Pourquoi Bale coûte-t-il aussi cher ?

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avec le service des sports d'Europe 1 , modifié à
TRANSFERTS - Le Real Madrid a officialisé le transfert du Gallois pour une somme astronomique.

91 millions d'euros pour la presse espagnole. 100 millions d'euros pour les médias anglais. A 9 ou 10 millions près, le Real Madrid a, quoi qu'il arrive, déboursé une somme délirante pour acquérir l'ailier de Tottenham, le Gallois Gareth Bale. Seul Cristiano Ronaldo avait coûté aussi cher que le futur n°11 des Merengue quand le Real, déjà, avait déboursé 94 millions d'euros en 2009 pour s'attacher les services de la star de Manchester United. Si "CR7" avait déjà fait ses preuves avec les Red Devils, en remportant notamment la Ligue des champions et le Ballon d'Or en 2008, ce n'est pas exactement le cas de Bale, au pamarès quasi vierge (une Coupe de la Ligue anglaise, en 2008). Alors, pourquoi Bale coûte-t-il aussi cher ? Tentative d'explication.

Deuxième plus jeune joueur à avoir débuté en Premier League, plus jeune joueur sélectionné en équipe du pays de Galles (et plus jeune buteur), Bale est un joueur précoce. "Il a surtout un grand potentiel d'endurance et de vitesse. En principe, on a ou l'un ou l'autre, lui, il a les deux", souligne Georges Prost, qui l'a entraîné quand il a débuté chez les jeunes, à Southampton. "Il était tellement enthousiaste, tellement généreux, il avait le sourire tous les jours." A 24 ans aujourd'hui - il les a fêtés en juillet -, Bale, professionnel sérieux, semble être au sommet de son art. Défenseur latéral à l'origine, il a été ensuite replacé ailier par Harry Redknapp, notamment après son triplé inscrit en Ligue des champions sur la pelouse de l'Inter Milan, en octobre 2010.

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Puis, la saison dernière, le technicien portugais André Villas-Boas lui a donné encore plus de liberté offensive, en l'alignant derrière l'attaquant de pointe. Résultat : Bale a inscrit 26 buts en 44 matches, dont 21 en championnat, ce qui lui a permis de terminer à la troisième place du classement des buteurs,  derrière le Néerlandais Robin van Persie (Manchester United) et l'Uruguayen Luis Suarez (Liverpool). Il fut également le premier joueur de Tottenham à terminer avec un total de plus de 20 buts depuis l'Allemand Jürgen Klinsmann en 1994-95.

Avec Bale, le Real engage l'incontestable meilleur joueur de Premier League. L'an dernier, l'ailier de Tottenham a en effet raflé tous les titres possibles en individuel (meilleur joueur dans le vote des joueurs, des journalistes et meilleur jeune). Or, la Premier League est le championnat le plus suivi de par le monde, et notamment aux Etats-Unis. Avec Bale, le Real s'offre ainsi une ouverture XXL sur le monde anglo-saxon. Et espère amortir cette "folie" grâce au merchandising. "On nous raconte des histories de maillots : faut les faire, faut les vendre, faut avoir des marges pour tout le monde, ce n'est pas avec ça qu'on fait 100 millions", nuance néanmoins notre consultant, Guy Roux. "On parle aussi de la rentabilité dans le stade, il en faut des sandwiches pour parvenir à une rentabilité pareille..." Défi économique, Bale constitue également un pari sportif pour le club madrilène, car les joueurs britanniques qui ont réussi à flamber hors de leurs frontières ne sont pas légion. Ainsi, les passages de Steve McManaman et de Michael Owen au Real, par exemple, n'ont pas laissé des souvenirs impérissables...

Si les chiffres des transferts sont toujours à prendre avec une certaine distance (l'inflation et les taux de transaction d'une monnaie à une autre ne sont pas pris en compte), la somme déboursée par le Real pour acquérir Bale traduit néanmoins une certaine flambée des prix sur le marché international, engendrée par l'arrivée de nouveaux investisseurs, comme à Paris ou à Monaco. Mais avec Bale, le Real va encore plus loin que les deux clubs tricolores, qui, eux, n'avaient mis "que" 64 et 60 millions pour engager Edinson Cavani et Radamel Falcao... Si le montant de son transfert venait effectivement à flirter avec la centaine de millions d'euros (symbolique), comme l'affirme la presse anglaise, Gareth Bale deviendrait le quatrième joueur du Real à établir le record du transfert le plus onéreux, après Luis Figo en 2000 (61,7 millions d'euros), Zinédine Zidane en 2001 (75 millions) et Cristiano Ronaldo en 2006 (94 millions). A croire que le Real aime montrer les muscles...

"Pour beaucoup de monde, c'est une façon d'échapper à la crise économique", affirme le journaliste espagnol Pablo Polo. Pour Guy Roux, il s'agit également d'une sorte d'aberration. "C'est d'autant plus étonnant que le Real Madrid a un abîme de dettes, qui sont ouvertes par des banques", souligne-t-il. "C'est un miracle espagnol. Ce n'est sûrement pas fou parce que le président du Real Madrid (Florentino Perez) n'est pas du tout quelqu'un de fou mais c'est dans une réalité économique qui me dépasse. Quand des Qataris ou des Russes possèdent des milliards et les dépensent, on est dans une logique économique habituelle, un riche dépense son argent. Mais quand on est quelqu'un de très endetté qui fait un achat à un prix énorme, on s'étonne et on se demande comment il fait." Les rumeurs annonçant le transfert de Mesut Özil vers Arsenal pour une petite cinquantaine de millions d'euros, donne un premier indice : le Real a peut-être un plan économique...