Plus-values : le gouvernement lâche du lest

Le gouvernement a accepté d'atténuer la mesure sur les plus-values immobilières, qui devraient finalement ne pas être imposées après 30 ans de détention du bien vendu.
Le gouvernement a accepté d'atténuer la mesure sur les plus-values immobilières, qui devraient finalement ne pas être imposées après 30 ans de détention du bien vendu.
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et Olivier Samain avec AFP , modifié à
A la demande des députés UMP, le plan de rigueur sur les plus-values immobilières sera assoupli.

Le plan de rigueur deviendrait-il un vrai casse-tête ? Alors que les députés doivent débattre mardi des mesures du plan applicables dès 2011, le gouvernement a été une nouvelle fois contraint de revoir sa copie. Après avoir "rétropédalé" sur l'augmentation de la TVA pour les parcs à thème, il a cette fois fait des concessions sur la plus-value sur la revente d'une résidence secondaire ou d'un appartement destiné à la location. Les ministres de l'Economie et du Budget, François Baroin et Valérie Pécresse ont négocié avec le rapporteur général du Budget, Gilles Carrez (UMP), durant toute la journée de lundi sur ce sujet. Montés au créneau ces derniers jours contre une telle mesure, les députés UMP ont donc fini par obtenir quelques assouplissements.

Une réforme moins radicale

Le gouvernement a d'abord accepté que les plus-values immobilières soient exonérées d'impôt lorsque le bien vendu est détenu depuis plus de 30 ans, a révélé lundi Gilles Carrez. Le vendeur devra ainsi garder le bien pendant 30 ans pour ne plus payer d'impôt sur la plus-value. Le plan Fillon prévoyait initialement d'imposer cette plus value quelque soit la durée de détention du bien, alors qu'aujourd'hui l'imposition s'arrête au bout de 15 ans.

"On abandonne ainsi l'idée d'une fiscalité perpétuelle qui n'a jamais existé en France", s'est félicité Gilles Carrez. D'autre part, Bercy aurait accepté de repousser de quelques mois, jusqu'au 1er décembre, l'entrée en vigueur de cette mesure. Des députés UMP avaient proposé lundi de reporter l'alourdissement de la taxation au 1er décembre, au lieu du 25 août. "Nous avons entendu en tout cas les critiques qui disaient que cette mesure ne devait pas être trop brutale", a affirmé Valérie Pécresse mardi.

Le forcing des députés a payé

Depuis plusieurs jours déjà, une partie des députés avait donné de la voix et critiquer cette mesure phare du plan de rigueur. Pour justifier l’opposition des députés, Christian Estrosi avait mis en avant la semaine dernière les conséquences de cette mesure sur le marché immobilier. "Cette mesure risque de faire monter les prix du marché de l'immobilier et d'inciter les propriétaires à louer leurs logements plutôt qu'à les vendre", avait estimé le député-maire de Nice, ajoutant que "des centaines de ventes ont été annulées depuis son annonce".

Une opposition parlementaire teintée d'enjeux politiques. Politiquement, la mesure touche en fait une large part de l'électorat UMP, les détenteurs de patrimoine ayant traditionnellement plus tendance à voter à droite que l'ensemble de l'électorat.

Ironie du sort, cette mesure était plutôt bien vue à gauche. "Cette mesure présente le double avantage d'économiser 2,2 milliards d'euros, sans pénaliser les non-fortunés, et de limiter les comportements spéculatifs", a estimé lundi le député PS de Paris Jean-Marie Le Guen. Ce dernier craignait déjà "un nouveau renoncement du gouvernement", sur ce qu'il considère être la "seule bonne mesure du plan d’austérité.

Un assouplissement compensé

L'exonération au-delà de 30 ans écorne en effet sensiblement les 2,2 milliards d'euros de recettes nouvelles, en année pleine, que devait rapporter la mesure à l'Etat, d'où la nécessité de mesures compensatoires. Le député UMP Gilles Carrez a donc précisé que cet assouplissement serait compensé par deux mesures concernant l'impôt sur les sociétés.

La première est le bénéfice mondial consolidé, régime fiscal utilisé seulement par une poignée de multinationales françaises qui leur permet d'inclure dans le résultat imposable en France les résultats (et donc les éventuels déficits) des filiales étrangères qu'elles contrôlent. Il s'agit d'une niche fiscale critiquée car elle peut permettre à certains grands groupes de minorer leur impôt sur les sociétés.

L'autre mesure prise en compensation consisterait à appliquer dès 2011 la hausse, de 5% à 10%, de la quote-part pour frais et charges appliquée aux plus-values de long terme sur les titres de participation, alors que le plan de rigueur prévoyait une entrée en vigueur l'an prochain.