Lars Von Trier se dit "nazi", puis dément

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MS avec agences , modifié à
Le réalisateur a provoqué un malaise lors de la présentation de son film. Avant de démentir.

Indignation d'un côté et sourires de l'autre. Lars Von Trier a suscité des sentiments partagés lors de la présentation à la presse de son film Melancholia en compétition pour la Palme d'Or, au festival de Cannes. Le réalisateur danois a affirmé, à la fin de cette conférence, "comprendre Hitler". Connu pour ses propos provocateurs, le cinéaste répondait à une question sur des déclarations dans un magazine danois et son goût pour l’esthétique nazie. Quelques heures plus tard, il s'est excusé d'avoir tenu de tels propos.

"Je suis nazi"

"Je comprends l’homme", a assuré sur un ton léger Lars Von Trier à propos d'Adolf Hitler avant d’ajouter : "je pense qu'il a fait de beaucoup de mal, mais je peux l'imaginer assis dans son bunker à la fin". Le réalisateur a tenté ensuite de se justifier : "ce que j’essaie de dire, c’est que je crois que je comprends l’homme. L’homme n’est pas intrinsèquement bon, mais je le comprends dans un sens".

"Mais je sympathise un tout petit peu seulement", a-t-il toutefois tempéré. "Je ne suis pas en faveur de la Seconde guerre mondiale. Je suis très en faveur des Juifs. Non pas trop, parce qu’Israël pose quand même certains problèmes", a-t-il dit avant d’avouer être dans l’impasse : "comment je peux m’en sortir ?". Et, a expliqué le réalisateur, "je voulais parler de l’architecte Albert Speer. Ce n’est peut-être pas un des plus grands enfants de Dieu. Mais il avait beaucoup de talent". Albert Speer a été jugé avec les autres dignitaires nazis, condamné à 20 ans de prison et emprisonné jusqu'en 1966 pour crimes de guerre et crimes contre l'Humanité.

Un peu plus tôt, Lars Von Trier a assuré avoir "découvert être un nazi, parce que (sa) famille était allemande". C’est en 1989, à la mort de sa mère, que le réalisateur danois a appris ses origines.

Les excuses de Lars Von Trier

En fin d'après-midi, Lars Von Trier est cependant revenu sur ses propos de la matinée. Dans un communiqué, le cinéaste "s'est excusé" et s'est défendu d'être antisémite ou nazi. "Si j'ai pu blesser quelqu'un par les propos que j'ai tenu ce matin, je tiens sincèrement à m'en excuser. Je ne suis ni antisémite, ni raciste, ni nazi", a-t-il affirmé.

Ce revirement de ton a été incité par la direction du festival de Cannes. Elle s'est "émue" des propos du cinéaste danois et "l'a invité à s'expliquer". Selon les organisateurs du festival, "le cinéaste précise qu'il s'est laissé entraîner à une provocation". Enfin, ajoutent-ils, la direction "n'admettra jamais que la manifestation puisse être le théâtre, sur de tels sujets, de semblables déclarations".

Les déclarations du réalisateur danois avaient provoqué de vives réactions. Première à réagir : l'association américaine des survivants de l'Holocauste et de leurs descendants. "Les survivants de l'Holocauste condamnent les commentaires répugnants de Von Trier qu'ils considèrent comme une exploitation insensible de la souffrance des victimes pour des buts de promotion et de publicité", écrit-elle. L'association estime que ces "propos bizarres" ont été tenus dans le but de "choquer".

Un militant contre l'extrême droite

Ce discours, qu’a tenu Lars Von Trier mercredi à Cannes, va à l’encontre visiblement de ses opinions politiques. L’enfant terrible du cinéma danois s’était notamment illustré en 2005 dans la campagne pour l’élection législative danoise. Le cinéaste avait réalisé une affiche, dans laquelle il s’était mis en scène ensanglanté dans le but de dénoncer l’action du chef du gouvernement, Anders Fogh Rasmussen, qui s’appuyait, depuis plusieurs années, sur l’extrême-droite pour gouverner.

On pouvait y lire en légende : "Cher Anders Fogh... ta base parlementaire est toujours malpropre".