Harcèlement à l'Opéra de Paris : "Je crois que c'est dans leur tête", balaie Ghislaine Thesmar

© JACQUES DEMARTHON / AFP
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A.H. , modifié à
Ancienne danseuse étoile et professeure à l'Opéra de Paris, Ghislaine Thesmar, 75 ans, met en doute les témoignages de harcèlement sexuel vécu par des danseurs de la prestigieuse compagnie.
INTERVIEW

À sa publication mi-avril, ce sondage interne avait fait l'effet d'une bombe à l'Opéra de Paris. Sous couvert d'anonymat, 76,8% des danseurs interrogés y affirmaient avoir été victimes de harcèlement moral ou vu un collègue subir un tel traitement. Et 25,9% affirmaient même avoir fait l'objet d'un harcèlement sexuel ou été témoin d'un tel agissement. Des témoignages que balaient d'un revers de main l'ancienne danseuse étoile Ghislaine Thesmar, qui sort son autobiographie. * 

"Les femmes se prennent très au sérieux". Dimanche, dans C'est arrivé demain sur Europe 1, celle qui a longtemps enseigné au sein de la prestigieuse compagnie parisienne affirme ne "jamais avoir rien vu de ce genre en 40 années de carrière à l'Opéra". Ghislaine Thesmar va même plus loin, en mettant carrément en doute la sincérité des danseurs et danseuses interrogés. "Je crois que c'est dans leur tête", juge-t-elle. "C'est une espèce de vague en ce moment", estime-t-elle, en référence au mouvement #MeToo et #Balancetonporc, suite à l'affaire Weinstein. "Je crois que les femmes se prennent très au sérieux. (…) Je n'ai jamais vu de harcèlement d'aucune sorte. Ce n'est pas pensable. Je ne le ressens pas du tout et je ne l'ai jamais vu", insiste-t-elle. 

"L'Opéra de Paris, c'est un spa maintenant". Et si, selon Ghislaine Thesmar, les danseurs et danseuses de l'Opéra de Paris osent ainsi dénoncer le traitement qu'ils subissent, c'est à mettre sur le compte d'une forme "d'embourgeoisement" lié à l'époque. "Le confort dans lequel nous vivons maintenant nous a un peu embourgeoisés. Se demander si on est harcelé ou pas harcelé, si on a mal au dos, si on est fatigué, si on a un burn-out… Je vous assure qu'à mon époque, c'était beaucoup plus spartiate", avance l'ancienne étoile.

Celle qui a été élevée à la dure, et qui a appris ses arabesques à coups de baguette sur les doigts, se réjouit d'avoir "gagné du temps" en acceptant "la manière forte". "On pouvait traverser des murs si on nous le demandait. On avait une espèce de force vitale, de volonté, de passion, qui nous tenaient", soutient Ghislaine Thesmar. "Maintenant, je trouve les danseurs beaucoup plus fragiles, parce qu'ils sont dans un confort extraordinaire. L'Opéra de Paris, ce n'est plus un théâtre, c'est un spa, une piscine d'eau chaude…" 

* "Une vie en pointes" aux Editions Odile Jacob 304 pages 22.90 €