François Bayrou : "La France a besoin d'une démarche politique et un parti politique non sectaire"

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SAISON 2013 - 2014, modifié à

Le président du MoDem "n'est pas prêt à des compromissions" et assure qu'il n'a pas l'intention d'accompagner Manuel Valls.

Ce matin à 8h20, Europe 1 recevait François Bayrou, président du Modem et maire de Pau.

Ses principales déclarations :

 

François Hollande a t-il eu raison de choisir Manuel Valls ?

"En tout cas, c'était le meilleur choix qu'il avait devant lui ! L'entrée, les débuts de Manuel Valls sont réussis, je trouve. Son discours de politique générale a été bien reçu. Evidemment, ça ne veut pas dire qu'il a les solutions et, à mon avis de très loin, mais il faut au moins le laisser travailler ! A un moment, quand un travail gouvernemental est en cours, qu'il est décidé, orienté, il faut le laisser travailler, lui apporter du soutien si les solutions qu'il propose sont justes, on va en parler. En tout cas, ne pas mettre des bâtons dans les roues dès le premier moment."

Il a eu raison de le choisir quels que soient les risques pour l'avenir ?

"Que voulez dire, comme risques ? Pour François Hollande ?"

François Hollande serait absent d'un second tour s'il avait lieu demain...

"Franchement, les sondages en avril 2014 sur avril 2017 n'ont aucun sens !"

Etes-vous prêt à accompagner Manuel Valls, même pour un bout de chemin ?

"Non, je suis prêt à avoir une attitude politique positive, constructive. Je ne suis pas prêt à des compromissions. La France a besoin d'une démarche politique et d'un parti politique non sectaire : ce que nous faisons au centre, c'est bâtir ce mouvement politique qui refuse les attitudes sectaires ! Tout le monde voit bien l'extrême difficulté de la situation : elle a été aggravée ces deux dernières années, mais pas créée par ces deux dernières années ! Ça fait longtemps - peut-être 15 ans - qu'on n'arrive pas à prendre de face les problèmes qui se posent au pays, qu'on n'arrive pas à apporter les réponses nécessaires."

Pas de compromissions mais peut-être des majorités d'idées... Sur la réforme des régions par exemple ?

"La réforme des régions est nécessaire ! La simplification des collectivités locales est nécessaire ! Je plaide pour une fusion départements-région depuis longtemps. C'est évident que les compétences des départements vont être désormais beaucoup entre les mains de ces grandes collectivités que sont les intercommunalités."

 

Là vous pourriez vous entendre ?

"Oui !"

 

Michel Mercier a prévenu Valls qu'il était prêt à remplacer les départements du Rhône par l'intercommunalité, et demandait l'autorisation d'expérimenter...

"C'est une très bonne idée, un très bon chemin ! En bâtissant le parti politique non sectaire dont la France a besoin, nous choisissons que des majorités d'idées soient possibles ! Ça ne veut pas dire pour autant qu'on se livre au marchandage et à toutes les manœuvres politiques qu'on a trop connu par le passé."

Pierre Gattaz propose un salaire inférieur au SMIC pour les jeunes...

 

"On voit bien que ce n'est pas de leurs enfants qu'il s'agit... Le fait qu'on propose à des jeunes ou des plus âgés de travailler pour moins de 1.000 euros par mois - le SMIC c'est 1.120 euros, quelque chose comme ça - franchement ce n'est pas raisonnable, pas respectueux. On a le devoir de dire non. Si on veut aider que des jeunes ou des moins jeunes se réinsèrent dans l'entreprise, alors il faut aider les entreprises ! Je rappelle que je propose depuis longtemps que toutes les entreprises françaises puissent créer, quel que soit le niveau de cet emploi, deux emplois sans charges. Songez aux artisans, commerçants, à tous ceux qui pourraient faire entrer dans l'emploi... Mais ça passe par le fait qu'on décharge ces emplois - quel que soit leur niveau, je ne suis pas pour les trappes à bas salaire - ça change beaucoup les choses."

