Rio-Paris : le rapport très attendu du BEA

Le rapport d'expertise judiciaire, qui sera présenté aux familles le 10 juillet, fait lui état de causes à la fois techniques et humaines.
Le rapport d'expertise judiciaire, qui sera présenté aux familles le 10 juillet, fait lui état de causes à la fois techniques et humaines. © MAXPPP
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Charles Carrasco avec agences , modifié à
Révélé jeudi, il permettra d'en savoir plus sur les responsabilités du crash survenu en juin 2009.

Les conclusions seront étudiées à la loupe par Air France et Airbus, toutes deux mises en examen au pénal mais également par les familles de victimes. Le Bureau d'enquêtes et d'analyses (BEA) rend jeudi son rapport final sur la catastrophe du vol Rio-Paris, qui a fait 228 morts le 1er juin 2009. Le rapport d'expertise judiciaire, qui sera présenté aux familles le 10 juillet, fait lui état de causes à la fois techniques et humaines. "Ce qui est intéressant avec ces deux rapports, c'est qu'on va commencer à y voir plus clair, non pas dans le déroulement de l'accident mais dans les responsabilités", a expliqué Bernard Chabbert, le consultant d'Europe 1 spécialiste de l'aéronautique. Un point sur l'enquête avait été effectué par le BEA en juillet 2011, concluant partiellement à la responsabilité des pilotes.

"Les responsabilités d'Airbus et d'Air France"

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Les familles se félicitent du rapport des experts judiciaires, jugé impartial. "Les responsabilités d'Airbus, d'Air France et des pilotes sont pointées, des problèmes de fonctionnement de l'appareil sont même évoqués alors qu'avec le BEA, on avait l'impression que seuls les pilotes étaient responsables", a insisté le président de l'association Entraide et Solidarité AF447.

Pour l'un des avocats de familles, Me Yassine Bouzrou, "ce rapport permet de mettre en cause clairement Airbus, dans la mesure où les experts critiquent la conception de l'avion, et Air France, dans la mesure où la formation des équipages n'a pas été assurée convenablement".

Le givrage des sondes

Une vingtaine de conclusions sortent de ce rapport de 356 pages demandé par la juge Sylvia Zimmermann. Sont évoqués une perte de données due au givrage des sondes Pitot, une procédure inadaptée dans ce cas, mais également une absence de réaction appropriée de l'équipage ou encore un manque de suivi des incidents depuis 2004.

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© REUTERS

Une trajectoire non maîtrisée. "Le décrochage" de l'appareil "a été initié par une trajectoire non maîtrisée alors que survenait la perte de données de pression totale du fait du givrage des sondes Pitot, accompagnée des alarmes et de la dégradation des systèmes associés", selon l'une des conclusions. Le rapport met en lumière un déficit d'informations de l'équipage "concernant le givrage des sondes ou de l'altitude est contributif de l'effet de surprise".

Des procédures d'urgence inadaptées. Les conclusions mentionnent que la "procédure 'IAS douteuses' (requise lors du givrage des sondes, ndlr) bien qu'adaptée à la situation était inadéquate au vu des symptômes perceptibles". Les conditions d'application de la procédure en cas d'alarme de décrochage définies dans la documentation "n'étaient pas adaptées à l'urgence de la situation", est-il aussi souligné.

Des conditions de vol défavorables. Sont pointées du doigt des conditions de vol défavorables : "de nuit, en turbulences et sans références visuelles", ainsi que des "phénomènes de cristaux de glace (…) officiellement ignorés". Est également relevée la fatigue de l'équipage lors de ce vol de nuit.

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Les défaillances humaines. Les experts notent que le commandant de bord "n'a pas assumé ses responsabilités managériales", "a inhibé la volonté de bien faire du copilote". Il n'y a pas eu de "réaction appropriée à l'alarme" décrochage.

Une formation inadaptée. La formation des pilotes est mise en cause par les experts pour qui il n'y a "pas d'exigences particulières complémentaires à la compétence du copilote, définies par l'exploitant, pour assumer la fonction de suppléant du commandant de bord".

Une photo du train d'atterrissage de l'avion. AF 447 Rio Paris. 930620

© BEA

Un manque de suivi des incidents depuis 2004. Des modifications techniques sont épinglées car non suivies d'analyse de sécurité tandis que sont notées des "spécifications de certification (CS25) qui n'ont pas évolué à la suite des incidents de perte d'indications de vitesse depuis 2004".

Les experts relèvent que "l'absence de réponse de l'Agence européenne de sécurité aérienne (AESA)" aux demandes de la justice "n'a pas permis l'examen et l'analyse des sujets concernant l'autorité de certification". En mars 2009, malgré plusieurs défaillance de sondes Pitot, l'agence avait estimé qu'aucune action n'était nécessaire.