Les dessous du duel Montebourg-Ayrault

© REUTERS
  • Copié
Fabienne Cosnay , modifié à
RECIT - Un livre révèle les échanges tendus entre les deux hommes autour du sort de Florange.

Florange, le dossier qui fâche. Le 18 janvier, Arnaud Montebourg confiait qu'il avait bien failli quitter le gouvernement, après avoir été désavoué par Jean-Marc Ayrault dans le dossier Florange. Ce samedi 1er décembre, "tout était prêt" pour son départ, avait-il alors expliqué sur BFM-TV. "Quand on est désavoué, qu’on ne peut pas agir, que la parole ministérielle est discréditée, il y a un moment où la question se pose", confiait-il. Arnaud Montebourg avait finalement décidé de rester à son poste, après avoir obtenu gain de cause auprès de l'Elysée pour reparler de "nationalisation temporaire" au 20h de TF1 alors que Jean-Marc Ayrault avait balayé l'hypothèse, la veille, jugeant cette solution "pas efficace" en termes de "débouchés " et de "compétitivité". Un livre révèle aujourd'hui les dessous du duel qui a opposé les deux hommes.

Des phrases assassines. Dans le livre Florange, la tragédie de la gauche, dont L'Express publie les bonnes feuilles mercredi, les journalistes Valérie Astruc et Elsa Freyssenet racontent plusieurs échanges cinglants entre le ministre du Redressement productif et le Premier ministre.

>>> Le best-of des échanges Ayrault/Montebourg

"On va tous finir en string panthère". La première scène se déroule à Matignon, le 28 novembre, lors d'une réunion consacrée aux négociations avec ArcelorMittal. Jean-Marc Ayrault et Arnaud Montebourg affichent déjà leurs désaccords. Le premier soutient Ulcos, le deuxième plaide pour une renationalisation temporaire, persuadé que le projet européen est voué à l'échec. Le ministre du Redressement productif lance alors au chef du gouvernement : "Je te rappelle que c'est le président qui est monté sur la camionnette [NDLR : le 24 février 2012, en pleine campagne électorale, François Hollande était venu soutenir les salariés], si on continue comme ça, on va tous finir en string panthère dans les jardins de l'Elysée, tous !" "Et ce sera la prochaine Une de magazine !", aurait alors moqué Jean-Marc Ayrault, en référence à la Une du Parisien magazine avec Arnaud Montebourg posant en marinière. Silence gêné dans l'assistance. Le tonitruant ministre aura finalement le dernier mot. "Sauf que c'est toi qui seras sur la photo", réplique en chuchotant Arnaud Montebourg.

"Ayrault a l'envergure d'un élu local". Le samedi 1er décembre, Arnaud Montebourg est reçu à l'Elysée. La veille, Jean-Marc Ayrault lui a adressé un sérieux camouflet en ne retenant pas l'option de la nationalisation temporaire du site de Florange. Blessé, le ministre du Redressement productif menace de démissionner. Dans le bureau de François Hollande, Arnaud Montebourg se déchaîne sur le Premier ministre. "C'est bien simple, tu as nommé un élu local à la tête du gouvernement", lance t-il au président. "Il a l'envergure d'un élu local, il aurait dû rester un élu local", assène encore le ministre, dans une colère noire.

"Tu fais chier la terre entière avec ton aéroport". Alors qu'il est dans le bureau d'un conseiller de François Hollande, ce même jour, Arnaud Montebourg reçoit un coup de fil de Jean-Marc Ayrault. Encore furieux, le ministre du Redressement productif s'emporte : "T'envoies l'aviation mitrailler tes troupes, c'est ça ? (...) Et après ça, tu fais chier la terre entière avec ton aéroport de Notre-Dame-des-Landes dont tout le monde se fout ! "Tu gères la France comme le conseil municipal de Nantes !", conclut, méprisant, le troisième homme de la primaire socialiste. "Désolé Arnaud, il n'a jamais été question de nationaliser", répond froidement l'ancien maire de Nantes.