Paul-Albert Iweins : "Il n'y a aucune raison de les entendre sous cette pression psychologique"

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SAISON 2013 - 2014, modifié à

L'avocat de Nicolas Sarkozy, Thierry Herzog, était également en garde à vue hier et il n'a donc pas pu assister son client.

Ce matin à 8h20, Europe 1 recevait Me Paul-Albert Iweins, avocat de Thierry Herzog.

 

Ses principales déclarations :

 

Vous avez assisté votre confrère Me Herzog…

"Il a été interrogé sous le régime de la garde à vue par des policiers pendant 36h, il a ensuite été présenté au juge d'instruction. La garde à vue s'est déroulée de façon courtoise, les policiers il n'y a rien à dire, mais c'est une garde à vue ! C'est à dire une coupure avec tout contact avec l'extérieur, une mise sous pression, la menace permanente éventuellement d'aller en prison. Il y a dans cet acte à l'égard d'un avocat quelque chose que je ne peux que réprouver."

Au même endroit, Nicolas Sarkozy était interrogé... Etat-il accompagné d'un avocat devant les policiers ?

"A ma connaissance, il n'était pas accompagné d'un avocat : son avocat, c'est Thierry Herzog, il l'est toujours d'ailleurs ! Dans cette affaire, il ne peut pas l'assister, il est également mis en cause."

Et après, devant les juges, entre 0h et 2h30...

 

"Nicolas Sarkozy a fait appel à un confrère, il a été obligé de le faire devant cette inattendue présentation à un juge : mon confrère Pierre Haik."

Me Herzog reste-t-il libre et avocat ?

"Bien sûr Thierry est toujours avocat, un grand avocat, qui pourra continuer d'assister Nicolas Sarkozy et ses autres clients. Il est évidemment heureux de pouvoir continuer d'assister Nicolas Sarkozy compte tenu des procédures dans lesquelles il l'assiste !"

 

Il peut retrouver ce matin son cabinet et son client Nicolas Sarkozy ?

"Dès ce matin il retrouve son cabinet et ses clients !"

Mais il n'est pas l'avocat pour l'affaire pour laquelle il était interrogé hier...

"Pour des raisons purement déontologiques : il est dans la même affaire !"

 

Pendant les interrogatoires, rencontre ou confrontation ?

 

"Il n'y a pas eu de confrontation entre les personnes retenues dans les locaux de police : ce qui est d'ailleurs curieux et rend d'autant moins justifiable la garde à vue."

 

Contestez-vous, avant la procédure, le choix et la méthode de la garde à vue ?

 

"Oui parce que vous avez affaire à un avocat, à un haut magistrat, à un ancien Président de la République : ce ne sont pas des gens qui vont prendre la fuite ! Les faits qui leurs sont reprochés sont parfaitement connus puisque publiés par divers sites internet depuis plusieurs semaines : il n'y a aucune raison de les entendre sous cette pression psychologique ! Il y avait un usage constant que les avocats mis en cause soient entendus par les juges d'instruction. Un ancien Président de la République, c'est une première et à mon avis de manière parfaitement injustifiée."

Nicolas Sarkozy devient un justiciable comme les autres...

"Mais je pense qu'un justiciable comme un autre ne devrait pas être en garde à vue dans cette affaire ! Au surplus, s'agissant d'un ancien Président de la République, et je n'ai pas de particulière sympathie pour lui, je le précise. Mais c'est quand même quelqu'un qui représente la France ! Vous imaginez ce que représente dans le monde entier l'idée qu'un ancien Président de la République est dans les services de police. Je considère qu'ils auraient dû être entendus par le juge d'instruction pour leur poser les questions qui leur ont été posées."

Le reproche est double : trafic d'influence, qui peut être sévèrement puni si avéré...

 

"Oui mais quand les faits seront connus autrement que par les écoutes, on s'apercevra que ce qui est dans les écoutes est contrarié par les éléments matériels, et on s'apercevra que tout cela est une histoire de discussion entre amis mal interprétée."

 

Oui mais dans des buts particuliers, pour influencer quelqu'un... On reproche à Sarkozy d'être le donneur d'ordre et le bénéficiaire d'informations confidentielles qui le concernaient...

