Lambert Wilson : "Je n’envie pas du tout Brad Pitt, DiCaprio ou Angelina Jolie, ils sont en prison"

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A.D
Alors qu'il explore en ce moment son talent de chanteur dans un spectacle sur Yves Montand, Lambert Wilson pourrait bien dire adieu à sa carrière d'acteurs pour mener une vie beaucoup plus simple.
INTERVIEW

Le chant est une passion qu'il a découvert tard, alors qu'il était déjà acteur. Mais Lambert Wilson a décidé d'explorer à nouveau son talent de baryton léger dans Wilson chante Montand, un spectacle qui raconte la vie du chanteur illustre, aussi bien sur scène qu'avec les femmes, "par le biais de ses textes". Invité dimanche dans Il n'y a pas qu'une vie dans la vie, l'acteur s'est aussi épanché sur son avenir, qu'il voit volontiers loin du côté paillettes du métier d'acteur.

A la Scala. Poussé sur une scène pour chanter alors qu'il était déjà comédien, Lambert Wilson s'est d'abord senti illégitime avec le chant. Pourtant, le souvenir le plus précieux de sa carrière, sa plus "belle médaille", il la doit à son rôle de Voltaire pour lequel il a chanté à la Scala, à Milan. Il trouve d'ailleurs une grande vertu à cet art, celui de ne pas pouvoir tricher sur son talent. "Il y a un brassage d’un grand n’importe quoi au théâtre et au cinéma, alors que dans la danse, la musique, le chant, on parle d’au moins dix ans de préparation."

Des essais pour James Bond. Du côté des plateaux, sa vocation lui vient en partie de son père, Georges Wilson, grand homme de théâtre. Un père qui lui martelait qu’il n’avait pas assez souffert pour être comédien. Pourtant, "il avait tout fait pour que j’attrape le virus. Il m’avait mis deux fois sur scène en tant que figurant." Une fois le virus de la comédie inoculé, Lambert Wilson "fuit" en Angleterre. "Je voulais devenir une star américaine, donc il fallait être bilingue, je savais que les acteurs anglais étaient très bien formés."

Ces deux raisons s'ajoutaient au fait de vouloir être un "peu tranquille, loin de l'influence d’homme public" de son père. De la carrière de Lambert Wilson aux Etats-Unis, on connaît notamment le versant Matrix mais on ignore souvent qu’il a aussi auditionné pour incarner James Bond dans Bons baisers de Russie. "Ils m’ont fait faire des essais très officiels avec des décors, une fille dans un lit, puis une scène de cascade."

 

"Perdu sa passion pour les Etats-Unis". La possibilité de faire de Wilson un agent de sa Majesté a été sérieusement étudiée pendant un mois mais "j’étais invendable comme James Bond français", analyse l'acteur. S'il aimait "l’idée de faire ce rôle-là", perdre son anonymat au niveau mondial l'ennuyait. "Je n’envie pas du tout la vie de Brad Pitt, Leonardo DiCaprio ou Angelina Jolie, ils sont en prison", assène-t-il. Il a d'ailleurs perdu sa passion pour les Etats-Unis. "J’ai essayé. C’est épouvantable, on est comme un débutant. On est très peu considérés. Quand on est Français, on nous propose des clichés", celui du mec sale qui trompe sa femme. Les Etats-Unis de Trump le font de toute façon trembler.

Baptisé par l'Abbé Pierre. La religion aussi lui fait peur, alors même qu'il a demandé à l'Abbé Pierre (qu’il a d'ailleurs incarné dans le film Hiver 54) de le baptiser vers 40 ans. "Je pense qu’il aurait pu appartenir à un autre courant religieux. C’était mon maître spirituel. Il y avait quelque chose entre lui et moi, j’avais besoin d’un rite de passage." Il l'explique aussi par son enfance, quand son frère avait été baptisé et lui pas. "Je me sentais un peu bancal."

Assez mystique, jouant même un moine de Tibhirine dans Des hommes et des dieux, il se dit "pas du tout à l’aise dans les dogmes, les rites. Parce que je ne suis pas à l’aise avec l’humanité. Depuis que je suis petit, je m’éloigne des hommes. Les hommes me font peur, je suis comme un animal furtif. Je crois qu’il y beaucoup d’acteurs comme ça. Plus ça va dans l’âge, plus le monde évolue et plus j’ai envie de fuir l’humanité. Ça ne m’empêche pas d’aimer l’Homme."

"Je pourrais abandonner ce métier". Il envisage ainsi de prendre ses distances. "Je pense que j’aurais pu être jardinier. J’ai envie d’avoir un endroit rempli d’animaux. Je rêve d’avoir des chiens, des chats, des poules. A un moment donné, il va bien falloir que ce soit une réalité, parce qu’on fantasme sur une vie qu’on repousse en permanence." La solitude ne lui fait en revanche pas peur, il pense même avoir raté le coche pour devenir père. Ce qui l'inquiète est de prendre cette décision de rupture trop tard.

"Je pourrais carrément abandonner ce métier. Des choix de rupture, j’y pense tous les soirs. C’est un métier qui me stresse énormément et je ne suis pas sûr qu’il m’apporte autant de joie que ça. Par exemple, j’adore peindre, faire des choses manuelles. Le problème, c’est qu’il faut survivre, ou le faire pour soi en réduisant son train de vie. Je voudrais être dans une petite maison sur une île grecque et lire."