Tunisie : vent de haine contre Persepolis

Quelque 200 salafistes s'en sont pris au siège d'une chaîne qui avait diffusé Persepolis en Tunisie.
Quelque 200 salafistes s'en sont pris au siège d'une chaîne qui avait diffusé Persepolis en Tunisie. © DIAPHANA FILMS
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avec AFP et Xavier Yvon , modifié à
Les locaux d'une chaîne ayant diffusé le film ont été pris d'assaut par des salafistes.

A quinze jours des premières élections depuis la chute de Ben Ali, l'incident a de quoi inquiéter. Dimanche, quelque 200 salafistes ont tenté d'attaquer le siège de la chaîne Nessma, à Tunis. Le tort de cette télévision privée : avoir diffusé le film d'animation Persepolis, de Marjane Satrapi, qui traite notamment de la condition de la femme en Iran.

Les forces de l'ordre ont dispersé les assaillants, a indiqué le porte-parole du ministre de l'Intérieur, ajoutant qu'une centaine de personnes avaient été interpellées. Persepolis, film franco-iranien de Marjane Satrapi, décrit le régime de Khomeiny à travers les yeux d'une petite fille. La diffusion du film était suivie d'un débat sur l'intégrisme religieux.

La bande-annonce du film :

Menaces de morts et injures

Après la diffusion du film vendredi soir, des appels sur Facebook à "brûler Nessma et à tuer ses journalistes" avaient été lancés, selon le président de la chaîne, Nebil Karoui. "Les intentions étaient claires, les slogans aussi : c'était des menaces de mort, des injures comme quoi nous étions des mécréants", a raconté à Europe 1 le directeur de l'information de la chaîne, Sofiene Ben Amida.

Ce n'est pas la première fois que les salafistes tunisiens s'en prennent à un film. En juillet dernier, ils avaient déjà attaqué un cinéma de Tunis qui diffusait un film de la réalisatrice tunisienne Nadia El Fani sur la laïcité.

Rediffusion mardi soir

Reste que l'incident de dimanche se produit dans un contexte bien particulier : le 23 octobre, les Tunisiens sont appelés à élire une assemblée constituante. Mais Sofiene Ben Amida n'est pas particulièrement inquiet : en Tunisie, les salafistes "ne sont pas nombreux et ils n'ont pas le soutien populaire". "Ils sont peut-être très bruyants, très actifs, mais ils n'ont aucune chance de peser sur les élections", a-t-il conclu.

La chaîne, en tout cas, n'entend pas se laisser intimider : une rediffusion de Persepolis, qui était diffusé pour la première fois en arabe dialectal tunisien, est d'ores et déjà prévue pour mardi soir.