CSG : ce que prépare le gouvernement

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Solène Cordier , modifié à
Malgré la prudence affichée, l'augmentation de cet impôt ne fait plus guère de doute.

La "vraie décision" pour l'opposition, "une piste" selon le gouvernement, l'augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) semble acquise à l'issue des deux jours de rencontres organisés par le gouvernement avec les partenaires sociaux.

La hausse de cet impôt, qui porte sur l'ensemble des revenus des activités, est un des leviers de financement de la protection sociale et de réduction des déficits publics. Quel impact cette augmentation aura-t-elle sur les Français? Europe1.fr fait le point.

• A quoi servirait une hausse de la CSG ?

La conférence sociale qui s'est déroulée lundi et mardi au palais d'Iéna a relancé l'idée de l'augmentation de la CSG. Si François Hollande ne l'a pas explicitement désignée comme la solution qui serait retenue, il a souhaité lundi, dans son discours d'ouverture, que le financement de la protection sociale ne pèse plus autant sur le travail, ce qui pénalise la compétitivité des entreprises.

Dans les "60 engagements pour la France" qu'il avait rendus publics lors de la campagne, le président évoquait "une grande réforme permettant la fusion à terme de l'impôt sur le revenu et de la CSG". "Une part de cet impôt sera affectée aux organismes de sécurité sociale", était-il précisé dans ce programme.

Le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a lui aussi admis, en clôturant la conférence sociale, que la hausse de la CSG était une piste envisagée pour la réforme du financement de la protection sociale.

Créée en 1990 par Michel Rocard pour élargir le financement de la protection sociale à d'autres revenus que les salaires, la CSG est assise sur l'ensemble des revenus des personnes domiciliées en France : revenus d'activité, de remplacement (indemnités, allocations chômage), du patrimoine, ainsi que des revenus tirés des jeux.

Selon l'Insee, elle a rapporté 88,6 milliards en 2011 (dont 10 milliards viennent du capital), bien plus que l'impôt sur le revenu ou l'impôt sur les sociétés. Elle frappe notamment les revenus des jeux à hauteur de 9,5%, les revenus du patrimoine (8,2%), les salaires (7,5%) et les retraites (6,6%).

Son rendement est élevé. A titre de comparaison, "un point supplémentaire de cette contribution représente entre 10 et 13 milliards d'euros de plus, soit le double d'une hausse d'un point de la TVA", note France TV Info.

• Quelle forme prendrait-elle ?

Les membres du gouvernement sont restés très prudents sur les modalités de la mise en œuvre de cette augmentation. Ils préfèrent pour l'instant s'en remettre au calendrier des négociations prévues avec les partenaires sociaux.

"Nous aurons courant 2013, au premier trimestre, des propositions précises qui seront mises en discussion avec les partenaires sociaux et courant 2013, le gouvernement proposera un projet de loi", a détaillé Jean-Marc Ayrault.

A l'image du Premier ministre, les ministres en charge du dossier ont pris le soin de préciser que cette mesure est seulement une piste de financement parmi d'autres. Le ministre délégué au Budget Jérôme Cahuzac a ainsi démenti mercredi le caractère "inéluctable" de cette augmentation, tandis que Michel Sapin, le ministre du Travail, a pour sa part déclaré que "c'est une piste mais ce n'est pas la solution".

Le Canard enchaîné est plus catégorique. L'hebdomadaire satirique cite mercredi un conseiller de l'Elysée selon qui Bercy étudie une hausse de deux à quatre points de la CSG "depuis près de dix jours". Interrogé sur ces révélations, Michel Sapin a botté en touche, répondant qu'"il peut arriver au Canard enchaîné de ne pas dire que des vérités".

Si l'augmentation de la CSG est acquise, son niveau sera conditionné par la prévision de croissance arrêtée pour 2013, indique le journal.

• Quel impact sur les Français ?

Sachant que la CSG est prélevée à la source sur les revenus d'activité et de remplacement, son augmentation aura un impact direct sur les salaires nets des salariés.

La CSG ne touche pas de la même manière toutes les catégories de Français. Les retraités, par exemple, paient moins de CSG que les actifs. "Aligner les pensions sur le taux à 7,5% rapporterait 3 milliards d'euros par an, selon les économistes", indique le Monde.fr.

