Gilbert Montagné : "Je suis né sur la table de la cuisine"

  • Copié
Aurélie Dupuy
A "La table des bons vivants", le musicien non-voyant est revenu sur son enfance et a expliqué l'importance de tous les sens autres que la vue.
INTERVIEW

De Gilbert Montagné, on connait l'optimisme, les chansons et ses lunettes noires de non-voyant. Ce sont tous les autres sens qu'il a mis en pratique samedi dans l'émission La table des bons vivants. Invité à l'occasion de la sortie de son livre, Au jardin de ma vie, il s'est dévoilé côté la cuisine.

"Je ne bouffais rien du tout". Dans son ouvrage, le chanteur se raconte : sa naissance prématurée, la non-voyance, la musique et ce fameux optimisme chevillé au corps. En studio, il confirme : "Ma première construction, ça a été mes trois mois et demi, seul, dans ce que j'appelle ma 'boî-boîte', c'est-à-dire la couveuse. La vie m'a fait confiance du départ. A l'époque, je ne bouffais rien du tout. J'ai mis des années, je ne mangeais pas beaucoup. Après je me suis bien rattrapé", explique-t-il. Il était pourtant prédestiné : "Rue des Pyrénées, mes parents avaient une chambre et une cuisine. Ils ne m’attendaient pas du tout, et je suis né sur la table de la cuisine. Et ma grand-mère dans l'Allier était cuisinière." 

"Sous vos mains, vous avez la vraie surprise". Au-delà du goût, il souligne qu'on "élude trop le toucher. On devrait apprendre aux enfants à plus toucher, voire à avoir des notions de braille, ce qui ferait que le braille ne serait plus cette écriture étrange venue d'ailleurs." Mais le toucher a aussi son importance côté papilles, comme de découvrir le velouté d'une pêche, écrit-il dans son livre. "On ne peut pas voir évidemment ce qui vient de loin, mais dès que c'est sous vos mains, vous avez la vraie surprise au dernier moment et ça, c'est très beau. La cuisine, ça part de bons produits et ce qui est bon est beau au toucher aussi", conclut le musicien, désormais écrivain. 

Le questionnaire des bons vivants

Pour mieux la connaître côté fourchette, le chanteur est passé sur le gril des interrogations de Laurent Mariotte :

Le goût de votre enfance ?

La soupe de cresson. J'avais une voisine de pallier extraordinaire qui s'appelait Nenette et elle me faisait de soupes de cresson avec des petites noix de beurre.

Votre plus beau repas, dans le sens inoubliable ?

C'est le dernier repas que j'ai eu l'occasion de faire avec mon père. Evidemment, à l'époque, je ne savais pas que ce serait le dernier. On était dans l'Allier, à Saint-Pourçain, dans le restaurant Le Chêne vert. Mon père sortait rarement mais là, il avait accepté de venir. Je me souviendrai toujours de ça.

Votre pire repas ?

Ah oui ! Je suis à la Bastille. On sort d'un concert, il est 23h50 environ, et on voit une pizzeria. En bas, c'était un restaurant de fondues et en haut une pizzeria. Déjà, je trouvais ça louche, mais on avait la dalle. On a mangé une fondue. Sincèrement, elle n'était pas bonne. Je n'aurais rien dit si le chef n'était pas venu me dire "Alors Gilbert, ma fondue elle est fantastique ?!" J'ai répondu : "Si vous ne m'en aviez pas parlé, je n'en aurais pas parlé, mais il ne faut plus la faire !"

Qui sont les invités de votre dîner idéal ?

Ah si je pouvais... Aretha Franklin, Whitney Houston, Ray Charles et puis mon Johnny aussi. J'ai eu l’occasion de dîner plusieurs fois avec mon Johnny, c'était trop bien.

Le mot de la F-A-I-M ?

Je voudrais que tous les restaurants, après le service, ouvrent leur arrière-porte aux gens qui en ont vraiment le besoin, pour venir chercher un plat. J'ai eu une période dans ma vie qui a duré quelques jours où je ne pouvais pas me payer un restaurant. Et quand je passais devant les restaurants, je humais les arômes, ça me rendait dingue.