Bertrand Tavernier : "Je crois que j’étais prédestiné à faire du cinéma"

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Aurélie Dupuy , modifié à
Le cinéaste revient en salles avec une anthologie du cinéma français. Un ode aux classiques et à une manière de faire qui se perd un peu selon lui, d'autant plus dans le cinéma américain.
INTERVIEW

A 6 ans, c'est le déclic. Bertrand Tavernier, à l'époque dans un sanatorium après une grave déficience pulmonaire, tombe sur le film Dernier atout de Jacques Becker. Dès lors, le cinéma entre dans sa vie et ne le quitte plus. "Je crois que j’étais prédestiné à faire du cinéma. Etre épaté par une séquence et découvrir 20 ou 25 ans après qu’elle est tournée par un des plus grands cinéastes français... J’étais en avance à 6 ans", s'étonne-t-il.

Depuis, il est resté admiratif de Becker, mais de bien d'autres. Preuve en est la sortie en salles de son film hommage : Voyage à travers le cinéma français. Pour l'occasion, le cinéaste était l'invité d'Il n'y a pas qu'une vie dans la vie.

Énervé par l'expression "vieux films". Ce nouveau long-métrage est une déclaration d'amour au cinéma du début des années 30 aux années 60. Cette anthologie a nécessité six ans de préparation. Quelque 950 films ont été visionnés pour retenir 582 extraits dans 94 films. "Il n’y a pas vraiment de premier jour. Je ne sais pas par quel film j’ai commencé", explique Bertrand Tavernier. Il cite Gabin, Arletti, Sautet, Truffaut et avoue être "énervé" par l'expression "vieux films".

Comme Godard, il rappelle qu'on ne parle pas de vieux livres en nommant Zola ou Hugo, mais de classiques. Comme si l'un était majeur, l'autre mineur. C'était d'ailleurs le discours de son père, qui avait fondé la revue Confluences et était critique littéraire : on changeait le monde avec des mots, le cinéma était un divertissement.

"Du mal à voir certains films de George Lucas". L'oeuvre de Tavernier, elle, a parcouru tous les genres : film de guerre, film historique... Ce qui compte pour le réalisateur, ce sont des scènes que l'on n'oublie pas et des dialogues qui font mouche. Le cinéma rapide avec de l'action à chaque seconde l'intéresse avec parcimonie. "Le rythme repose sur des changements. C’est parce qu’il y a des moments lents que les plans rapides prennent leur envol", dit-il. "La guerre des étoiles, c’est autre chose, une série d’effets spectaculaires, poursuit Bertrand Tavernier. J’ai beaucoup de mal à voir certains films de George Lucas, je n’ai pas l’impression qu’il y ait des scènes. Je ne me souviens de rien, je confonds toutes 'les guerres des étoiles'", avoue-t-il.

Dans l’ensemble, il regrette que "les Américains n’aiment pas beaucoup le cinéma étranger, qui ne totalise pas plus de 4% de parts de marché". Et va jusqu'à élargir son propos à la vie politique : "Quand vous écoutez les interviews de Donald Trump, est-ce que vous avez le sentiment qu’il connaît quoi que ce soit à la politique extérieure et à ce qui se passe en dehors de sa tour ?"