Cinéma : le sale été des blockbusters américains

"Le Roi Arthur", "Baywatch" et "La Momie" font partie des échecs de l'été aux États-Unis.
"Le Roi Arthur", "Baywatch" et "La Momie" font partie des échecs de l'été aux États-Unis. © Montage Europe 1
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Aucun film milliardaire, des suites qui font moins bien que les précédents volets : les traditionnels blockbusters US de l’été ont enchaîné les déconvenues dans les salles de cinéma.

L’été touche à sa fin dans les salles de cinéma et l’heure est au bilan pour les studios. Et force est de constater que l’été 2017 n’est pas une réussite pour les grosses productions, notamment américaines. Hormis quelques exceptions, les blockbusters estivaux, têtes de gondole d’Hollywood, ont tous déçu au box-office, attirant moins de spectateurs que prévu.

Pas de film milliardaire. Aucun des films sortis depuis mai – début de la période "d’été" au box-office qui court jusqu’au premier lundi de septembre, le Labor Day aux États-Unis – n’a dépassé le milliard de dollars de recettes au box-office mondial (soit environ 850 millions d'euros), une première depuis 2009. Parmi les sorties estivales, c’est Moi, Moche et Méchant 3 qui tire le mieux son épingle du jeu avec environ 950 millions de dollars accumulés dans le monde (808 millions d'euros), plus que les deux premiers volets mais moins que Les Minions. Derrière le dessin animé, Les Gardiens de la Galaxie, Vol.2 a également réussi à dépasser son prédécesseur et Wonder Woman et Spider-Man : Homecoming ont plutôt bien marché pour des "premiers" films, certes issus d'univers bien connus.

Un "pur fiasco" aux États-Unis. Mais le podium ne masque pas la déception générale des exploitants. À dix jours de la fin de la saison estivale et alors que tous les gros films attendus sont en bout de course, le box-office américain affiche une baisse de 23% par rapport à l’été dernier. Pour la première fois depuis 2006, le marché ne franchira pas la barre des quatre milliards de dollars sur la saison (3,4 milliards d'euros). Lors d’une conférence avec des analystes, Adam Aron, le patron de la chaîne américaine de salles de cinéma AMC, n’a pas hésité à qualifier l’été 2017 de "pur fiasco", blâmant par la même occasion les studios et leur "confiance excessive dans les suites, qui à l’exception des Gardiens de la Galaxie 2, ont toutes déçu".

Les suites ne font plus recette. Les chiffres lui donnent raison. Pirates des Caraïbes : La Vengeance de Salazar, Alien : Covenant, Transformers : The Last Knight, La Planète des Singes : Suprématie et Cars 3 ont tous rapporté moins d’argent que les précédents volets de leurs franchises respectives. Signe que les spectateurs se lassent de ces sagas qui durent pour certaines depuis plus de dix ans. Le problème est qu’ils ne vont pas voir davantage les "nouveautés". Les remakes de La Momie et de Baywatch : Alerte à Malibu n’ont pas trouvé leur public. Quant aux histoires innovantes, issues de récits mythiques ou littéraires, elles ont visiblement trop effrayé les spectateurs, à voir les échecs de La Tour Sombre, Valérian et la Cité des mille planètes ou Le Roi Arthur.

La situation n’est pas sans rappeler la prévision faite par Steven Spielberg en 2013. Celui qui a donné naissance aux premiers blockbusters estivaux (Les Dents de la Mer, Indiana Jones) prophétisait alors l’effondrement du système de production actuel, étouffé par l’engorgement de films aux recettes identiques. Visiblement, les spectateurs commencent bel et bien à fatiguer.

Voilà pour le verre à moitié vide. Si on le regarde à moitié plein, on observe que cet essoufflement des grosses productions a profité à quelques films atypiques. Dunkerque, Baby Driver, Atomic Blonde ou encore Girls Trip (une comédie américaine pas sortie en France) ont réalisé de belles performances au box-office.

Étendre l’été pour éviter les embouteillages. Ce n’est évidemment pas la première année que des films à gros budget se plantent au box-office. Chaque été, quelques longs-métrages ne parviennent pas à se frayer un chemin dans la masse des sorties. L’an dernier, c’était Warcraft, Star Trek Beyond et La Légende de Tarzan. En 2015, Tomorrowland et Les Quatre Fantastiques avaient payé la note. Et ainsi de suite… Les studios l’ont remarqué et réfléchissent déjà à des solutions. La Chine et son marché gigantesque a un temps compensé les défaillances sur les marchés occidentaux. Mais la croissance des entrées dans les salles chinoises ralentit et les productions locales commencent à rivaliser avec les mastodontes américains.

L’autre solution privilégiée consiste à sortir les films estivaux de l’été en étendant la saison des blockbusters. Ainsi, cette année, on a pu voir Kong : Skull Island, Logan et La Belle et la Bête dès le mois de mars. Et en novembre, les spectateurs découvriront le très attendu Justice League. Pour l’instant, la stratégie fonctionne bon an mal an. Depuis 2012, la moitié des films qui ont dépassé la barre du milliard de dollars au box-office mondial étaient sortis hors de la période estivale. Cette année, les deux seuls films qui ont pour l’instant franchi ce palier symbolique, La Belle et la Bête et Fast & Furious 8, sont sortis en mars et en avril. De quoi colmater les brèches de la production estivale, mais jusqu’à quand ?

La France subit mais garde ses particularités. La catastrophe hollywoodienne est moins perceptible en France. Moi, Moche et Méchant 3 a dépassé les cinq millions d’entrées. Là aussi, c’est mieux que les deux premiers volets mais moins que Les Minions. Les Français ont également réservé un bel accueil au Valérian de Luc Besson (3,35 millions d’entrées), passé sous le radar aux États-Unis. Étonnamment, Baywatch a bien marché chez nous alors que même les Américains n’ont pas soutenu ce remake d’une de leurs séries cultes. Mais pour les autres sorties estivales, le constat à la baisse est quand même valable dans l’Hexagone. À noter que, Valérian mis à part, il n’y avait pas de grosse sortie française dans les salles cet été.