Jean-Michel Ribes : "Aujourd’hui, l'art est une copie de la réalité, il n’y a pas la transcendance"

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Aurélie Dupuy , modifié à
L'auteur et directeur du Théâtre du Rond-Point valorise plus que jamais les auteurs vivants, les seuls capables selon lui d'innover et d'aller au-delà d'une réalité fade.
INTERVIEW

Allergique à la réalité, aux formatages et aux choses définitives, Jean-Michel Ribes est devenu auteur de théâtre pour se "désennuyer". Jusqu’au 10 décembre, il présente sa nouvelle pièce Sulki et Sulku ont des conversations intelligentes au théâtre du Rond-Point, dont il est le directeur depuis le 1er janvier 2002. Invité dans Il n'y a pas qu'une vie dans la vie, il a renouvelé son plaidoyer pour les auteurs vivants.

"Qui invente quelque chose qui embellit le réel ?". Loin de lui l'idée d'écrire sur Trump ou la pollution. L'auteur veut des personnages qui le transportent mais il joue pourtant de l'actualité de façon crue, voire osée. Dans Sulki et Sulku, il fait notamment dire à l’un de ses personnages que l’art des grands peintres ne vaut pas le spectacle du 11-Septembre. "Aujourd’hui, le quotidien, ce qu’on vit, est plus fort que l’art (...) Qui invente quelque chose comme autrefois où l’art embellissait le réel ? Aujourd’hui, c’est une copie de la réalité, il n’y a pas la transcendance", regrette-t-il. 

Entendu sur europe1 :
J'essaie d’offrir au public ce qu’il ne sait pas encore qu’il aime

"On m'avait dit que j'allais me casser la gueule". C'est pour la réinvention de son art que Jean-Michel Ribes valorise les pièces d’auteurs vivants. "On en avait marre que Shakespeare, Molière, Marivaux occupent les scènes. (...) Vers 2000, il n'y avait que 8% d’auteurs vivants. Depuis la réouverture du Rond-Point, il en a produit 500. "J'essaie d’offrir au public ce qu’il ne sait pas encore qu’il aime. Je suis fier de montrer que les gens ne sont pas des gens stéréotypés mais curieux, inventifs, assoiffés, affamés de choses excitantes, artistiques qui les emmènent ailleurs, qui les font rêver. Très rapidement, dès la première année, les gens sont venus, après ils ont afflué. On m’avait dit que j’allais me casser la gueule au bout de six mois parce que les auteurs vivants n’existent pas et ceux qui existent font chier tout le monde. Jouer Les femmes savantes, le risque est minimum alors que jouer des auteurs peu connus ou inconnus comme Sébastien Thierry, qui jouent maintenant partout", relève pour lui d'un challenge à la hauteur.

Alternative aux Molière. Question récompense, le Molière ne colle pas vraiment à sa philosophie. Il compte donc créer autre chose. "J’ai un scoop. Je crée les 'Topor', pour le mois d’avril. On ouvre ! Les mauvaises herbes de la culture sont plus parfumées que les glaïeuls de l’Institution. On va peut-être saluer un musicien de métro, un type que personne ne connaît… On va faire un jury de gens extrêmement ouverts. Il va y avoir un jaillissement de nouvelles propositions qui ne sont pas dans le champs des Molière", promet-il.