 

Faut-il supprimer le SMIC ?

"Non ! Bien sûr que non ! Si vous ne mettez pas de barrières, vous aurez des propositions d'emploi poussées par la nécessité, qui seront purement et simplement de l'exploitation."

 

Laurence Parisot y trouve des accents esclavagistes...

 

"Bon, c'est un peu la même idée même si le mot est plus fort..."

Vous êtes toujours le grand convaincu et défenseur de l'Europe ?

"Oui !"

Faut-il tout entreprendre, au nom de l'Europe et avant le 25 mai, pour une évaluation plus juste, donc à la baisse, de l'euro ?

"D'abord, personne n'a la possibilité de décider qu'on baisse l'euro ! Les taux d'intérêts de la BCE sont à près de 0%. Quand vous apportez de l'argent à un système économique et aux banques de ce système économique à près de 0%, il est très difficile d'aller au-dessous. Mais une fois qu'on a dit ça, il faut comprendre que les difficultés économiques que nous rencontrons ne sont pas dues à l'euro : la très grande majorité de nos échanges se fait avec nos pays voisins qui ont aussi l'euro ! Deuxièmement, le jour où l'euro baisse, naturellement vos exportations sont plus compétitives mais vos importations sont plus chères ! En particulier l'énergie, le pétrole, le gaz... Croire qu'il y a une baguette magique dans une baisse de l'euro, pour moi je ne partage pas ce sentiment..."

Pour redresser les comptes publics, y'a t-il une alternative au pacte de responsabilité ?

"Je vous le dirai le jour où je connaîtrai le pacte de responsabilité en détail, précisément ! Pour l'heure, ni vous ni moi ne savons exactement ce qu'il y a. Mais je peux dire une chose : il n'y aura pas de rééquilibrage des comptes publics tant qu'il n'y aura pas une reconstruction de l'Etat, des collectivités locales et de la Sécu. Croire qu'on peut, à la serpette, au sécateur, couper les branches qui dépassent et économiser suffisamment d'argent pour y arriver, je ne le crois pas !"

Vous ne croyez pas au 50 milliards ? Il en faudra davantage ?

"Oui, c'est même 75 ! Je ne vois pas pour le moment l'addition qui mène à ces 75 !"

 

Vous avez des nouvelles de Borloo ?

"Je l'ai eu au téléphone il y a assez peu de temps. Je ne l'ai pas vu : il se repose je crois hors de Paris."

 

Vous sentez-vous l'héritier de Borloo et l'incarnation du centrisme avec toutes les responsabilités ?

"Mes responsabilités au sein de ma famille du centre, elles sont réelles. C'est une famille qui défend une démarche politique nouvelle, et qui notamment sur l'Europe a un projet clair, ce qui n'est pas le cas des autres familles politiques. Jean-Louis Borloo, j'ai trouvé qu'il avait une bonne voix : je suis optimiste pour son état de santé ! C'est ce que j'ai ressenti en parlant avec lui. Je l'ai trouvé dynamique le jour récent de cette conversation."

 

Est-ce de votre royaume de Pau que vous allez mener vos batailles nationales ?

"Oui ! Je trouve que le monde politique est trop enfermé dans le bocal aux poissons rouges qui est celui qui existe dans les quelques centaines de mètres qui entourent Europe 1, la salle aux quatre colonnes... J'ai l'intention de m'exprimer à partir de Pau : on a besoin d'ancrer dans le réel ! Ce qu'ont fait Alain Juppé ou Martine Aubry : on a besoin d'ancrer dans la réalité de la vie des gens, de ne pas trop enfermer dans les quelques centaines de mètres strictement parisiens notre action politique..."

Michael Phelps revient à la compétition : c'est un modèle pour Bayrou et les JO de 2017 ?

"Je n'ai jamais annoncé ma retraite et je n'ai aucune l'intention de le faire ! Je ne nage pas suffisamment, notamment en eaux troubles ! J'essaie de nager en eaux claires !"