Exit la Manif pour tous, direction l'UMP

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Fabienne Cosnay , modifié à
RALLIEMENT - Pour peser dans le débat, des opposants au mariage pour tous rejoignent le parti d'opposition.  

Ne leur dites pas que l'UMP cherche à les récupérer. Eux affirment au contraire "faire de l'entrisme" au sein du principal parti d'opposition, en faisant "basculer les rapports de force internes". Des jeunes opposants au mariage pour tous viennent de créer au sein de l’UMP un mouvement politique baptisé "Sens commun". Après avoir lancé le site Internet de leur association le 1er décembre, ces figures de la Manif pour tous tiendront leur première réunion publique, jeudi prochain, au 238 rue de Vaugirard. Si l'UMP apporte son soutien logistique, en prêtant donc ses locaux au mouvement, le parti assure n'avoir pas mis un centime d'euros dans Sens commun.

ump

"On était politiquement orphelins". Il aura fallu six mois pour que le mariage soit scellé. Le 21 mai, à la veille de la dernière grande manifestation contre la loi Taubira, le président de l’UMP s'était livré à une opération séduction en direction des militants de la Manif pour tous, les invitant à transformer "leur engagement sociétal en engagement politique". Jean-François Copé rêvait même de "créer une génération UMP" et appelait les jeunes militants mobilisés contre le texte à faire part de leur opposition par les urnes, lors des élections municipales.

Si, dans un premier temps, l'appel du pied de l'UMP est resté sans réponse, des rapprochements ont fini par s'opérer. D'un côté comme de l'autre, les deux parties y ont trouvé un intérêt politique. "On était politiquement orphelins", reconnaît Madeleine Bazin de Jessey, porte-parole de l'association Sens commun. "A un moment, on a réalisé que notre combat ne servirait à rien sans relais politique", ajoute la militante, en première ligne dans les manifestations anti-mariage gay.

Qui sont-ils ? Les cinq fondateurs de Sens commun sont des figures connues de la Manif pour tous. Tous ont moins de 40 ans. Sébastien Pillard, qui présidera le mouvement, est l'ancien responsable de la Manif pour tous dans le grand Ouest, Madeleine Bazin de Jessey est la cofondatrice du mouvement des Veilleurs, Arnaud Boutheon est l'ancien directeur de cabinet de Frigide Barjot, Marie-Fatima Hutin fut l'une des "Marianne" des manifs. Enfin, Faraj Benoît Camurat est le politique de la bande. Ancien responsable des Jeunes Pop entre 2010 et 2012, il est depuis délégué de l'UMP en Haute-Loire.

cope et sarkozy

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Prises de contact. Les premiers contacts ont été établis au mois d'octobre. A la seule initiative de Sens commun, insiste la porte-parole du mouvement. Un rendez-vous avec Nicolas Sarkozy, dans ses bureaux, rue de Miromesnil. Un autre avec Jean-François Copé. "Il nous a dit qu'il nous ouvrait les portes ", se souvient Madeleine Bazin de Jessey et "nous a rassuré sur sa position concernant le mariage pour tous". Une référence aux propos tenus par le président de l'UMP, le 10 octobre, dans l'émission des Paroles et des actes : Jean-François Copé avait alors déclaré "n'avoir jamais eu d'opposition d'aucune sorte à l'idée du mariage homosexuel", provoquant l'ire de la Manif pour tous.

S'investir lors des municipales. S'il est trop tôt pour prédire leur influence, le mouvement cherche à se développer sur tout le territoire avec des responsables régionaux. Pour le moment, Sens commun refuse de communiquer sur son nombre d'adhérents. "Nous ferons le bilan d'ici un an", promet Madeleine Bazin de Jessey. En attendant, les militants du mouvement ont vocation à s'investir en vue des élections municipales. Une quinzaine d'adhérents à Sens commun seraient déjà présents sur des listes UMP. Des négociations sont en cours à Nantes, Paris ou encore Lyon.

Le mariage gay… et bien plus encore. Bien entendu, Sens commun souhaite que l'UMP revienne sur le mariage pour tous en cas d'alternance en 2017. "Nous voulons que la loi restaure le mariage comme union d’un homme et d’une femme", peut-on lire dans la charte mise en ligne sur leur site Internet. Sauf qu'à l'UMP, les dés sont jetés. La plupart des ténors du parti plaident en faveur d'une "réécriture" de la loi Taubira sans se risquer à parler "d'abrogation".

Laurent Wauquiez

Au sein du parti, seule une poignée d'élus, parmi lesquels les députés de Haute-Loire Laurent Wauquiez et de la Drôme Hervé Mariton défendent ce retour en arrière. Illusoire ? "C'est comme avec le Pacs, la droite ne reviendra jamais dessus !", persifle une source bien placée à l'UMP. D'ici 2017, le mouvement ne désespère pas de "changer les rapports de force en interne" au sein du parti. Et pas que sur les questions de société. Sur le modèle de La Boîte à idées, le mouvement entend faire des rapports réguliers sur tous les sujets, de l'engagement civique (ce sera le thème de leur première réunion) à l'éducation en passant par l'emploi.

"Un CDD avec l'UMP". Au-delà des prochaines échéances électorales, c'est surtout la perspective de 2017 qui intéresse les fondateurs de Sens commun. "Si le programme du candidat à la primaire ne tient pas compte de nos propositions, on n'hésitera pas à dissoudre l'association", assure la porte-parole du mouvement. "C'est comme si on avait signé un CDD avec l'UMP", résume Madeleine Bazin de Jessey. Le mariage va-t-il durer ?