Un président peut-il être partie civile ?

C'est une banale affaire d'escroquerie qui est à l'origine de la bataille juridique sur le statut pénal du chef de l'Etat.
C'est une banale affaire d'escroquerie qui est à l'origine de la bataille juridique sur le statut pénal du chef de l'Etat. © MAXPPP
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avec AFP , modifié à
La Cour de cassation doit rendre sa décision vendredi sur le statut pénal du chef de l'Etat.

Une banale escroquerie est à l'origine d'une bataille juridique de haut vol. La Cour de cassation se prononcera vendredi après-midi sur le statut pénal du chef de l'Etat, après le pourvoi formé dans l'affaire du "compte piraté" de Nicolas Sarkozy. La plus haute autorité judiciaire de France, dans sa formation la plus solennelle, s'est penchée sur la question le 1er juin et doit désormais trancher. Le but : déterminer si un président de la République, inattaquable en justice, peut se constituer partie civile quand il se dit victime.

En l'occurrence, Nicolas Sarkozy a été la cible d'une banale escroquerie bancaire en 2008 : des jeunes qui avaient réussi à pirater son compte en banque lui avaient soutiré une centaine d'euros. Mais celui qui était à l'époque chef de l'Etat, et avait donc notamment le pouvoir d'influer sur la carrière des juges, pouvait-il se constituer partie civile ?

Principe de l'égalité des armes

Le 29 octobre 2009, le tribunal correctionnel de Nanterre avait déclaré sa requête recevable. Mais les magistrats avaient sursis à statuer sur sa demande de dommages et intérêts, renvoyant la décision à la fin de son mandat présidentiel. 

Pour justifier cette décision, les juges s'étaient appuyés sur l'article 67 de la Constitution, portant sur l'immunité du président pendant son mandat. Cette disposition crée en effet à leurs yeux une atteinte au principe de l'égalité des armes, garanti par la Convention européenne des droits de l'Homme, c'est-à-dire l'"équilibre des droits des parties", note la Cour de cassation sur son site

Décision infirmée en appel

En 2010, la cour d'appel de Versailles avait infirmé la décision des magistrats nanterrois et accordé un euro de dommages et intérêts à Nicolas Sarkozy. Pour les juges de Versailles, le procès avait été équitable, notamment grâce à "l'effectivité du débat contradictoire". L'un des prévenus, condamné à huit mois de prison en appel, contre douze en première instance, s'était alors pourvu en cassation.

La décision de haute autorité judiciaire intervient alors que Nicolas Sarkozy s'apprête à redevenir un justiciable ordinaire : à partir de samedi, il ne bénéficiera plus de son immunité. Quant au nouveau chef de l'Etat, François Hollande, il a fait de cette épineuse question l'une de ses promesses de campagne.