C'est d'ailleurs l'épouvantail agité par la droite, défavorable à cette mesure. Laurent Wauquiez a ainsi soulevé sur France 2 "le risque de voir remise en cause la CSG réduite pour les retraités", malgré les démentis de Pierre Moscovici quelques jours plus tôt à ce sujet.

Côté syndicats, aucun front commun ne se dessine. Seule la CFDT se dit favorable à cette hausse de la CSG. "Il est normal qu'on réfléchisse à passer une partie du financement assujetti au travail sur tous les revenus : capital, patrimoine, travail, c'est-à-dire la CSG. Après, il faut débattre pour savoir jusqu'où on va", a déclaré lundi soir son secrétaire général François Chérèque.

Au Medef, la présidente du syndicat des patrons Laurence Parisot plaide quant à elle pour une hausse combinée de la TVA et de la CSG, pour permettre une baisse des cotisations sociales.

• Quelle différence avec la TVA sociale ?

A droite, plusieurs voix n'ont pas tardé à s'élever pour critiquer la hausse de la CSG et défendre le principe de la TVA sociale, l'autre mécanisme qui permet d'alléger les charges des entreprises tout en garantissant le financement de la sécurité sociale.

La TVA est la première source de recettes fiscales pour l'Etat. Le projet de TVA sociale de Nicolas Sarkozy, adopté au printemps dernier mais abrogé par la nouvelle majorité socialiste, prévoyait d'augmenter la TVA de 1,6 point, ce qui aurait dû rapporter 10,4 milliards d'euros.

A la différence de la CSG, la TVA est un impôt direct sur la consommation. Son augmentation se répercute sur les prix et touche donc tous les Français, quelle que soit leur catégorie.

"La dernière augmentation de deux points de la TVA en France date de 1995. Cette année-là, les prix à la consommation ont augmenté de 2,1% contre 1,6% l'année précédente", relève l'Expansion, en précisant toutefois que l'anticipation de son entrée en vigueur entraîne généralement un sursaut de consommation.

La CSG est, elle, comme décrit plus haut, un impôt "à assiette large". Elle touche l'ensemble des revenus, avec des barèmes divers. Les employeurs n'y sont pas soumis.

• Comment cette idée est-elle reçue ?

Les syndicats ont vite fait connaître leur désapprobation. La CGT a estimé, par la voix de son secrétaire général Bernard Thibault, que "la CSG dans sa mécanique actuelle n'est pas le bon outil", rappelant que "85% de ses ressources proviennent des revenus du travail, des salariés, ou des revenus des retraites ou des indemnisations chômage", et donc pas du capital.

Se plaçant sur le terrain économique, Vincent Drezet, le secrétaire général du syndicat national Solidaires Finances Publiques (ex-SNUI) a jugé de son côté que ce serait une "fausse bonne idée" qui va peser sur la croissance. Il préconise en revanche une "contribution sociale des entreprises" qui porterait sur la valeur ajoutée des entreprises, assiette plus large que la masse salariale.

La droite est elle aussi vent debout contre cette mesure, à laquelle elle préfère donc la TVA sociale.

Laurent Wauquiez a été le plus virulent, dénonçant sur France 2 un acte "criminel" si cette hausse de la CSG était adoptée.

"On nous annonce, et cela semble être la vraie décision de cette conférence sociale, même si elle n'est pas encore prise, une augmentation de la CSG", a commenté pour sa part François Fillon. La TVA, a expliqué l'ex-Premier ministre, porte sur "une assiette plus large" et "contrairement à ce que l'on dit, ce n'est pas injuste. On consomme en  fonction de ses besoins".

De plus, a-t-il argumenté, "il y a un avantage avec la TVA, vous taxez les produits importés. Avec la CSG, non".

Jean-François Copé a plus globalement dénoncé sur Europe 1 l'absence de décision à l'issue de la conférence sociale. "Le temps de la concertation ne doit pas dissimuler l'absence de courage politique", a résumé le secrétaire général de l'UMP.

Copé : "ne pas repousser les décisions difficiles"par Europe1fr