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A.D
Sur scène avec Pierre Arditi au théâtre Edouard VII, la comédienne césarisée encense son partenaire. Et revient sur son parcours ascendant.
INTERVIEW

Si elle avait été un homme, Emmanuelle Devos aurait aimé être Henry Fonda, Montgomery Clift ou Gérard Depardieu, mais glisse que l'hystérie dans le métier, elle l'a "beaucoup plus vu chez des hommes que chez des femmes." Ce qui ne l'empêche pas de couvrir d'éloges certains acteurs avec qui elle a partagé l'affiche. C'est le cas de Pierre Arditi avec qui elle joue actuellement la pièce Quelque part dans cette vie, au théâtre Edouard VII. L'actrice était pour l’occasion l'invitée de l'émission Il n'y a pas qu'une vie dans la vie.

"Pierre n'est pas dans des rails, moi non plus". Dans cette nouvelle pièce, le comédien campe un vieux professeur obligé d’avoir recours à une aide-ménagère. Emmanuelle Devos entre alors en scène, sauf qu'elle n'est pas là par hasard et a même quelques comptes à régler avec lui. "Nous deux, acteurs, nous allons si bien ensemble dans le jeu", s"exclame la comédienne. L'alchimie avait déjà opéré par le passé dans la pièce Tailleur pour dames. "Je ne me suis jamais aussi bien entendue avec un acteur sur scène qu’avec Pierre. Là, on a joué peut-être trente fois, on est en train de prendre un tournant. Ça se nourrit au fil des représentations. Pierre change tous les soirs, ce n’est pas un acteur dans des rails, et moi non plus. C’est rare les partenaires comme ça", complimente-t-elle.

"J'ai tout eu". Côté cinéma, elle garde aussi un souvenir très fort de Daniel Auteuil, à qui elle a donné la réplique dans le film L’Adversaire de Nicole Garcia. "Il jouait Jean-Claude Romand. Il y a des moments, j’ai vu dans ses yeux qu’il voulait m’assassiner. Je suis restée bloquée, je n’ai pas pu donner ma réplique. Je voyais dans son œil une opacité, un œil de requin, soudainement, alors que Daniel est l’homme le plus délicieux du monde. C’est un pur acteur", décrit-elle. Quant à son propre cas, elle était sûre depuis toute petite de vouloir devenir actrice, comme sa mère Marie Henriau. "C'est une question de vocation. J’avais une vraie une ambition artistique et je voulais des premiers rôles. Maman, sa vie privée a été très importante. Moi, je voulais tout très tôt et j’ai tout eu", dit-elle, satisfaite.

Entendu sur europe1 :
On m'appelait le loukoum. J’étais trop éthérée, trop molle

"Ce métier m'a guérie". Pourtant, tout ne s'est pas fait d'un claquement de doigts. François Florent, du cours Florent, lui avait dit qu’elle réussirait sur le tard. "Je n'étais pas une jeune première, j'étais un peu trop particulière." Elle confie qu'on l’appelait "le loukoum. J’étais trop éthérée, trop molle. Pour me dynamiser, je n’avais le droit de travailler que du boulevard, du Feydeau. Ça vous fait sortir de votre personnage de petite pleureuse." Comme prévu, elle explose un peu plus tard, dans les années 90. Elle a alors 28 ans. "Jeune, j'étais assez renfermée, introvertie. J’ai un jour entendu une jeune femme Asperger parler d’elle, et je pense que je n’étais pas loin de ça, ayant peur des rapports humains et ce métier m’a complètement guérie, sauvée."

La consécration arrive en 2002 avec un César de la meilleure actrice pour Sur mes lèvres de Jacques Audiard. Depuis peu, elle écrit un scénario. "Je ne sais pas ce que ça va donner mais c’est une vraie nouveauté dans ma vie. Après 50 ans, c’est comme une seconde partie de la vie. On verra si ça arrive au bout."