"Nous ne sommes absolument pas dans le cas d'une équipe ou de gens qui financent, corrompent quelqu'un pour qu'il fasse quelque chose, qui lui remettent une enveloppe ! Nous sommes dans des relations entre amis où l'on parle de choses et d'autres. Il n'y a rien dans les faits qui vienne à l'appui de l'accusation ! Ce magistrat n'a pas été nommé à Monaco, vous avez vu le communiqué de la Principauté : aller dire qu'on a manœuvré pour qu'il soit nommé à Monaco est proprement absurde."

C'est une contre-offensive judiciaire qui s'organise...

"Mais bien sûr ! Il y a dans cette affaire énormément de choses à contester et à dire, nous sommes maintenant libres de le faire."

Avez-vous les moyens, les arguments, pourrez-vous convaincre la Justice et les Français ?

"Sur le plan juridique, sur le plan de la procédure, je n'y reviens pas : l'illégalité des écoutes. J'y ajoute une écoute tout à fait scandaleuse et particulière que je découvre dans ce dossier : on est allés jusqu'à écouter et transcrire la conversation entre Me Herzog et son bâtonnier après les faits et sa mise en cause publique. Le bâtonnier, qui est le confident nécessaire de l'avocat, auquel l'avocat doit se confier : on l'écoute et on le transcrit ! C'est une première mondiale ! Je n'ai pas d'exemple au monde d'une chose semblable, et après on va essayer d'opposer ces propos à Me Herzog. Je dénonce l'ensemble des écoutes et celle-là encore plus, qui me parait proprement inimaginable."

 

Emeut-elle le monde judiciaire ?

"Je pense que mes confrères seront certainement aussi indignés que moi."

La corruption active reprochée à Nicolas Sarkozy...

"Mais il n'y a pas de corruption active ! La corruption, c'est donner une enveloppe à quelqu'un ! Il n'y a aucun transfert d'argent, il y a des discussions entre des gens qui sont des amis ! Vous verrez : dans ce dossier, au bout du compte, il n'y aura rien !"

Mais ça va durer ?

"Ça va durer !"

Quels chefs d'inculpation précis pour Nicolas Sarkozy mis en examen ?

"Il y a une violation du secret de l'instruction, quelque chose d'extraordinaire dans ce dossier ! Tout le dossier est dans le journal et nous sommes mis en examen du chef de violation du secret de l'instruction car Me Herzog a communiqué à un haut magistrat qui commente dans les revues juridiques les décisions de justice une copie de l'arrêt de Bordeaux-Bettencourt que toute la presse avait ! Ce commentateur juridique se trouve mis en examen comme Me Herzog. Je n'ai pas vu de mis en examen

dans l'affaire des écoutes, je n'ai pas vu de mis en examen de tous les procès-verbaux ni de celui qui sera publié très prochainement, j'en suis convaincu, de Nicolas Sarkozy."

Quand les écoutes sont-elles été décidées ? Où ? Par qui ?

"On le sait par le dossier : tout cela est public, tout est dans le journal ! C'est M. Tournaire, juge d'instruction, qui dans l'affaire de la Libye, pour des faits supposés remontés en 2006 ou 2007..."

Au-dessus de lui ?

"Non, je pense que les juges sont indépendants."

 

Qui a écouté ? Qui a eu lecture des écoutes ?

"C'est un problème qui me choque comme citoyen : les policiers ont une double hiérarchie, à la fois le ministère de l'Intérieur et de la Justice, même quand ils agissent sur commission rogatoire. Je ne peux pas imaginer, Mme Monteil l'a dit à votre micro, que lorsqu'ils écoutent ils ne rendent pas compte... Le chef de l'opposition a été entendu pendant des mois avec des comptes rendus probablement journaliers au ministre de l'Intérieur !"

 

La Justice est politisée ou les enquêteurs vous ont semblé faire leur métier sans acrimonie ?

"Je pense qu'ils font leur métier mais qu'ils le font avec excès dans une affaire qui ne mérite absolument pas ce déploiement de force et de mesures de coercition."

Dans quel état est Nicolas Sarkozy ?

"D'après ce qui m'a été dit, il est tout à fait combattif, ça ne vous surprendra pas. Quant à Me Herzog, il a supporté cette épreuve avec la force et la détermination qu'on lui connait..."

On dit Nicolas Sarkozy abattu, inquiet...

 

"Je ne crois pas que cela ressemble à Nicolas Sarkozy. Il a connu d'autres épreuves de cette nature : il a  toujours su se  battre et faire une contre-offensive."

 

Est-ce de nature à la dissuader ou le décourager d'un éventuel retour en politique ?

"Je n'en sais rien mais ça m’étonnerait, connaissant le personnage..."