Il les compte lui-même. Des feuilles d'appréciation sont aussi distribuées aux spectateurs. "C'est une Bible. Je veux que les gens soient contents, je sais le prix d'une place", dit-il, en espérant montrer que le théâtre n'est pas que classique et forcément intello.

Autocensure. De son propre aveu souvent peu démonstratif, d'autres humoristes trouvent grâce à ces yeux : Bigard pour son magnétisme, Jamel pour son talent et Gaspard Proust "qui a une écriture qui me séduit beaucoup, entre autres". Lui qui regrette parfois ces vannes et s'autocensure ne sait pas trop si Coluche ou Desproges auraient pu faire les mêmes sketchs aujourd'hui. Il a tendance à répondre oui et non : "Ils ne pourraient pas le refaire car les temps sont durs et le moment est dramatique. Et en même temps oui, parce que ils étaient des génies et auraient su exercer leur talent quand même."

Baffie, lui, poursuit sa route au théâtre de la Madeleine, a un autre projet de pièce ou de téléfilm inspiré d'un fait divers qui s’appellera Les amants de Lutetia. Et, l'étonnant personnage aux multiples facettes qu'il est s'avère écolo, vivant en lisière de bois et grand sauveteur...de grenouilles et crapauds.